Les maladies nosocomiales reviennent cher à la collectivité : la prise en charge d'un seul malade coûte 80 000 DA par jour. La médecine a connu son apogée avec les grandes découvertes de Pasteur qui a été le premier à prouver l'existence des microbes. L'apport du médecin anglais Alexander Fleming a été déterminant lui aussi car, en mettant en évidence la pénicilline, il a réussi, pour la première fois en 1928, à éliminer des microbes du corps humain. Depuis, la médecine s'est appliquée à lutter contre toutes les pathologies ayant une origine microbienne. Si les antibiotiques ont permis de lutter contre les microbes, leur usage abusif a abouti à l'apparition de nouvelles souches résistantes, surtout lorsque la contamination a lieu en milieu hospitalier. Aujourd'hui, les médecins font tout pour limiter l'apparition et la propagation des germes pathogènes en milieu hospitalier notamment. Justement, le meilleur moyen de lutte contre ce genre d'infections demeure la prévention. L'asepsie en milieu hospitalier a en effet permis de diminuer de façon significative le nombre d'affections nosocomiales (maladies contractées à l'hôpital) mais, malgré tous les efforts déployés, il n'est pas rare de voir des services fermés pour cause d'infections. “Nous prenons toutes les mesures d'asepsie, malgré tout, des accidents surviennent... Cela nous oblige à fermer le service de chirurgie et nous ne reprenons nos activités qu'après le traitement de toutes les surfaces, en vue d'en assurer une stérilisation effective : une condition indispensable à toute activité chirurgicale”, affirme un chirurgien de santé publique. Ce dernier évoque notamment le problème du linge utilisé au bloc opératoire et dont il juge le degré de stérilisation en deçà des normes requises. En Algérie, le linge du bloc opératoire est toujours en tissu et stérilisé dans des autoclaves (appareil de stérilisation par la chaleur). Pour lutter contre les maladies nosocomiales, les pays développés ont adopté depuis très longtemps le linge à usage unique. Fabriqué à partir de fibres de cellulose traitée, ce linge ne présente que des avantages, car il n'est pas réutilisable, ce qui lui confère une sécurité prouvée de non-contamination. Les gestionnaires du secteur de la santé pensent réaliser des économies en optant pour le tissu, mais la réalité est tout autre : les tenues jetables paraissent onéreuses et la prise en charge d'un seul malade ayant contracté un microbe nosocomial revient à 80 000 DA par jour. Les blocs opératoires sont dotés d'équipements modernes assurant la stérilisation de l'air ambiant, mais il suffit qu'une seule tenue de bloc soit mal aseptisée pour que le malade et même l'équipe médicale encourent le risque d'être contaminés. Les médecins réclament depuis longtemps du linge jetable, mais seulement quelques services en disposent, et c'est à ce niveau où les contaminations nosocomiales sont exceptionnelles. Par ailleurs, comme le personnel hospitalier n'est pas formé aux techniques de traitement du linge résultant des activités médicales, cela engendre un autre danger pour les travailleurs et les malades. Les praticiens évoquent la généralisation de l'usage des seringues jetables, un choix qui a permis de mettre un terme aux infections jadis courantes, dues aux mélanges des médicaments dans les seringues en verre. “Je me rappelle, quand j'étais jeune médecin, avoir eu à prendre en charge un jeune homme qui présentait une allergie due à un produit resté dans la seringue en verre utilisée par l'infirmier pour lui injecter son traitement. La seringue en verre servait pour plusieurs malades et seule l'aiguille était changée à chaque fois. Depuis la généralisation des seringues jetables, ce genre de danger a été éliminé”, affirme le Dr Ahmed, un généraliste du secteur privé. Les tenues jetables sont disponibles sur le marché, mais leur prix demeure relativement cher. Les taxes douanières de 30% auxquelles elles sont soumises les rendent inabordables. Les responsables du premier complexe algérien spécialisé dans la fabrication de la matière première en fibre de cellulose non tissée pour le linge hospitalier à usage unique se disent prêts à satisfaire la demande nationale. Pour l'heure, ils exportent le tissu réalisé en Algérie vers les Etats-Unis d'Amérique, la Chine et d'autres pays d'Asie et d'Europe. “Notre matière première est de très bonne qualité. Pour le moment, seule la phase de stérilisation est sous-traitée en France. La fabrication du tissu et la confection du linge se font en Algérie. Nous comptons monter une unité de stérilisation en Algérie, et nous maîtriserons alors tout le processus de fabrication”, affirme M. Rafik Kabouya, directeur général du groupe Hygimed, spécialisé dans le linge du bloc opératoire à usage unique. Le même interlocuteur espère la diminution de la taxe douanière qui frappe les produits à base de cellulose, alors que les mêmes produits à base de fibre plastique non tissés ne sont assujettis qu'à une taxe de 5%. Si les pouvoirs publics optaient pour le linge d'hôpital à usage unique, les prix connaîtront alors une baisse significative qui sera engendrée par la concurrence. De toutes les manières, le recours au linge à usage unique permettra à coup sûr de diminuer le nombre de malades et de praticiens victimes des maladies nosocomiales. Saïd Ibrahim