Moins de 48 heures après le dernier lâche attentat de Batna, la vie a repris son cours dans la capitale des Aurès en ce début de semaine. Certes, le sujet principal des discussions est toujours l'acte terroriste de jeudi, mais “la vie continue”, selon des citoyens. Hier, en début de journée, sur le lieu de l'attentat, les citoyens, en petits nombres, continuent à se rassembler pour jeter un rapide coup d'œil sur cette place, jadis un anodin passage sur un croisement de deux chemins, sorti de l'anonymat dans de douloureuses circonstances. Certains passants observent une halte sur les lieux, le temps de lire la Fatiha avant de continuer à vaquer à leurs occupations. “Allah yerhamhoum”, nous a dit l'un d'entre eux. Au même moment, un homme en blouse blanche, aidé par des jeunes de la cité, continue de nettoyer le reste des taches de sang, toujours visibles sur le carrelage. À l'inverse des “temps ordinaires” si l'on ose dire, on ne peut pas ne pas remarquer une forte mais discrète présence policière sur les lieux de l'attentat de jeudi dernier. Un peu plus en bas, dans le rond-point où le Président devrait être accueilli, la décoration est toujours installée, les drapeaux et les posters géants de Abdelaziz Bouteflika sont là. Le marché des 84-Logements, lui, a rouvert ses stands et les marchandises sont exposées sur les étals. Les “gamins vendeurs” à la sauvette se sont réapproprié leur espace. Le temps est à la négociation des prix avec les femmes venues faire leurs emplettes. Les Batnéens sont, ce matin, peu loquaces, ils n'arrivent toujours pas à saisir ce qui s'est passé et tout le monde se demande, justement, “pourquoi Batna ?” comme si quelqu'un peut analyser la folie suicidaire humaine. Dans les kiosques, en ce samedi, pas un titre de journal n'est exposé alors que le jour commence juste à s'installer. Tous les exemplaires de la presse nationale ont été vendus dès les premières heures de la journée. Dans un cybercafé, des jeunes, dont l'âge ne dépasse pas les 15 ans, surfent sur le net en quête d'images de l'horrible attentat qui s'est produit chez eux. C'est vrai qu'on est un peu perturbé, mais cela ne va pas nous enfermer chez nous ; “mezelna labass”, nous dit l'un d'eux. Au centre hospitalo-universitaire de Batna, les choses sont rentrées dans l'ordre et on est passé au stade de la gestion usuelle après un dispositif exceptionnel mis en place 24 heures durant. Au niveau des urgences, il y a foule. Si dans un premier temps, on a pensé que cela est lié à l'attentat de jeudi, après vérification, il s'est avéré qu'ils sont là pour des consultations ordinaires. Pour le personnel du centre, notre présence était une occasion pour démentir ce qu'ils qualifient de “rumeurs sur une gestion belliqueuse de la crise le soir du jeudi dernier”. “Ce fut un déluge de citoyens effrayés, dans un état hystérique pour certains, qui s'est abattu sur l'hôpital, et on ne pouvait pas contenter tout le monde en matière d'informations car l'essentiel était de sauver des vies”, nous précisera un des cadres paramédicaux. “On a fini par canaliser ce déferlement en l'orientant vers ce qui est plus urgent, le don de sang et c'est ce qui a été fait”, continue notre interlocuteur. Ainsi, en plus des morts, le bilan des services hospitaliers donne 131 admissions en l'espace de 15 minutes. À ce jour, 68 interventions chirurgicales ont été effectuées mobilisant 19 médecins spécialistes en plus des paramédicaux et des praticiens venus du secteur privé. F. Lamia