Le chef de sûreté de la wilaya de Bordj Bou-Arréridj, le commissaire divisionnaire M'hamed Bouralia, et tous ses éléments rêvent d'une wilaya avec zéro accidents de la circulation. Pour y parvenir, ils font des mains et des pieds pour mener une lutte drastique contre les mauvais conducteurs en usant de tous les moyens (prévention, sensibilisation, présence sur le terrain et répression), non sans omettre le fait qu'il reste encore du chemin à faire. Nous avons rencontré le chef de sûreté en marge de la journée de clôture de la semaine de prévention routière organisée du 10 au 14 novembre dernier au complexe Aïcha-Haddad de Bordj Bou-Arréridj à qui nous avons demandé des explications sur le phénomène des accidents urbains dans la wilaya de Bordj Bou-Arréridj qui est classée 3e à l'échelle nationale après Sétif et Alger et les solutions préconisées. La Nouvelle République : Avec 567 accidents en 9 mois, la wilaya de Bordj Bou Arréridj est troisième à l'échelle nationale. A quoi est due cette situation ? M'hamed Bouralia : Tout le monde s'accorde à dire qu'il y a trop d'accidents de la circulation avec des morts et des blessés graves dans la wilaya de Bordj Bou Arréridj. Cette volonté de collaboration constructive était aussi palpable durant cette semaine de prévention. La part grandissante d'accidents graves n'est pas un phénomène purement bordjien. Cette problématique préoccupe tout le pays. Nous disposons maintenant d'une analyse scientifique qui décrit les facteurs de risque et montre, en s'appuyant sur des mesures concrètes, comment la sécurité des personnes dans la circulation routière pourrait être augmentée.Pas moins de 99,47% des accidents sont causés par l'homme, 0,36% c'est le véhicule et 0,17% l'état de la route et l'environnement. Sur les 567 accidents durant les 9 premiers mois de l'année en cours, 564 sont causés par l'homme. Le non-respect du code de la route, la vitesse inadaptée ou excessive, la conduite en état d'ivresse la drogue, le téléphone au volant, présence d'un obstacles fixes (arbre, véhicule stationné, glissières, mur, poteau, panneau de signalisation, bordure de trottoir, fossé etc.) sont les principales causes des accidents. On a remarqué que malgré la multiplication des radars sur les routes, campagnes d'information sur la sécurité routière dans les médias, tolérance de plus en plus proche de zéro pour l'alcool, la drogue ou le téléphone au volant... le nombre d'accidents sur les routes reste effrayant. Pour diminuer substantiellement le nombre des accidents, il ne suffit donc pas de s'adresser aux seuls conducteurs mais à toute la société. C'est une affaire de tout le monde. Pour prévenir les accidents de la circulation, la première règle d'or est de sensibiliser les citoyens. Bien sûr, on peut accrocher des affiches sur la sécurité routière ou tenir un discours de conduite responsable auprès des citoyens, mais cela n'est pas suffisant. Il faut aller vers lui, occuper le terrain, là où il peut commettre des infractions (points noirs) et appliquer la loi. Mettre en place un programme de formation Face à des défauts de conduite ou à un nombre d'accidents anormalement élevé, des mesures de correction s'imposent. La formation peut être la solution. Depuis quelques années, les loueurs d'automobile longue durée proposent à leurs clients des formations de conduite. Mais il faut rester circonspect face ces stages. Apprendre à conduire, c'est bien, mais c'est loin d'être la principale cause d'accident. En revanche, il est peut-être plus utile de suivre des formations dites de «conduite défensive», qui visent à éviter ou à tout le moins à réduire au minimum le risque d'accident. Il s'agit d'apprendre à deviner le comportement des autres conducteurs, à se garer de façon à ne pas gêner un autre véhicule même si ce dernier est très mal garé, à stationner sa voiture sans toucher les pare-chocs des véhicules avant et arrière. Voilà de quoi éviter nombre de «petits» accidents du quotidien. Mais vous pouvez aller plus loin encore pour inciter les citoyens à être prudents sur les routes en prenant des mesures coercitives. La peur du policier fait reculer l'insécurité routière, mais les résultats sont malgré tout insuffisants et elle ne dispense de persévérer dans la voie de la pédagogie. Comment faire ? Il faut rejeter toute idée de fatalité. Mais le vrai défi consiste plutôt à faire appliquer la loi telle qu'elle existe aujourd'hui. D'où la multiplication de contrôles de police ciblés. Et les campagnes de prudence se multiplient, car c'est bien la sensibilisation des jeunes aux dangers qui doit progresser. La collectivité gagnerait plus à renforcer la sensibilisation des jeunes en milieu scolaire, jusque dans les programmes. En étudiant les messages en fonction de l'âge pour développer une culture de la sécurité routière. S'agissant de sécurité, cette sensibilisation trouverait sa place dans le cadre de l'instruction civique, ce qui supposerait que celle-ci soit également réhabilitée. A Bordj Bou Arréridj, nous avons d'ores et déjà apporté des solutions à certaines problématiques de circulation et de sécurité. Je pense notamment à la mise en place d'un plan de circulation qu'on a remis aux autorités de wilaya. Nous avons également décidé de garder le circuit routier, qui a vu la visite de plus de 3 000 enfants durant cette semaine de sensibilisation pour toute l'année. Il va recevoir des écoliers en longueur d'année pour un apprentissage pratique du code de la route et des réflexes de survie. Bien sûr, la prévention routière développe déjà des actions tant auprès des enfants que des enseignants. Mais elles sont ponctuelles et insuffisantes. Car rien ne pourra remplacer, dans la lutte contre l'insécurité routière, le changement des comportements. Ceux qui se forgent dès l'enfance et l'adolescence. Certaines zones sont effectivement sujettes à risques et nous comptons les repenser dans les mois à venir. C'est d'ailleurs dans cette même logique que nous avons développé les points écoles et renforcé la présence des policiers aux entrées et sorties des établissements. Dans les tout prochains mois, le renforcement des équipes de police permettra d'améliorer leur présence sur le terrain. Outre leur devoir de sanction, les agents de la police sont également là pour assurer un rôle de prévention. Que rapporte ce genre de journée ? Ce type d'animation vous a sans doute permis d'ouvrir les yeux sur votre connaissance de la route. Car il faut savoir se remettre en cause et, surtout, ne pas croire que le permis de conduire est un passeport ultime. C'est toute la vie qu'on s'éduque aux dangers de la route.C'est, d'ailleurs, dans cette optique que nous avons cette semaine installé des messages de prévention dans différents points stratégiques de la ville. L'intérêt n'était pas de sanctionner les automobilistes mais bien de leur faire prendre conscience de leur vitesse et de leurs habitudes de conduite sur des trajets quotidiens. On le sait bien, le risque routier est plus fort sur des trajets que l'on effectue régulièrement. Dans la continuité de cette semaine de la sécurité routière, nous sensibilisons toute l'année les citoyens. Cela passe notamment par la diffusion d'informations pratiques et utiles dans toute la presse. C'est pourquoi nous nous devons de promouvoir une culture forte et durable de la sécurité routière. Il est indispensable que les comportements deviennent des réflexes, que le respect des règles de sécurité routière soit instinctif. Un dernier mot... Je suis sûr qu'en agissant sur la formation et l'information, nous saurons faire émerger une culture forte et durable de la sécurité routière. Car n'oublions pas que «si chacun fait un peu, c'est la vie qui gagne» !