Aucun Algérien n'aurait pu penser que l'hospitalisation de leur Président allait donner lieu à une surenchère aussi décadente et déshonorable. Dérapage, bavure ou dérive, les propos de Douste-Blazy sur l'hospitalisation du président Bouteflika en France ont largement dépassé les règles de la bienséance diplomatique. Ce geste inamical du chef de la diplomatie française, sur une radio juive, le confond de manière intime avec les thèses néocolonialistes de Le Pen quelques jours auparavant. Qu'est-ce qui a pris à Douste-Blazy de s'attaquer ainsi à un chef d'Etat de surcroît d'un pays aussi proche que l'Algérie ? On savait le maire de Toulouse peu à l'aise dans le costume du patron d'un département aussi prestigieux que le Quai d'Orsay. On savait aussi que Douste-Blazy ne supportait pas la comparaison face à ses prédécesseurs, que ce soit Joubert, de Charrette, Juppé, Védrine ou de Villepin, des ténors qui n'ont jamais franchi ce seuil face à l'Algérie même en période de crise. On savait également que Douste-Blazy, habitué aux gaffes, comme lors de son voyage burlesque au Niger, lors de la famine, peu enclin à s'autonomiser de l'Elysée et à prendre des “initiatives” qui mettraient en porte-à-faux la politique extérieure française. Mais l'ironie humiliante dont il a fait preuve face à un chef d'Etat étranger fait craindre que les divisions politiques internes en France n'aient fait perdre la tête à certains ministres. Il est vrai que pour beaucoup d'Algériens, le président Bouteflika ne devait pas aller faire son contrôle en France. Surtout après avoir évoqué le “génocide identitaire” sur lequel les Algériens sont unanimes à le qualifier comme tel. Il est vrai également que le président algérien avait certainement cru que la France officielle, à ne pas confondre avec celle des réseaux de nostalgiques de l'extrême droite, connaissait les motifs de ce déplacement privé et savait garder le secret diplomatique d'usage en pareilles circonstances. Mais aucun Algérien n'aurait pu penser que l'hospitalisation de leur Président allait donner lieu à une surenchère aussi décadente et déshonorable. Le président Chirac a été accueilli avec des fleurs à Bab El-Oued. Bouteflika avec des paparazzis au Val-de-Grâce. Entre les deux, l'écart moral qui existe dans l'exercice de la politique et de la diplomatie. Est-ce la manière qu'a Paris de lancer un message au président algérien d'avoir tissé des alliances avec les Américains ou les Russes ? Où est-ce une perte totale de contrôle et de sang-froid face au recul français en Algérie ? Dans les deux cas, Douste-Blazy peut être “fier” de ses ancêtres. M. B.