La région la plus riche de Bolivie a lancé, hier, un défi au président Evo Morales en organisant un référendum autonomiste à haut risque, qui place le pays au bord d'une explosion de violence. La province orientale de Santa Cruz revendique le droit de gérer les principaux gisements de gaz du pays et de créer sa propre police. Ce scrutin est jugé illégal par le pouvoir. Il est d'autant plus important que d'autres régions pourraient faire de même. Des milliers de policiers ont été déployés dans la région pour assurer l'ordre et l'armée devait avertir sur les dangers de partition du pays. “Un tel statut qui va entraîner de graves conséquences pour l'unité du pays et il ne peut ni ne doit être appliqué”, a affirmé le représentant des forces armées boliviennes. Le référendum est jugé illégal par le gouvernement de Morales, premier amérindien à devenir président en Bolivie, qui dénonce la volonté séparatiste de la région dominée par l'opposition libérale et dont la population est en majorité blanche ou métissée. Tout en misant sur la conscience de son peuple qui veut “l'unité du pays”, le président bolivien a prévenu qu'il ne reconnaîtrait pas le référendum dont l'issue ne semble faire aucun doute, les sondages accordant plus de 70% de voix en faveur de l'autonomie. Proche ami du président vénézuélien Hugo Chavez, “bête noire” de Washington en Amérique latine, Morales, qui dénonce une conspiration orchestrée par les Etats-Unis pour le renverser, a reçu l'appui de son allié équatorien Rafael Correa et de l'OEA (Organisation des Etats américains) qui a rejeté toute tentative de perturber l'ordre constitutionnel, exprimant sa solidarité avec le peuple de Bolivie après une réunion d'urgence à Washington. Le référendum fait planer un risque de guerre civile sur le pays, où la crise attise la fracture ethnique entre les paysans pauvres des Andes, des Amérindiens fidèles à Morales, et les grands propriétaires agricoles des riches plaines de l'est, des blancs. La région de Santa Cruz, qui se défend de faire sécession, compte 2,5 millions d'habitants, soit le quart de la population bolivienne, et produit le tiers de la richesse nationale. Son gouverneur, Ruben Costas, a mis le feu aux poudres en prédisant la naissance d'une seconde république décentralisée ! L'establishment de la province mène depuis plusieurs mois une fronde contre Morales dont elle rejette le projet de Constitution prévoyant une redistribution de la manne gazière et une réforme agraire pour mettre fin aux latifundia mais aussi la possibilité pour lui de se représenter autant de fois qu'il le souhaite à la magistrature suprême. L'enjeu du vote est d'importance, d'autant que la rébellion fait tâche d'huile dans trois autres régions prospères, qui ont mis sur les rails un référendum similaire en juin. Affaire à suivre. D. B