L'opportunité de la révision de la Constitution sera-t-elle saisie pour innover et consacrer l'écologie en tant que valeur à travers une phrase significative dans le préambule ou une mention spéciale dans les chapitres sur les droits et les devoirs ? Ce n'est pas l'envie d'être à la mode qui dicterait cette mise à niveau, elle répondrait plutôt à l'exigence sociale de promotion de l'éco-citoyenneté qui émerge malgré le poids écrasant de préoccupations plus urgentes com-me la sécurité face à la délinquance et au banditisme, ou l'emploi et le logement. L'aspiration à un cadre de vie de qualité a gagné sa légitimité aux côtés de ces revendications classiques, de base. On en a la preuve à partir d'indicateurs notés empiriquement, le dernier en date étant la participation appréciable à l'opération de nettoyage des plages par un temps maussade qui n'avait rien d'encourageant. Il y a aussi les initiatives, ici et là, engagées par la population localement, pour rendre plus propre la cité d'habitations, soigner les espaces verts, mieux gérer les déchets ménagers. Il y a, enfin, toutes ces émeutes dont le «panier» de motifs comprend des revendications qui relèvent souvent de considérations écologiques. La saleté, le bruit et la pollution qui dominent particulièrement en milieu urbain rendent plus fort le besoin de traduire la dimension écologique en réalité concrète dans la vie quotidienne. Les pouvoirs publics ont élaboré des politiques appuyées sur un dispositif législatif et réglementaire. Le droit algérien de l'environnement est formé d'un nombre impressionnant de lois qui touchent quasiment tous les domaines mais leur manque d'efficacité est inquiétant. Pourtant, tous les départements ministériels et les institutions concernés ont été sensibilisés à l'idée que l'environnement est un droit de l'homme (santé, qualité de la vie…). Il existe une police de l'environnement et des cellules spécialisées dans la protection de l'environnement au sein de la gendarmerie. Il ne manque apparemment rien pour que les Algériens vivent en bonne harmonie avec le concept de développement durable et adoptent un comportement éco citoyen. Mais, nous en sommes encore très loin. L'explication est sans doute dans les lignes qui suivent. Il y a quelques semaines, le ministre de l'Intérieur avait justifié l'interdiction des mar-ches politiques par l'impéra-tif de préserver la tranquillité des riverains qui habitent dans les lieux que traversent les marcheurs. Les nuisances visées sont liées certainement à l'occupation de la voie publique et au bruit. Mais, bizarrement, cet impératif disparaît quand il s'agit d'activités « culturelles » ou de « loisirs » organisées par les autorités locales (la direction de la jeunesse et des sports de la wilaya ou l'APC par exemple) alors qu'elles produisent les mêmes nuisances que celles évoquées implicitement par le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales (notamment le bruit). C'est comme si l'occupation de la voie publique et la sono mise à fond (dans la journée et jusqu'à une heure tardive de la nuit) n'étaient plus accompagnées de nuisances et ne dérangeaient pas les riverains à partir du seul moment où ces activités « estivales », bru-yantes, au milieu d'habitations, sont autorisées. Pourtant, dans cette situation, il y a violation flagrante de la loi sur l'environnement dans sa disposition relative aux activités bruyantes sur la voie publique qui impose une étude d'impact, préalablement à l'obtention d'une autorisation administrative. L'étude d'impact est d'une rigueur telle que, dans ce cas précis, elle peut être assimilée carrément à l'interdiction de l'activité. Seulement, la loi sur l'environnement n'est pas au-dessus de tous.