Issad Rebrab a réussi le pari, hier à Boumerdès, de tenir en haleine son auditoire, formé d'enseignants et d'étudiants de la faculté des sciences de l'ingénieur, pendant près de deux heures. Après l'université de Tizi Ouzou, c'est au tour de l'établissement universitaire de Boumerdès, particulièrement la faculté des sciences de l'ingénieur, d'accueillir, deux mois plus tard, le président-directeur général du groupe Cevital, Issad Rebrab. Ce dernier, a fait son entrée dans l'amphithéâtre n°4, archicomble, dépassant les 150 personnes, entouré du recteur, Mme Rafika Kesri, et d'autres responsables de la faculté, notamment le directeur du laboratoire matériaux, minéraux et composés (LMMC), vers 11h15. Sa visite, entamée une heure auparavant à l'intérieur des services du laboratoire (matériaux et composites, analyse thermique, rhéologie, etc.), a, semble-t-il, été très bénéfique pour l'industriel, qui a une idée précise à présent des projets pouvant être initiés avec les enseignants-chercheurs. Par ailleurs, les discussions qu'il a eues avec ces derniers lui ont servi dans son approche pédagogique avec les étudiants. Parlant comme à son habitude d'une voix calme et usant de la méthode active de communication, à travers les diapositives, M. Rebrab a présenté son groupe, depuis le début des années 1970, au temps où il avait créé l'ex-société Socomeg, à ce jour. “Le groupe Cevital emploie actuellement 5 500 salariés”, a-t-il déclaré, rappelant ces milliers d'“emplois indirects” créés et étalant sans complexe les chiffres d'affaires réalisés, l'apport “important” de Cevital au budget de l'Etat, ainsi que “ce besoin de voir grand pour réussir”. L'intervenant a ainsi exposé les 5 projets industriels lancés en 2005, à l'exemple de la nouvelle raffinerie de sucre, les 2 centrales électriques, l'unité d'eau minérale, l'usine de verre plat et les 2 autres unités de fabrication en bâtiment préfabriqué, qui, a-t-il précisé, seront tous en production au cours de l'année 2007. Et, au passage, il a fait savoir déjà qu'il aura besoin du savoir-faire de l'université de Boumerdès, en matière de bâtiment préfabriqué. Il a également noté que son programme d'investissements pour la période 2005-2010 se chiffre à plus de 165 milliards de dinars, dont plus de 41 milliards seront réservés au complexe sidérurgique, près de 36 milliards à la grande distribution (centrale d'achat et grandes surfaces) et plus de 36 milliards à la pétrochimie et la production du verre. Là encore, le P-DG du groupe Cevital a affirmé qu'il souhaite le développement d'une “coopération” avec l'université de Boumerdès, en particulier le LMMC, dans le domaines des études de matériaux pour son projet Cevico de construction de logements, dont la filiale de Bab-Ezzouar (Alger) vient de démarrer. “Je peux vous promettre qu'une centaine d'usines peuvent couvrir tous les besoins en logements”, a révélé M. Rebrab, rappelant que la filiale Cevico d'Alger s'est fixée pour objectif de produire quotidiennement 25 logements de 80 m2. Décidé à “charmer” son auditoire et assumant son statut de libéral, Issad Rebrab a utilisé pourtant des mots qui rassurent, en plaçant la priorité de “l'emploi”, de “la production nationale”, des “compétences nationales” et des “besoins” du marché algérien à couvrir, au centre de ses projets économiques. “Tous nos projets sont dédiés d'abord pour les besoins du marché national et ensuite les excédents dégagés seront destinés à l'exportation”, a-t-il soutenu, non sans insister sur les emplois à créer et “la priorité à l'investissement en Algérie”. Même la “mondialisation” ne l'effraie pas, puisqu'il reconnaît de lui-même que “les faibles sont automatiquement éliminés” et qu'il faut pour cela avoir de l'ambition de “se placer sur le marché international en investissant dans le facteur humain” et en réalisant des “produits de qualité”. Un exemple de réussite… La prestation d'Issad Rebrab, invité conjointement par le LMMC et l'organisation estudiantine Savoir, sur son expérience et ses projets, a fait beaucoup d'effet sur l'assistance, restée aussi nombreuse jusqu'à la fin. Elle a même suscité beaucoup de questions sur le groupe industriel, mais aussi sur des domaines liés, entre autres, à la formation, au recrutement et à d'autres projets en relation avec les huiles, le sucre et la pollution de l'environnement. “Les jeunes Algériens ont besoin d'être encadrés, bien payés et respectés”, a déclaré Issad Rebrab, en se disant favorable pour le recrutement de cadres nationaux “mais compétents”. “Soyez les meilleurs et vous serez les bienvenus chez nous”, a-t-il lancé aux étudiants. Il a, par ailleurs, annoncé que son groupe se prépare à se lancer dans la savonnerie et la spécialisation des huiles végétales riches en oméga 3 et contre le cholestérol. M. Rebrab a aussi répondu à ceux qui lui ont demandé la clé de sa réussite. “Je suis fier de ma réussite, car c'est aussi une réussite algérienne”, a-t-il d'abord soutenu, avant d'ajouter : “Tout le monde peut réussir à condition de travailler, de faire les bons choix des créneaux porteurs, se trouver une place sur le marché pour s'y positionner, se battre sur le plan international…” Il a néanmoins souligné que tout projet est difficile au démarrage, ce qui exige de “la persévérance”, ensuite de “l'innovation”. “Nous avons intérêt à travailler en étroite collaboration avec le milieu universitaire en vue d'avoir des professionnels. Je suis prêt pour la conclusion d'un protocole d'accord, ainsi que l'accompagnement de certains chercheurs et étudiants qui préparent des magistères”, a conclu l'homme d'affaires. “Le P-DG de Cevital donne l'exemple de la réussite”, a reconnu le recteur. Mme Kesri a également explicité qu'une telle visite entre dans le cadre du programme de l'université de “rapprochement avec le monde socioéconomique”. “Nous sommes en fin d'année et nous voulons donner aux futurs diplômés des opportunités d'emploi. Nous avons également des universitaires-chercheurs qui sont capables de mener à terme des projets”, a-t-elle déclaré à Liberté. La séance est levée, mais les étudiants et les profs n'ont pas lâché leur invité. Ils se sont bousculés pour l'approcher. Toujours le sourire aux lèvres, M. Rebrab a répondu aux nombreuses sollicitations, remettant sa carte de visite par-ci, suggérant de venir le voir par-là. “J'ai été agréablement surpris. Le LMMC a été une vraie découverte pour moi”, nous a-t-il confié, en indiquant plus loin : “On voit que nos étudiants ont soif de discussions et de débats.” Hafida Ameyar