Ainsi, en février 2014, 121 personnes ont été massacrées dans le village voisin d'Izghe et, en mai, 25 chrétiens ont été assassinés en se rendant à l'office, à Gwoza même. L'émir de l'Etat de Borno, Alhaji Idrissa Timta, a été victime d'un meurtre à l'arme à feu en mai et son successeur, qui est aussi son fils, a disparu lors d'une attaque de la ville, le 6 août, laquelle a fait plus d'une cinquantaine de victimes. Le 23 août, l'académie de police située dans la banlieue de Gwoza a été attaquée pour la troisième fois et 35 officiers de police sont toujours portés manquants sans que l'on sache s'ils ont été faits prisonniers, s'ils ont été tués ou s'ils se sont réfugiés dans la brousse. Les forces militaires nigérianes semblent dépassées. Près de 480 militaires nigérians se sont enfuis fin août au Cameroun voisin et sont actuellement regroupés dans la ville de Maroua. Les chefs militaires sur le terrain déplorent leur manque de moyens en armement et en personnels et considèrent qu'ils sont surclassés par les forces de Boko Haram. Le bilan s'alourdit. En cinq ans, Boko Haram a assassiné plus de 10 000 personnes et en a enlevé des centaines. Par ailleurs, Abubakar Shekau, l'émir de Boko Haram, ne cesse d'adresser des messages tonitruants via internet. Lors de sa dernière vidéo de 52 minutes, diffusée le 24 août, il déclare l'établissement d'un Etat islamique couvrant l'ensemble du Nigéria, en commençant par Gwoza. Il précise même : «Allah nous commande de diriger Gwoza suivant la loi islamique. En fait, il nous ordonne de diriger l'ensemble du monde, et pas seulement le Nigeria, et maintenant, nous avons démarré». Par contre, il ne fait aucune allusion à Abou Bakr al-Baghdadi qui a demandé à l'ensemble des mouvements djihadistes de le rejoindre au sein de son califat. Certes, en juillet, il lui avait apporté son soutien, mais pas son allégeance. D'ailleurs, jouant dans l'ambiguïté, il avait également félicité Al-Qaïda central et les talibans pour leurs actions. Il s'en prend aussi violemment aux membres de tribus locales qui ont décidé de rejoindre des groupes d'autodéfense pour protéger leurs familles des exactions de Boko Haram : «je jure par Allah que nous n'arrêterons jamais de vous tuer car Allah nous a commandé de tuer les gens comme vous. Si nous avons pitié de vous et vous épargnons, un jour vous deviendrez infidèles. Ainsi, pour nous, avoir pitié de vous est un acte d'impiété (...) Alors quand vous implorez la pitié, nous vous frapperons, vous couperons la tête et vous tuerons tous. Même si vous ne faites rien contre nous, nous vous tuerons... Nous ferons cela pour venger nos frères...». Pendant ce temps, le monde occidental fait semblant d'organiser la manière dont il peut s'opposer aux menaces que font peser les fous furieux de l'Etat islamique (EI) en Irak et en Syrie et, ayant plusieurs fers au feu, il décrète des sanctions contre Moscou pour «punir» le président Vladimir Poutine de son soutien inconditionnel aux séparatistes russophones ukrainiens. (Suite et fin)