Je cite le PDG de Sonatrach : «le contrat du premier forage offshore a été attribué au groupe français CGC Veritas.» Quelques heures plus tard, le 25 décembre 2012, le ministre de l'Energie algérien contredit cette information. Je cite le ministre : «aucune exploration offshore n'est encore attribuée.» Selon nos informations, cette polémique en ce mois de décembre 2012, en plus des scandales financiers, a eu des effets dévastateurs au niveau international sur l'image du pays. Je connais bien les principes régissant ce secteur puisque ayant eu à travailler pendant plus de 25 années depuis 1974 et dont j'ai eu l'honneur de participer à l'élaboration de différentes lois régissant ce secteur. Je ne rentrerai pas dans les polémiques stériles mais l'objet de cette présente contribution est d'analyser la loi n°05-07 du 28 avril 2005, relative aux Hydrocarbures modifiée par l'Ordonnance n°06-10 du 29 juillet 2006 toujours en vigueur. La nouvelle monture en discussion actuellement à l'APN adopté le 27 septembre 2012 en Conseil des ministres ne change pas le fonctionnement et les prérogatives mais s'appesantit surtout sur la fiscalité. La polémique entre le PDG de Sonatrach et le ministre de l'Energie ne touche pas n'importe quelle société : c'est Sonatrach, la mamelle de l'Algérie et engage la sécurité nationale. Car force est de constater que depuis l'indépendance politique à ce jour en décembre 2012, l'économie algérienne est dépendante de la rente des hydrocarbures pour plus de 98% de ses recettes en devises et importe 70/75% de ses besoins, ménages et entreprises. L'organisation actuelle de Sonatrach Créée le 31 décembre 1963, la Sonatrach a vu ses statuts modifiés à trois reprises par décrets présidentiel, dont le dernier été pris le 11 février 1998 avec pour souci de mettre en adéquation les statuts de la Sonatrach (sociétés par actions) suite à la création, en avril 1995, du Conseil national de l'énergie. Le chapitre III du décret du 11 février 1998 consacré à «l'organisation et au fonctionnement des organes», la dote de trois organes : l'assemblée générale, le conseil d'administration et l'exécutif. Par ailleurs, un décret présidentiel en date du 13 septembre 2000, apporte une légère modification au décret portant statuts de la Sonatrach, concernant exclusivement les aliénas 2 et 5 de l'article 11, qui stipule que «les vice-présidents et les directeurs généraux adjoints sont nommés par décret présidentiel», au même titre que le président-directeur général de la compagnie. Aussi, en nous tenant à l'organisation actuelle de Sonatrach, c'est une organisation qui combine à la fois l'organisation hiérarchique et l'organisation divisionnelle, ce qui ne lui acquiert pas la souplesse de ses concurrents au niveau international. Sans compter la rigidité du système bancaire et surtout les interférences politiques, ce qui est propre à toute entreprise publique même dans les pays développés où comme en France, les PDG des grandes compagnies publiques sont nommés par le président de la république en conseil des ministres mais à la différence notable qu'il est lié à un contrat de performance avec l'Etat actionnaire. Ce qui n'est pas le cas, souvent, pour notre pays, la loi sur l'autonomie des entreprises publiques en 1990 ayant peu d'application. Cela est d'autant plus vrai pour l'Algérie avec le retour depuis la loi de finances complémentaire 2009 à une économie administrée qui touche toutes les entreprises confondant Etat régulateur en économie de marché pouvant détenir des minorités de blocage pour certains segments jugés stratégiques, cette notion étant historiquement datée, avec le Tout Etat (Etat gestionnaire). Il y a lieu de distinguer plusieurs structures opérationnelles : a.- Le Conseil d'administration Il est composé du président-directeur général de Sonatrach, du président-directeur général de Sonelgaz, du vice-président Amont, du vice-président Aval, du vice-président transport par canalisation, du vice-président de la commercialisation, du directeur général des hydrocarbures, du ministère, un autre représentant du ministère, de deux représentants du syndicat de Sonatrach b.