Le franchissement des caps temporels est à chaque fois, pour les individus comme pour les nations, une étape symbolique et l'occasion de prises de résolutions, dont la vocation est de rendre les hommes meilleurs. Les bilans auxquels se livre l'humanité à la veille de chaque révolution du temps révèlent à chaque fois une prise de conscience ostentatoire des violences inouïes qui agitent la planète, de la famine dont pâtissent des centaines de millions d'individus, des injustices qui affligent des peuples et tant d'autres ignominies qui révèlent l'homme civilisé dans sa nature paradoxalement la plus barbare et la plus égoïste. Mais cet homme qui est un loup pour l'homme éprouve une fascination pour sa nature dichotomique et se plaît à redevenir, plus humain, moins loup pour l'homme, le temps d'un réveillon, le temps d'une révolution temporelle. Avec une année en plus sur le compteur de notre histoire, sommes-nous brusquement devenus plus civilisés et moins enclins à la barbarie ? Jamais autant qu'aujourd'hui le monde n'a douté de la pérennité de l'histoire de l'humanité. Si les hommes ont prêté foi au discours mythique sur la fin du monde, c'est que dans leurs subconscients ils ont intériorisé, en la détournant, l'angoisse profonde que leur inspirent les véritables raisons qui font craindre pour notre monde : guerres, crises financières majeures, famines, chocs de religions, réchauffement climatique... Pour notre jeune nation, hors les implications inévitables du monde sur notre devenir, l'espoir, tout l'espoir, a partie liée avec notre capacité à nous émanciper de ce qui fait de nous des rentiers. Cinquante ans de construction politique et sociale, c'est largement suffisant pour prendre le cap de la véritable modernité et de commencer, enfin, à créer le monde et à le vivre. Il est temps que commence à advenir le rêve algérien.