Après une longue hésitation et quelques jours de retard, une affiche qui sort de l'ordinaire vient ajouter un parfum de printemps au visage de la campagne à Bordj Bou-Arréridj. La photo d'une candidate. De nombreuses Bordjiennes, écrasées par une société dominée par les hommes, se reconnaissent dans cette femme qui investit le cercle des machos. Cette femme à la tête de la liste FNIC avait un peu peur, car elle n'a rien d'une célébrité. Bien qu'elle affirme avoir eu le trac, elle a été à la hauteur lors des premières rencontres avec le public. La seule chose qui la gênait, c'était de n'avoir pas osé avant cette date. Les femmes bordjiennes partageant probablement les mêmes souvenirs de jeunesse et les mêmes ambitions qu'elle. Elles disent être attirées par l'authenticité de cette femme, car elle ne tourne pas autour du pot, n'embellit rien de ce qu'elle dit, sa foi n'est pas fanatique et il lui arrive même de critiquer sa conduite. «Elle a ouvert la voie», dit Hakima. «Une femme simple qui a vécu tant de choses et qui a toujours su bien se comporter. Elle connaît sa place de femme.» Elle reçoit aussi des encouragements, les femmes sont nombreuses à s'identifier à elle. «Visiblement, elles ont entendu quelqu'un qui parlait leur langage», explique un candidat. «Nous les aimions, certes, sans pour autant les respecter et reconnaître leur valeur. Elles sont absentes de notre espace public. Pour ces femmes, cette candidate présente un caractère compensatoire.» Elles-mêmes se décrivent comme des «femmes ordinaires», des «femmes au foyer», des «femmes quelconques». Des «femmes endormies», comme les appellent les féministes. Ce qui ne veut pas dire des femmes qui ne travaillent pas, non, mais pour qui la famille passe avant tout. L'identification de ces femmes à elle résulte d'un vécu commun, d'un manque de reconnaissance de leur rôle social. Mais aussi d'une désillusion causée par le modèle patriarcal de la famille, qui génère la domination masculine.