La wilaya de Khenchela est connue essentiellement pour sa station thermale sise à Hammam Salihine construite par la légion romaine où seront taillées dans la roche deux piscines, l'une ronde et l'autre rectangulaire. L'eau chaude, qui avoisine 70 °, provient des entrailles de la terre. Sa teneur en sels minéraux lui confère des propriétés thérapeutiques pour les maladies dermiques, rhumatismales, voire respiratoires. Khenchela est aussi connue pour la bravoure de la reine berbère la Kahina, la résistance de sa population durant la colonisation et surtout par son meilleur ambassadeur à l'époque, son équipe fanion, l'USM Kenchela. C'était la belle époque de Khiari Ali où l'on jouait pour les couleurs. Khenchela est en fait un véritable bijou, sur les plans de la richesse naturelle et du potentiel humain. Explication : avec quatre zones naturelles, la zone montagneuse, la zone de plaines, la zone steppique et la zone saharienne, Khenchela s'étend sur une superficie de 971 km2 avec une population de 413 820 habitants en 2008 où les parcours steppiques occupent 48 % de la superficie agricole totale. Le taux de boisement à 14 % englobe les massifs des Béni Oudjana, Béni M'loul et Ouled Yagoub. La zone saharienne s'étend sur 110 000 hectares dont 70 500 dans la commune de Babar. Une virée à la mi-avril nous apprend que les exploitants ont moissonné presque 10 000 hectares de blé et d'orge. Les moissons continuent çà et là et des centaines de quintaux ont été traités pour obtenir le friq, très rentable, surtout à base de blé, écoulé pour la chorba du ramadhan sacré à raison de 300 DA le kilo. Pour 10 quintaux, c'est déjà le pactole. Quinze périmètres de mise en valeur, les serres soutenues par l'Etat - près de 4,5 millions de centimes par serre géante à concurrence de cinq serres par exploitant -, la mise en place d'un marché de gros à Ogla, à la limite des périmètres proches d'El Oued et de Biskra d'une vingtaine de kilomètres ouvrent des perspectives d'autant plus que le ministère des Travaux publics a lancé une étude pour réaliser une route reliant El Oued passant par là. Les éleveurs de la région commencent par remonter au nord. Fuyant les chaleurs, ils sont venus juste avant le début de la période hivernale, évitant le froid glacial des monts des Aurès. Ils installent dès lors leur cheptel ovin aux alentours des zones d'épandage de crues, c'est-à-dire les n'fidhas irriguées par les crues des oueds. Sociologiquement parlant, les Nemenchas des trois communes Mahmel, Babar et Ouled Rechach exploitent les n'fidhas sur le territoire de la commune de Babar. Chaque arch (tribu) à ses n'fidhas. Il y en a quinze pour 20.000 hectares dont trois importan : les nfidhas de Ouazerne (Mahmel), Tigmit (Babar) et El Meitta (Ouled Rechach). Depuis la nuit des temps, le partage des eaux se fait selon les us et coutumes. L'Etat n'intervient pas globalement à ce niveau-là. Les sages des trois tribus, issus d'un même aïeul dénommé Rechach, se chargent des malentendus et contraintes. Lorsque les cours d'eau changent ou sont changés par une main calculatrice en nocturne, les confits éclatent entre familles vite étendus aux tribus. Babar est aussi synonyme de tapisserie. Qui ne connaît le célèbre tapis de Babar, tissé par de vieilles femmes tatouées pour être plus belles sans autre fard, qui enseignent à des jeunes femmes recrutées par le filet social au niveau d'un atelier communal l'art de confectionner le tapis? Les connaisseurs vous diront que les motifs, les couleurs dominantes (noir, rouge, vert, bleu, orange) sont en fait des histoires qu'on transcrit sur le tapis, une complainte d'amour, une histoire de courageux patriotes durant la colonisation : la vie, le printemps, etc. Babar, c'est aussi son barrage, lieu de villégiature