La France a soutenu le Qatar dans son entreprise de déstabilisation du gouvernement syrien. En effet, le Qatar a armé les factions de l'opposition qui ont opté pour une rébellion militarisée et a largement utilisé sa chaîne de télévision satellitaire Al Jazeera pour attaquer le régime baathiste au point d'intoxiquer l'opinion publique internationale en promouvant de fausses informations, tandis que des unités de l'armée française entraînent l'Armée syrienne libre (ASL) à la guérilla urbaine dans les camps de réfugiés qui lui servent de bases arrière en Turquie et au Liban. Contrairement à la vision développée par les analystes des écoles marxisantes, qui fondent de manière systématique leur approche des événements du Moyen-Orient sur le postulat selon lequel «l'empire américain» et ses «vassaux européens», liés à «l'entité sioniste», tirent les ficelles de tous les dérèglements qui y surviennent, il apparaît de manière assez évidente que ni les Etats-Unis, ni l'Union européenne, ni non plus Israël n'ont souhaité le renversement du président Bashar al-Assad. Les événements en Syrie ont mis en péril toute une politique de réalignement forcé du pays menée par les Etats-Unis depuis 2005 : peu après l'assassinat de Rafiq Hariri, le Premier ministre libanais, Washington a utilisé le Tribunal spécial pour le Liban avec la complicité de leur nouvel allié, la France sarkozienne, pour accuser et mettre la pression sur la Syrie. Parallèlement, à travers l'Arabie saoudite, son grand allié dans la région, Washington a offert à Damas des opportunités d'accords économiques et diplomatiques. Bashar al-Assad avait bien compris cette politique de la carotte et du bâton et a saisi la main tendue ; l'enquête du Tribunal spécial fut alors réorientée vers le Hezbollah… Mais les relations entre la Syrie et les Etats-Unis s'étaient déjà améliorées dès après les attentats du 11 septembre 2001 : Damas et Washington s'étaient trouvé un point commun, la lutte contre le terrorisme islamiste. Et des prisonniers furent transférés de Guantanamo en Syrie, pour y être «interrogés» ; une collaboration très étroite s'est développée entre les services secrets états-uniens et syriens. Quelles mesures concrètes ont-elles été prises contre Damas ? Principalement, les Etats-Unis et l'Europe ont déclaré qu'ils n'achèteraient plus de pétrole à la Syrie. D'une part, les Etats-Unis n'ont jamais acheté de pétrole à la Syrie… D'autre part, le pétrole syrien continuera de se vendre sur les marchés, ailleurs, à travers l'Irak notamment, et l'Europe s'approvisionnera ailleurs également. Il s'agit donc d'un hypocrite petit jeu de chaises musicales qui n'aura aucune conséquence pour le régime baathiste. Quant à Israël, il s'inquiète de la déstabilisation de la Syrie : le régime baathiste ne reconnaît pas l'Etat d'Israël, appelé «la Palestine occupée», mais ne mène aucune action hostile à Tel Aviv. En dépit des 500.000 réfugiés palestiniens qu'abrite la Syrie, aucune attaque n'a lieu contre Israël depuis les frontières syriennes, tant la région du Golan est parfaitement sécurisée par Damas. De même, si la Syrie finance le Hezbollah et le Hamas, c'est dans le but de rester un acteur régional incontournable, nullement de détruire Israël.