Il a fallu attendre des millénaires pour que soit mis au point un code avec ses signes particuliers qui permette à tous les non-voyants du monde de devenir des participants actifs dans tous les secteurs de production. Ne vous a-t-on jamais dit que les yeux sont des organes précieux sans lesquels il n'y a point de vie normale? Et la solidarité de tous vis-à-vis des aveugles n'a jamais suffi pour que le handicap de devienne moins pénible. L'aide est telle que nous avons vu des aveugles faire des études, occuper une fonction conformément à leur rêve légitime qui est de participer activement à la vie dans tous ses états. Le braille, une délivrance et un système international Que de souffrances ont dû endurer les aveugles de par leur diminution physique. Et chose extravagante, la délivrance est venue d'un aveugle ayant perdu la vue de manière accidentelle. L'inventeur de cet alphabet magique est Louis Braille (1809-1852). Né dans un village des environs de Marne La Vallée, il est devenu aveugle en manipulant maladroitement un outil tranchant de l'atelier d'artisan familial. Il se fit crever un œil puis c'est l'autre qui fut atteint d'infection. Ainsi, voilà comment il perdit les deux yeux. Si Braille avait perdu la vue par sa faute et celle des siens, il avait cependant un esprit inventif et de grandes capacités de créativité qui l'ont conduit, après bien des tâtonnements, à l'invention d'un système de lecture et d'écriture pour aveugles, moyennant 63 lettres saillantes qui permettent aux doigts de déchiffrer, décrypter des messages et en composer dans le cadre d'une communication. Grâce à un des leurs, les aveugles connaissent une seconde naissance. Et depuis cette expansion à l'échelle internationale de cette écriture, le monde des aveugles a évolué. Le cas de Braille nous rappelle celui de Taha Hussein devenu aveugle à trois ans, à cause d'une ophtalmie mal soignée. L'auteur égyptien est arrivé au stade des grandes célébrités par ses œuvres traduites dans les langues les plus répandues au monde. Comme cet aveugle a-t-il pu apprendre la langue de l'écriture au point d'en devenir le maître dans tous les sens du terme? Toutes ses œuvres sont reconnues comme étant les meilleures, compte tenu du f ait que l'auteur non voyant s'est toujours référé à la littérature populaire. Le contenu de ses livres est pétri d'oralité, une école où chacun peut retrouver ses racines. Que d'écrivains algériens ou d'ailleurs ont donné la preuve de leurs talents de peintres merveilleux. Quel travail de producteurs d'œuvres littéraires et quel itinéraire digne d'admiration ! Les aveugles, depuis les origines Avant l'invention du braille, beaucoup d'aveugles ont joué des rôles essentiels au sein de leur société. Quelques-uns se sont fait devins ou guérisseurs, Dieu leur a donné ces capacités de prédire l'avenir et de prescrire des traitements efficaces alors que la médecine moderne n'existait pas. D'autres ont joué de la flûte pour divertir ou ont transmis tout le patrimoine oral en qualité d'aède. L'histoire nous a rapporté aussi des ca s d'aveugles associés à des hommes ou femmes normaux pour surmonter les difficultés de la vie, survivre par quelques gains au quotidien, solliciter, pour ne pas dire tendre la main à des familles nanties pour obtenir de quoi se vêtir, se maintenir en vie, obtenir quelque supplément de nourriture qui assure la subsistance pour un temps. Il y a des situations fantastiques, comme celle de cette aveugle vivant de mendicité avec une compagne d'une autre région ; celle-ci s'accroche à l'arrière de sa robe pour faire ensemble du porte-à-porte. Celle qui voit consacre une partie de son temps à l'exercice du métier de voyante. Donc, c'est une voyante qui prédit l'avenir à tous ceux et celles qui viennent en consultation chez elle. Un fabuliste des temps anciens rapporte l'histoire d'un aveugle marchant à tâtons qui rencontre au détour d'une rue un paralytique. Il lui propose un marché : mendier. J'ai mes maux, lui dit-il, et vous avez les vôtres. Unissons- les, mon frère, ils seront m oins affreux. Hélas ! dit le perclus, vous ignorez, mon frère. Que je ne puis faire un seul pas. Vous-même vous n'y voyez pas. A quoi nous servirait d'unir notre misère ? A quoi? répond l'aveugle; écoutez, à nous deux nous possédons le bien à chacun nécessaire. J'ai des jambes et vous des yeux. Moi, je vais vous porter, vous, vous serez mon guide. Vos yeux dirigeront mes pas mal assurés. Mes jambes, à leur tour, iront où vous voudrez. Ainsi, sans que jamais votre amitié décide, je marcherai pour vous, vous y verrez pour moi».