Signe d'un mécontentement ? Certes, mais surtout significatif de l'intransigeance de l'Algérie dans les négociations sur les Mig 29, dont les premières livraisons n'ont satisfait ni l'ANP ni le contrat. Le général de corps d'armée Gaïd Salah, chef d'état-major de l'armée, effectue depuis hier une visite en Ukraine à l'invitation du chef d'état-major général et commandant en chef des forces armées ukrainiennes. Une visite qui revêt un caractère important dans la mesure où elle doit être liée au projet de modernisation et de renouvellement des équipements de l'ANP. Dans le communiqué de la défense, il est précisé que cette visite officielle s'inscrit dans le cadre de la poursuite du développement des relations de coopération militaire bilatérales. Toutefois, cette visite peut prêter à débat sinon à polémique tant elle coïncide avec la période où les rapports avec la Russie, le fournisseur traditionnel de l'Armée algérienne, sont des plus distendus. Cela, sachant également que le complexe militaro-industriel de l'Ukraine post-Union soviétique demeure compétitif malgré sa reconversion. Ukrspetsexport et sa filiale Ukroboronservice, organisme d'exportation d'armements, se place comme alternative, notamment en matière d'avions de transport, l'Antonov et ses variantes, les moteurs, les missiles pour équiper les avions russes, Mig et Sukhoï. Ce marché d'avions de transport pourrait atteindre 1,8 milliard de dollars selon les prévisions des experts. Une aubaine pour l'Ukraine, et qui ne manquera pas de faire réagir la Russie qui pourrait déjà enregistrer un recul de 1 milliard de dollars sur ses exportations d'armes. Donc un motif valable d'inquiétude pour la Russie. Cette visite intervient à un moment où l'Algérie a émis des critiques sur le matériel militaire fourni par la Russie et qui n'est pas conforme aux clauses contractuelles, d'où le gel des livraisons hormis le contrat sur les Sukhoï. Et elle intervient à peine quelques semaines, un mois, avant la visite annoncée du président Bouteflika à Moscou. Pour autant, est-ce que le contrat avec la Russie, estimé à 7 milliards de dollars, est tombé à l'eau ? Probablement, et c'est là que se situe la lecture de la visite de Gaïd Salah à Kiev. Elle est plus un message explicite à l'endroit du Kremlin qu'une volonté de changer aussi brusquement de fournisseur en effaçant une longue et historique relation de coopération. Signe d'un mécontentement ? Certes, mais surtout significatif de l'intransigeance de l'Algérie dans les négociations sur les Mig 29 dont les premières livraisons n'ont satisfait ni l'ANP ni le contrat. Cela sans oublier la mésentente entre Sonatrach et Gazprom sur les objectifs du mémorandum qui n'a d'ailleurs pas vu le jour. C'est en ce sens également que le choix du général de corps d'armée Gaïd Salah est en soi un message fort. En effet, le chef d'état-major de l'ANP, un expert en armement russe et russophone de surcroît, n'est pas inconnu des écoles militaires russes. La visite du général en Ukraine, un fournisseur concurrent, ne devrait pas passer inaperçue par les Russes dont l'inquiétude de perdre un de leur gros marché devrait inciter à assouplir leur position, lâcher du lest lors des négociations. Les Russes ayant tout intérêt à entretenir un client historique pourraient néanmoins remettre sur la table l'argument de la dette dont l'effacement a été justement subordonné au contrat militaire. Djilali B.