Avant de se mettre dans la peau d'un postulant à sa propre succession, il aurait fallu d'abord que le Président convainc les Algériens de ce qu'il a réalisé durant le mandat pour lequel il a été élu. S'il y avait encore un moindre doute sur ses intentions de futur présidentiable, Abdelaziz Bouteflika vient de le lever lors de sa tournée dans l'est du pays. Aussi bien à Khenchela qu'à Tébessa, où il était supposé être en visite de travail inspectant des projets, Bouteflika s'est mis dans la peau d'un candidat en précampagne électorale. Ainsi donc, le chef de l'Etat sort des buissons pour s'inscrire dans la course à sa propre succession. Il importait pour cet homme de faire d'abord dans les formes et frapper les esprits. Le cérémonial, le rituel mis en place durant ces deux jours, y compris la gestuelle et la tenue arborée, rappellent étrangement hélas l'image de cet homme du consensus lors de la campagne de 1999. Comme il fallait s'y attendre, il n'a pas hésité à mettre à contribution les médias publics pour servir son opération de marketing politique. Certes, il ne lui est pas interdit de briguer un second mandat. Mais le problème est le suivant : avant de se mettre dans la peau d'un postulant à sa propre succession, il aurait fallu d'abord que le Président convainc les Algériens de ce qu'il a réalisé durant le mandat pour lequel il a été élu. Or, le bilan est là : parmi ses nombreux engagements annoncés officiellement et publiquement, aucun n'a été honoré. Le chômage perdure, la réforme de l'école est renvoyée aux calendes grecques et celle de la justice reste à l'état de vœu pieux. Que dire alors de la restauration de la paix qui va, sans doute, figurer parmi ses promesses futures ? Le terrorisme sévit encore. Quid de la gestion de la crise en Kabylie ? La franchise exige d'affirmer que Bouteflika avait et a encore toutes les cartes en main pour en finir avec cette crise. Il ne l'a pas fait. Pis, il se refuse à le faire. Comment dès lors croire aujourd'hui en la sincérité de son appel au dialogue ? Et, plus globalement, comment croire en ce Président-candidat qui a tant promis et qui a, en définitive, fini par décevoir ? Hier, dans les Aurès, Bouteflika a parlé comme un démarcheur. R. B.