pour les pêcheurs de carpe. Le barrage irrigue près de 700 hectares pour les communes de Kheirane, Tamza et N'sigha. Kheirane, nous dit-on, vient du mot «khir» -- richesses. Les vergers de figuiers, d'oliviers, de grenadiers pullulent. Souvent c'est la femme rurale qui s'occupe des vergers. Ce sont aussi les multiples palmeraies de Kheirane, Hella et Timedkitt, irriguées par Oued El Arab. Ksar Kheirane est un vestige archéologique composé de maisons construites en terre battue qui résistent aux centaines d'années. Chéchar offre le même spectacle avec ses palmeraies de Binet Djebel, de Siar connue pour la qualité de son miel. Les abeilles butinent les nombreux vergers d'abricotiers, de pommiers, ainsi que les oliviers. L'huile d'olive de Chechar est connue, ainsi que ses variétes chemlal, zlitni, souidi lesquelles ne sont pas à forte teneur d'acide. Zaouia est une localité de la commune de Chechar dont les habitants, du moins ceux qui ont choisi de rester, ont la particularité de connaître le Qoran par cœur. On y parle l'arabe de façon parfaite. C'est une région conservatrice par excellence, au même titre que la commune rocailleuse de Djellal, connue pour la bravoure de ses habitants. L'on se souvient encore de la bataille de Tafassour, qui a fait des centaines de chahids. Signe des temps : dans cette région on a été touché l'année dernière d'apprendre que des enfants n'allaient pas à l'école parce que pauvres. Ils chaussaient des bottes en plastique en plein été et vaquaient à dos d'âne pour ramener sur une quinzaine de kilomètres le précieux liquide, l'eau, source de vie, pour boire. Eh oui! Djellal renferme des grottes à ce jour méconnues .Un peu plus au sud, c'est Ouldja, riche par ses palmeraies de Gataa El Oued. Les gens préfèrent s'installer à côté, à Zeribat El Oued ou Zeribat Hamed (Biskra), plus proches et où il y a beaucoup plus de commodités. Le tourisme thermal, archéologique et de montagne ne trouvera pas meilleurs sites que les zones de Khenchela, Ksar La Kahina à Baghai où, à quelques encablures, il y a la station des eaux à vapeur de Hammam K'nif, unique en son genre. La station thermale de Hammam Salihine à El Hamma. Quant à la zone montagneuse, avec le mont de Ras Keltoum, à Chélia, du haut de ses 2 328 m enneigé près de cinq mois par an où la safa Aurès a réaménagé une station pour l'accueil des touristes où le cèdre, l'odeur du pin d'Alep et du chêne vert avec des sources naturelles connues des autochtones et de nos amis forestiers donnent une vision de rêve plus difficile à décrire qu' à vivre. A Yabous c'est le barrage de Taghrist, en cours de réalisation, et le périmètre d'irrigation sur 1 000 hectares par l'Office national de l'irrigation(ONID) qui vont changer radicalement la région. Bouhmama et sa région sont conues pour leurs pommes. La reine des reinettes et la Golden Delicious sont maintenant les ambassadrices de Khenchela. Partout en Europe des concitoyens et amis chercheurs installés en Allemagne nous disent qu'à chaque fois qu'ils rentrent au pays, leurs connaissances leur demandent de ramener la pomme de Bouhmama, qui est bio, belle et a bon goût, celui que la nature lui a donné. L'homme lui-même est forgé à l'image de la nature. Ainsi, chez nous, outre la franchise, les gens sont généreux, bons et fiers. Vertus que l'on retrouve dans les chants des troupes folkloriques de Tamza et Yabous ou les multiples associations dont celles de la culture et l'artisanat. Ce qui nous fait dire que les vraies valeurs du pays se trouvent dans l'Algérie profonde, dans les petites localités rurales où l'amitié, qui se fait de plus en plus rare de nos jours, n'est pas un vain mot, la solidarité agissante non plus. Tous ceux qui sont passés par Khenchela reviendront certainement... Azzedine