Le ministre de l'Intérieur indique qu'une “information comme ça sème la panique”. Il évoque une “manœuvre”. Sollicité en marge de la visite du président de la République au Nouvel Institut Pasteur d'Algérie, en vue de réagir à l'avertissement diffusé samedi dernier par l'ambassade des Etats-Unis d'Amérique à Alger sur des attentats imminents, pouvant avoir lieu le jour même à la Grande-Poste et au boulevard des Martyrs, devant le siège de l'ENTV, le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales estime que la réponse doit émaner des médias. “Sinon, on vous prendra pour des canards sauvages !” a-t-il dit avant de rectifier juste après. “On nous prend tous pour des canards sauvages !” Le “on” renvoie sans équivoque aux auteurs de l'alerte. Très remonté, M. Zerhouni accuse en des termes à peine voilés les Américains. “Montrez qu'il y a une manœuvre”, exhorte-t-il en s'adressant aux reporters quand ils rebondissent sur le sujet lors de la troisième escale au siège de la cour d'Alger. Il demande leur avis sur la portée et les arrière-pensées d'un tel avertissement. “Une information comme ça sème la panique”, soutien le ministre d'Etat avant de se demander plein de suspicion : “Qui a intérêt à semer la panique dans le pays, dans la ville ?” À la question de savoir si des explications ont été demandées aux responsables de la représentation US, M. Zerhouni assure que ce genre de démarches est du ressort exclusif du ministère des Affaires étrangères. Ce que les services de Mohamed Bedjaoui ont accompli en convoquant hier le chargé d'affaires américain au siège du MAE. Tout récemment, la chancellerie anglo-saxonne s'est distinguée en publiant un premier bulletin très alarmiste, annonçant des attentats pour le 11 mars. Officiellement, ce genre d'informations est destiné aux ressortissants US résidant ou de passage dans notre pays. Depuis l'attaque commise sur la route de Bouchaoui, contre deux bus de la joint-venture algéro-américaine, Brown, Root and Condor (BRC) spécialisée dans le domaine des hydrocarbures, les diplomates US sont en alerte. Dans son appréciation du danger terroriste, le ministre de l'Intérieur, pour sa part, assure qu'“il faut maintenir la vigilance et la pression sur les groupes terroristes”. “Nous n'avons jamais dit que le terrorisme est fini”, précise-t-il. Selon lui, ni la stratégie de lutte contre ce fléau ni le dispositif mis en place pour le combattre n'ont été remis en cause. Tranchant, il estime que les terroristes n'ont pas le choix. “J'ai déjà déclaré par le passé que ces gens-là sont dans une impasse. Ils n'ont devant eux que deux issues : se rendre ou se suicider et ils sont en train de se suicider”, observe-t-il. Après avoir identifié le premier kamikaze ayant ciblé le Palais du gouvernement (Merouane Boudina, 28 ans, alias Mouaâd Ben Jabal), les services de sécurité viennent de mettre un nom sur ses deux acolytes qui ont fait exploser leurs véhicules à Bab-Ezzouar. “Malheureusement, ce sont des Algériens”, révèle le ministre avec une pointe d'amertume dans la voix. Il ne donnera pas plus de détail sur le déroulement des investigations. “Les choses avancent”, se contente-t-il d'affirmer. Evoquant la réconciliation nationale, il considère qu'elle est toujours de mise. Vendredi dernier, il affirmait que les auteurs des attentats visaient vraisemblablement à nuire à cette démarche. Il faisait cette déclaration à l'issue d'une visite aux blessés dans les hôpitaux. Ce jour-là, le ministre de l'Intérieur annonçait un premier bilan comportant 33 morts et 330 blessés dont 57 étaient gardés dans les hôpitaux. Hier, il est revenu sur ces chiffres en annonçant 30 décès et 37 blessés dont certains ont regagné leur foyer hier. Selon le ministre, le processus d'identification a permis finalement de fixer à 30 le bilan des personnes décédées. Samia Lokmane