Contrairement à l'aéroport international d'Alger, qui est une fourmilière, celui d'Oran Es-Sénia reste malgré tout un modeste aéroport de province, marqué par deux pics dans l'année : maoussem hadj et la saison estivale avec le retour des émigrés. Pendant des lustres, visiteurs et voyageurs ont terriblement souffert de l'absence de climatisation. On y grelottait en hiver et on y étouffait en été. Depuis, on a remis les pendules à l'heure. Et, curieusement, tous les écarts verbaux dus en grande partie à la chaleur d'étuve ont disparu. Et même si le thermomètre affichait hier 35 degrés sur le tarmac, il faisait relativement frais à l'intérieur de la structure. Aussi invraisemblable que cela puisse paraître, tous les comptoirs au départ vers l'étranger ou vers l'intérieur du pays étaient vides ou presque vides le jour de notre passage. À peine trois ou quatre passagers s'étiraient sur une petite chaîne devant les guichets d'Air Algérie pour embarquer vers Constantine. C'est vrai qu'à pareille époque, on ne se bouscule pas au portillon pour aller passer ses vacances à Cirta. L'image nous paraissait tellement insolite qu'on avait l'impression qu'il lui manquait quelque chose : les bousculades et les insultes qu'on entend d'ordinaire. Mais pour cela, il faut être plusieurs. L'opération se passait dans un silence… plus que parfait… comme si les employés et les clients s'étaient mis d'accord pour faire le moindre bruit possible. Irréel. C'est à peine si les 26 petits colons de l'Enip (filiale de Sonatrach), qui attendaient précisément ce vol, arrivaient à piailler. À force de tourner en rond, ils ont fini par se confondre en décor. Même image sereine à l'autre extrémité de la salle réservée aux départs vers l'étranger : deux vieux couples apparemment sans illusion rongeaient leurs freins sur place après avoir rempli les formalités d'enregistrement. Le reste des voyageurs, sans doute échaudés par les interminables retards de la compagnie nationale qui sont devenus sa marque de fabrique et son label, ont préféré faire du lèche-vitrine dans les rares boutiques qui n'avaient pas encore été cadenassées, puisque l'unique cafétéria du rez-de-chaussée était fermée pour travaux. Non, le meilleur du spectacle, le clou du spectacle se passait ailleurs au niveau des arrivées internationales. C'est toujours là que se jouent les grandes scènes des retrouvailles. Normal, me faisait remarquer quelqu'un qui ne manquait pas d'humour, “au mois de juillet, on vient à Oran, on ne la quitte pas”. Quelque 300 visiteurs, en plus de leurs accompagnateurs et de leurs marmots contenus derrière des barrières coulissantes, étaient agglutinés pour l'arrivée de deux vols successifs : celui de Marseille et celui de Paris. De trois vols, selon quelques voyageurs qui avaient l'air d'être au parfum. Deux, trois, quatre, peu importe le nombre d'aéronefs qui décollent ou qui atterrissent, puisque personne ne vous donnera la moindre précision, le moindre renseignement. Encore moins le bureau d'information de l'aéroport qui semble le moins informé. Et nous ne parlons pas de la qualité nasillarde de ses prestations qui n'ont pas l'air de préoccuper grand monde. Déprimant. Aucun voyageur à l'évidence n'a jamais compris un traître mot des flashes diffusés toutes les dix minutes. Déprimante aussi l'attitude de la préposée du bureau d'Aigle Azur, dont les nerfs à fleur de peau feraient fuir le client le plus timoré. Dehors, c'est la fournaise. Aucune poche d'ombre. Dans le parc sursaturé, pas une âme qui vive, à l'exception de quelques familles chargées de valises et pressées de quitter coûte que coûte cet enfer. M. MOHAMMEDI