Le secrétaire d'Etat américain John Kerry a estimé mardi qu'une frappe militaire des Etats-Unis contre la Syrie, telle qu'elle était prévue à l'été 2013, n'aurait pas modifié le cours de la guerre. Le chef de la diplomatie américaine a passé une partie de la journée devant la commission des Affaires étrangères du Sénat à défendre la politique étrangère du président Barack Obama, vivement critiquée par les sénateurs, tant sur le processus de paix israélo-palestinien, que sur les négociations avec l'Iran, la crise ukrainienne ou le conflit syrien. Sur la Syrie, le président Obama avait renoncé à la dernière minute à la fin de l'été dernier à frapper militairement le régime du président Bachar al-Assad, et les Etats-Unis avaient finalement trouvé un accord avec la Russie -- soutien de Damas -- pour démanteler l'arsenal chimique syrien. A l'époque, M. Kerry avait plaidé avec passion pour une action militaire «ciblée» et limitée dans le temps contre la Syrie. Devant le Sénat mardi, M. Kerry a assuré que cette éventuelle frappe «aurait eu un effet, mais pas l'impact dévastateur grâce auquel (le président Assad) aurait dû changer le calcul» de sa stratégie sur le terrain. «Il a fallu 30.000 sorties et 30 jours en Bosnie pour avoir un impact. Là, on allait avoir un ou deux jours pour réduire (les capacités militaires du régime syrien) et envoyer un message», a défendu le secrétaire d'Etat. Il s'est au contraire félicité que, grâce à l'accord international sur le démantèlement de l'arsenal chimique syrien, «54% (des armes) aient été retirées» de Syrie. Le président Obama avait défendu il y a dix jours sur CBS sa décision de ne pas frapper Damas, estimant que cela n'aurait pas «empêché» la poursuite de la guerre et soulignant que les Etats-Unis avaient leurs «limites» après une décennie de conflits en Irak et en Afghanistan. «Le président avait dit que cela n'aurait pas d'effet sur le calcul (de Assad) ou sur le cours de la guerre», a encore justifié John Kerry. «Cela aurait eu précisément l'effet recherché : envoyer un message à Assad sur le recours aux armes chimiques», a conclu le secrétaire d'Etat. John Kerry accuse Israël d'avoir entravé le processus de paix Le secrétaire d'Etat américain John Kerry a accusé mardi Israël d'avoir entravé le processus de paix avec les Palestiniens, un dialogue sous médiation américaine qui se poursuit toutefois cahin-caha entre les deux camps. Même s'il n'a pas épargné les Palestiniens, M. Kerry s'en est exceptionnellement pris à l'allié israélien, jugeant que l'annonce la semaine dernière de plus de 700 nouveaux logements à Jérusalem-Est et le refus de libérer des prisonniers palestiniens avaient précipité le processus de paix dans une impasse. «Malheureusement, les prisonniers (palestiniens) n'ont pas été libérés le samedi (29 mars) où ils devaient l'être», a déploré le chef de la diplomatie américaine devant la commission des Affaires étrangères du Sénat. «Puis, un jour, deux jours, trois jours sont passés et dans l'après-midi, quand ils (les Israéliens) pouvaient peut-être le faire, 700 logements de colonisation étaient annoncés à Jérusalem et pouf, voilà où nous en sommes», a-t-il regretté. Le gouvernement israélien avait refusé de libérer le 29 mars comme prévu un quatrième et dernier contingent de prisonniers palestiniens, réclamant désormais une prolongation des négociations censées s'achever fin avril. Le président palestinien Mahmoud Abbas avait réagi en signant le 1er avril les demandes d'adhésion de la Palestine à 15 conventions et traités internationaux, estimant que les nouvelles exigences posées par Israël pour ces libérations le déliaient de son engagement de s'abstenir de toute démarche auprès de la communauté internationale. Cette décision est intervenue peu après un nouvel appel d'offres par Israël pour 708 logements dans le quartier de colonisation de Gilo, à Jérusalem-Est annexée. M. Kerry était en tournée en Europe et au Proche-Orient durant cette crise la semaine dernière et il en est rentré vendredi exaspéré et pessimiste face à un dialogue de paix au bord de l'implosion. Pour la première fois, il avait prévenu -- et il l'a répété mardi -- qu'il y avait «des limites au temps et aux efforts» de Washington «si les parties ne sont pas désireuses de faire des progrès». M. Kerry se concertait mardi à la Maison-Blanche avec le président Barack Obama et son vice-président Joe Biden sur la marche à suivre.