L'agence postale ainsi que la Badr du chef-lieu de la daïra de Tizi Rached, située à 20 kilomètres à l'est de la ville de Tizi Ouzou, ont fait l'objet, samedi dernier vers minuit, d'une attaque terroriste. Le groupe terroriste, composé d'une vingtaine d'éléments, selon les services de sécurité, et de près d'une cinquantaine, selon des témoins oculaires, a, dans un premier temps, assiégé le centre-ville avant d'attaquer les deux édifices publics à coups de bombes et de grenades. Une incursion qui a coûté la vie à un policier qui, d'un sang-froid inégalé, a tenté de faire face tout seul aux sanguinaires du GSPC. Selon les témoignages des habitants de cette paisible localité, il était, à la minute près, 23h40 lorsque tout a commencé. Alors que la ville allait plonger dans son silence habituel, une première déflagration a été entendue. C'était la porte d'entrée de l'agence locale de la Banque de développement rural (Badr) qui vient d'être défoncée à coups de bombe. Une agence bancaire non encore opérationnelle, puisque incendiée durant les évènements de 2001, et donc fermée depuis. Après cette première déflagration, de nombreux riverains, tirés de leur sommeil, ont tenté de franchir le seuil de leurs portes pour comprendre d'où provenait l'explosion, mais à peine descendus dans la rue, ils ont tout compris. Ce n'était pas une explosion de gaz comme tout le monde l'a si bien cru. Des hommes armés dont certains en treillis militaires, d'autres portant des dossards de la police, et d'autres encore en civil, s'étaient déployés dans tout le centre-ville. “Rentre, va-t-en”, pars d'ici !”, disaient ces terroristes, en arabe, pour certains, et en kabyle pour d'autres, à chaque fois que la moindre ombre d'une personne apparut devant une porte d'entrée d'un immeuble, nous a-t-on raconté hier matin à Tizi Rached où tout le monde était visiblement encore sous le choc. À l'arrivée de ces terroristes, à bord de trois véhicules de marques Peugeot 505, Citroën C15, et Renault Express, nous raconte-t-on encore, quelques jeunes, en petits groupes, conversaient comme à leur habitude sur la placette principale, où sont concentrés tous les édifices publics. Aussitôt débarqués, les terroristes ordonneront à ces jeunes de quitter les lieux illico presto. Ce qui fut tout de suite exécuté dans un mouvement de panique sans précédent. Au moment où les habitants de la ville commençaient à réaliser ce qui se passait sous leurs yeux, les terroristes s'apprêtaient déjà à s'attaquer à l'agence postale, située à une cinquantaine de mètres de la Badr, et à moins de dix mètres du siège de la daïra, en plein centre-ville. Une première déflagration, puis une seconde, puis encore deux autres ont été entendues par les habitants de la ville, dont la plupart suivaient du regard chaque mouvement de ces terroristes islamistes à travers les interstices. Au moment de l'attaque de l'agence postale, un policier, habitant l'ancienne brigade de gendarmerie, a tenté de réagir. Selon des témoignages recueillis sur place, le policier âgé d'une quarantaine d'années, et originaire de Bouzeguène, a cru qu'il s'agissait d'une attaque contre le commissariat. Même n'étant plus en fonction, il accourut en direction du commissariat lorsqu'il se retrouva nez à nez avec des éléments armés qui, croyant qu'il s'agissait d'un simple citoyen, le pourchasseront dans un premier temps puis une fois fouillé et son arme découverte, ils tireront sur lui à bout portant et le laisseront mort devant la mosquée de la ville. Cependant, à l'intérieur de la l'agence postale, les terroristes tentaient d'ouvrir les coffres-forts pour s'emparer de l'argent, mais curieusement, les services de sécurité avaient constaté qu'un coffre quasiment vide a été ouvert à l'aide d'une grenade, alors que celui qui contenant une somme d'argent n'a pas été ouvert. Ainsi donc, en ciblant deux institutions financières, les terroristes n'auraient pris aucun butin, du moins significatif. Ce qui a donné lieu à d'autres lectures et conclusions. L'objectif de ce groupe terroriste, a-t-on appris de sources proches de l'enquête, ne serait pas de s'emparer de l'argent des deux agences attaquées, mais plutôt d'attirer les policiers du commissariat vers le centre-ville à l'entrée de laquelle une embuscade aurait été tendue. Une lecture qui s'avère plausible puisque des habitants du village surplombant la ville de Tizi Rached disent avoir vu un des hommes armés placer une arme lourde, de type FMPK, sur la route que devaient emprunter les forces d'intervention. Mais, ayant pressenti le “jeu” des sanguinaires du GSPC, la police a préféré ne pas intervenir. Ce qui a conduit alors les terroristes, après près d'une heure d'attente, à quitter les lieux, certains à bord des véhicules volés à Aït-Oumalou, environ 2 heures avant l'attentat, et d'autres à pied, laissant la population locale sous le choc. Samir LESLOUS