Dans le but de mettre en œuvre leur programme de lutte contre le terrorisme dans la région, les Etats-Unis ont dégagé un budget conséquent pour mener à bien leur mission dans les neuf pays sahéliens concernés par l'opération. Considérant la région comme faisant partie des grands espaces mal gouvernés, les Américains mettent le paquet au Sahel dans l'espoir de rendre efficace leur combat contre le terrorisme. Selon le général américain James Jones, ces espaces “sont devenus attrayants pour les groupes terroristes qui se voient privés de plus en plus de leurs sanctuaires en Afghanistan et au Moyen-Orient”. James Jones, qui est chef du commandement européen de l'US Army (Eucom), est aussi chargé des opérations en Afrique. Selon lui, les pays du pourtour saharien sont considérés comme “un terrain de recrutement favorable, prédisposé à l'influence radicale terroriste et à d'autres activités de déstabilisation”. Partant de ce constat, Washington ne veut prendre aucun risque sur ce plan- là. Ainsi, le Pentagone compte investir 600 millions de dollars au cours des cinq à sept ans à venir, dans le cadre de son programme de partenariat contre le terrorisme transsaharien. Celui-ci concerne neuf pays au total. Outre l'Algérie, il s'agit également du Mali, du Tchad, de la Mauritanie, du Maroc, du Niger, du Sénégal, du Nigeria et de la Tunisie. L'activisme régional des éléments du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC) vient conforter les Américains dans leur raisonnement. Pour rappel, le GSPC s'est notamment signalé en 2003 en enlevant 32 touristes européens dans le Sahara algérien. Les actes terroristes de ce groupe sont régulièrement signalés en Algérie, où il a encore tué sept soldats le 8 novembre dernier, d'où la crainte des Américains de voir son activité prendre davantage d'ampleur. L'argument de Washington est qu'Al-Qaïda et les groupes qui s'en réclament, puissent trouver des sanctuaires dans des pays du pourtour sahélien comme le Mali. Ils citent le cas d'Oussama Ben Laden, lequel avait bel et bien trouvé refuge au Soudan dans les années 1990. Même si certaines parties estiment qu'il y a de l'exagération dans la vision américaine, il n'en demeure pas moins que l'évolution de la situation dans le nord désertique du pays, où s'entremêlent islamisme armé, agitation touareg et trafics de toutes sortes, donne du crédit à cette thèse. Ceci dit, pour nombre d'analystes occidentaux, l'armée américaine amplifie délibérément la menace terroriste pour avoir les coudées franches dans les pays de la région. Dans cette optique, l'universitaire britannique, Jeremy Keenan, accuse même Washington d'inventer la menace pour “s'assurer l'Afrique” et l'accès à ses ressources naturelles. Il argumente son point de vue en affirmant que “les Etats-Unis cherchent à réduire leur dépendance du Moyen-Orient pour le pétrole, et les pays d'Afrique, qui remplissent 16% de ses besoins actuellement, devraient en représenter 25% d'ici à 2015.” En créant cette affaire terroriste, les Américains créent les “conditions de la militarisation de l'Afrique”, tranche-t-il. K. ABDELKAMEL