La Syrie est dans l'impasse. On ne rétablit pas l'ordre public en s'appuyant sur les moyens de guerre. Quand bien même des puissances dites «amies» regardent plutôt ailleurs, le délai informel que celles-ci ont accordé au régime syrien pour qu'il rétablisse la situation est dépassé. Quels sont les enjeux ? Pour les chiites iraniens, la chute du régime syrien amènera fatalement les sunnites au pouvoir. Le lien entre le Hezbollah libanais et l'Iran ne sera pas continu. La passerelle syrienne se serait effondrée. L'axe Hezbollah-Damas-Téhéran en serait rompu. Il y avait eu d'abord la rupture de l'axe Damas-Baghdad-Téhéran constitué en 1997 en réaction à la constitution l'année précédente de l'axe Tel-Aviv - Ankara - Washington. Faire chuter le régime de Bachar Al-Assad achèvera ce qui en reste. A qui profite le crime ? A Israël d'abord, qui est convaincu que le régime syrien arme le Hezbollah. Aux anti-syriens libanais qui voulaient même impliquer le régime de Damas dans l'assassinat de Rafik Hariri. Pour la Turquie, la crainte réside au niveau des implications du changement du régime sur le devenir «politique» des Kurdes syriens. Pour l'Arabie Saoudite, il ne faudrait pas laisser le hasard désigner les successeurs au pouvoir en Syrie. Il faudrait, d'une part, empêcher les chiites majoritaires au Bahrein de se saisir du pouvoir ; ce qui signifierait la chute du système politique basé sur la monarchie et son probable élargissement aux pays du Golfe, provoquant une chaîne de déstabilisations dans ce qui est pour le moment la plus stable dans la région, à savoir le Golfe arabe. Il faudrait, d'autre part, porter au pouvoir en Syrie les populations sunnites qui sont majoritaires dans le pays. Le caractère minoritaire du régime syrien le condamne fatalement à la chute.