Suite aux révélations sur l'identité de deux des trois Mauritaniens en fuite au Sénégal, connus pour leurs liens avec un groupe terroriste islamiste affilié au réseau Al-Qaïda, après avoir tué lundi quatre touristes français, ce qui semblait être une affaire de banditisme se révèle en fin de compte un attentat terroriste attribué aux groupes salafistes locaux. La version du crime crapuleux n'est plus retenue par les enquêteurs dans l'affaire de l'assassinat de quatre touristes français à Aleg, à 250 km au sud de la capitale mauritanienne Nouakchott, lundi dernier. L'identification par les autorités locales de deux des trois Mauritaniens en fuite au Sénégal, comme proches d'un groupe terroriste islamiste affilié au réseau Al-Qaïda, change totalement la donne. Ainsi, selon un communiqué rendu public par le parquet général de Nouakchott, deux membres du groupe sont “deux jeunes Mauritaniens qui sont soupçonnés d'appartenance à des groupes extrémistes salafistes”. À en croire la même source, les deux terroristes identifiés avaient été arrêtés en 2006 pour appartenance présumée au Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC) algérien. L'un des deux hommes a été libéré sans inculpation alors que l'autre a été acquitté de l'inculpation d'appartenance à un réseau terroriste. Le parquet a fait appel et l'affaire est toujours en instance devant les tribunaux mauritaniens. Il est précisé que le deuxième homme “avait suivi des entraînements militaires à l'extérieur du pays”. Il s'agirait de Sidi Ould Sidina, Mohamed Ould Chebarnou et Mohamed Ould Sidi, “tous Mauritaniens, tous âgés de moins de 35 ans et animés d'un fanatisme religieux”. Ces affirmations viennent corroborer la version écartant le crime crapuleux, parce que les victimes n'avaient pas été volées, contrairement à ce qui avait d'abord été affirmé. La première version officielle précisait que le groupe de Français avait été suivi par ses meurtriers depuis le moment où il avait changé de l'argent. En effet, les victimes n'ont pas été délestées de leur argent ni de leurs téléphones portables. Un des témoins a affirmé que “leur objectif était de tuer, pas de voler”. François Tollet, l'unique rescapé du massacre, aurait également indiqué à un responsable de l'ambassade que les agresseurs ont d'abord tiré sur leurs victimes avant de leur réclamer de l'argent. Par ailleurs, le fait que l'attaque ait eu lieu dans une région calme et peu touristique, d'où est originaire l'actuel chef de l'Etat, Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi, crédite davantage la thèse de l'attaque terroriste. Il est aussi à relever que survenue à moins de dix jours de l'ouverture du rallye Paris-Dakar, dont neuf étapes doivent se dérouler en territoire mauritanien, cette affaire est interprétée comme un attentat anti-occidental. Cela étant, le tourisme en Mauritanie, secteur en plein essor, génère en moyenne 22 millions d'euros de recettes par an. Néanmoins, ce subit changement de cap dans cette affaire avec la mise à l'index du GSPC, dont un groupe avait attaqué une base militaire dans le nord-est de la Mauritanie, dénote une certaine légèreté dans son traitement. Pour rappel, l'attaque de juin 2005 avait fait 15 morts dans les rangs de l'armée mauritanienne. En septembre 2006, le numéro deux d'Al-Qaïda, Ayman El-Dhawahiri, avait déclaré que le GSPC sera l'arête dans la gorge des Français. Une année auparavant, cette organisation avait qualifié la France “d'ennemi n°1” dans un communiqué diffusé par Internet, dans lequel il était clairement précisé : “La France est notre ennemi numéro un, l'ennemi de notre religion, l'ennemi de notre communauté.” Il n'en demeure pas moins que cette attaque constitue une aubaine pour les Etats-Unis, qui ne rateront pas l'occasion de relancer leur projet de l'Africom en exerçant des pressions sur les pays africains pour y installer leur base. K. ABDELKAMEL