Présentant son dernier ouvrage Une Femme en colère, Wassyla Tamzali s'est exprimée de manière libre et tranchante sur la question relative à la femme, dans un débat riche et fructueux. «Il n'y a pas de civilisation sans mixité, condition sine qua non, désormais, pour en acquérir une civilité», a déclaré d'emblée, Wassyla Tamzali pour donner le ton et orienter les débats, lors du Café littéraire qu'elle a animé vendredi dernier à la Maison de la culture Taous-Amrouche de Béjaïa devant une assistance mixte et nombreuse, qui s'est laissée volontairement emporter et impressionner par les idées et les qualités morales et intellectuelles de l'oratrice féministe qui s'est exprimée avec un engagement inégalable dans sa ville natale. «Si vous voulez faire passer une idée difficile, il faut provoquer», a ajouté l'animatrice du Café littéraire en s'appuyant sur l'expression du grand philosophe, Socrate, pour rentrer dans le vif du sujet relatif à la naissance et l'identité féministe: «Le féminisme est venu remettre en cause la domination de la société par les hommes», a-t-elle déclaré pour exprimer l'urgente nécessité pour la femme algérienne de conquérir sa liberté et sa dignité bafouées par l'entêté système patriarcal, caractérisant médiocrement notre société. Selon la juriste de formation et ex-directrice du programme de l'Unesco pour la promotion de la condition des femmes en Méditerranée, partout les femmes sont en danger. «Le harcèlement sexuel est devenu la règle dans les entreprises», dit-elle, avant d'ajouter que ce n'est nullement le voile qu'elles portent qui leur épargnera cette saleté. «Plus il y a de femmes voilées, plus il y a de violence à leur égard», nous surprend-elle pour enfin expliquer: «Si auparavant on a donné les femmes au FIS (ex-Front islamique du salut), maintenant, on les a données en pâture à toute la société. Ce qui provoquera comme conséquence toute la violence barbare qu'ont subie les femmes travailleuses de Hassi Messaoud en 2001 et tout récemment encore, en avril 2010. Voilà comment on a laissé s'exercer la haine des hommes sur les femmes», se révolte-t-elle. En raison de la gravité de la situation de la femme algérienne et de l'état d'asservissement dans lequel la tient férocement le Code de la famille, Wassyla est allée jusqu'à affirmer qu'il est plus facile de se libérer du joug de la colonisation française que de conquérir la liberté de la femme. «Sommes-nous libres du colonialisme pour retrouver les vieilles obédiences féodale, tribale, maraboutique et autres confréries religieuses? Au-delà des cultures, des origines, chaque être humain n'a-t-il pas le droit au même ciel étoilé», avait-elle expliqué et repris ce passage de son bouquin, avant de conclure dans le même sens avec beaucoup d'espoir et d'optimisme: «Il nous reste encore à conquérir toutes nos libertés malgré l'aggravation et la complication de la situation des femmes, en raison de l'islamisation des moeurs, le développement de la polygamie (0,1% en 1962 et 5,7 en en 2010) et toutes formes de violences qu'elles subissent de plus en plus.» L'oratrice du Café littéraire n'a pas été tendre avec l'Occident qui veut renfermer la femme algérienne dans un moule traditionaliste discriminatoire à l'égard des femmes. «Il faut que vous respectiez vos traditions, n'arrêtent pas de nous dire les Occidentaux, ce qui veut dire, pas de modernité et de progrès pour les femmes musulmanes.» Par ailleurs, son livre, Une Femme en colère, qu'elle a dédicacé à la fin de la rencontre, a trouvé un écho favorable chez un grand nombre de lecteurs qui se sont empressés de l'acquérir avec plaisir. Son livre met la lumière sur le renoncement de la pensée européenne devant la montée en puissance des groupes communautaires. En prenant pour indices la condition des femmes, la liberté de conscience ou la diversité culturelle, l'auteur passe au crible les idées de tolérance, de laïcité ouverte, d'Islam modéré, de droit à la culture et leurs conséquences politiques dans les pays arabes et musulmans.