- Le comité exécutif Il est composé qui est la véritable cheville ouvrière de Sonatrach, du président-directeur général de Sonatrach, du secrétaire général de Sonatrach, des vices-présidents amont, aval, canalisation et commercialisation, du directeur exécutif des finances, du directeur exécutif des ressources humaines, du directeur exécutif des activités centrales ( DAG), du directeur stratégie, planification, économie, du directeur exécutif santé, sécurité, environnement c- Les Holdings Ils sont annexés au vice-présidents dont pour l'amont, il lui est rattaché le holding services pétroliers et parapétroliers, pour l'aval, le holding raffinage, chimie hydrocarbures (exemple Naftec), pour le transport il lui est rattaché canalisation le holding et participation et enfin pour la commercialisation le holding Sonatrach, il lui est rattaché le holding Sonatrach/valorisation des hydrocarbures (exemple Naftal). Au niveau international, le Groupe Sonatrach a mis en place un système de réorganisation de ses activités par le regroupement des compagnies filiales à l'étranger autour d'un Holding international (SIHC) créé en juillet 1999 qui opère actuellement dans différents pays tels que : le Yémen, Pérou, Venezuela et Espagne, Sipex une filiale de Sonatrach présente dans plusieurs pays d'Afrique notamment au Mali, en Mauritanie, en Egypte en Libye et au Niger. La décision d'attribuer les périmètres de prospection n'appartient pas à Sonatrach Il existe d'autres organes de décisions stratégiques notamment : a.- Le Conseil national de l'Energie organe suprême Il a été créé par décret présidentiel le 19 avril 1995, qui dans son article 6, stipule que «le Conseil se réunit périodiquement sur convocation de son président», le président de la République dont le secrétariat (article 5) est assuré par le ministre de l'Energie et composé des ministres dits de souveraineté (Défense nationale, Affaires étrangères, Energie et Finances), du gouverneur de la Banque d'Algérie et du délégué à la planification. L'article 6, stipule que «le Conseil national de l'énergie est chargé d'assurer le suivi et l'évaluation de la politique énergétique nationale à long terme, notamment de la mise en œuvre d'un plan à long terme destiné à garantir l'avenir énergétique du pays ; d'un modèle de consommation énergétique en fonction des ressources énergétiques nationales, des engagements extérieurs et des objectifs stratégiques à long terme du pays ; de la préservation des réserves stratégiques du pays en matière d'énergie ; des stratégies à long terme de renouvellement et de développement des réserves nationales en hydrocarbures et leur valorisation ; de l'introduction et du développement des énergies renouvelables ; des schémas d'alliances stratégiques avec les partenaires étrangers intervenants dans le secteur de l'énergie et des engagements commerciaux à long terme». b.- L'Assemblée générale Elle est composée du ministre de l'Energie et des Mines, du ministre des Finances, du gouverneur de la Banque d'Algérie, du délégué à la Planification, d'un représentant de la présidence de la république. L'article 9.3 précise que l'assemblée générale est tenue de se réunir «au moins deux fois par an en session ordinaire» et en «session extraordinaire à l'initiative de son président ou à la demande d'au moins trois de ses membres, du ou des commissaires aux comptes ou du président directeur général de la Sonatrach». Au terme de chaque session, l'assemblée générale est tenue d'adresser son rapport au président du Conseil national de l'énergie qui est le président de la République. A u niveau des prérogatives, ce n'est plus à Sonatrach d'octroyer les périmètres d'exploitation selon la nouvelle loi sur les hydrocarbures du 28 avril 2005 amendée par l'ordonnance du 29 juillet 2006 mais à une agence dépendante du ministère de l'Energie, l'Agence nationale pour la valorisation des ressources en hydrocarbures – Alnaft – entretenant donc des relations fonctionnelles avec cette structure autant qu'avec une autre agence, l'autorité de régulation chargée de suivre les mécanismes des prix. Aussi après consultation et décision des structures analysées précédemment c'est à l'Alnaft d'engager les procédures d'avis d'appel d'offre et d'octroyer les permis (les articles 20 à 24 de la loi sont précis sur ce sujet). La nouvelle loi a fixé à au moins 51% la part de Sonatrach sur les périmètres octroyés par Alnaft et moins de 49% aux compagnies pétrolières étrangères. La Sonatrach est chargée de la gestion pouvant tisser des partenariats pour l'extension des unités existantes et se porter obligatoirement actionnaire lors des avis d'appel d'offre diligentée par l'Alnaft pour les nouveaux gisements. En résumé, dans un Etat de droit, il faut que tout pouvoir respecte d'abord ses propres lois existant malheureusement en Algérie les meilleures lois du monde que contredisent souvent les pratiques expliquant d'ailleurs le divorce entre l'Etat et les citoyens. Evitons donc cette cacophonie préjudiciable au pays.