Une démarche d'écoute et de concertation ? Le pouvoir a fini d'y croire. Il n'y aura pas de consensus. Que le pouvoir soit placé dans une situation où il sera contraint de parler à lui-même pour élaborer la constitution, il sera brandi le slogan qui avait fait les beaux jours de la critique à savoir qu'«il chante tout seul». L'opposition de toute façon dit ne pas reconnaître l'élection présidentielle passée, et ce, avec toutes les implications qui devraient en découler. L'opposition inscrit son refus dans une démarche de logique «délégitimatrice» du pouvoir. Deux éléments devraient caractériser cette logique. Premièrement, il lui faudrait à l'opposition disposer d'un pouvoir de dissuasion qui serait fondé sur sa capacité à faire sortir les foules et à pouvoir canaliser celles-ci vers un seul objectif, celui de ne rentrer à la maison qu'après la chute du régime. Du régime et non du seul Président. Pourquoi du régime ? Rien ne garantit que la chute du Président se fera en faveur de l'opposition. Cette dernière a pu mesurer sa propre impuissance et parallèlement la solidarité au sein du régime quand elle avait exigé la «destitution» du Président pour raisons médicales. Deuxièmement, pour faire aboutir cette stratégie, il faudrait s'appuyer sur une totale «déligitimité» du Président. Or, la légitimité de tous les présidents a toujours été mise en débat. Les vaincus ont-ils félicité le vainqueur pour sa victoire ? Quand cela a-t-il été fait depuis le premier mandat ? L'opposition a consommé son impuissance non pas aujourd'hui mais quand avait sauté le verrou du nombre de mandats. Les troisième et quatrième mandats ont confirmé cette impuissance. De la part de l'opposition, il y a une sorte de jeu de poker. Le pouvoir ne se prive pas lui aussi d'entrer dans le jeu. Celui-ci se construit de part et d'autre autour de ce que chacun estime être les vulnérabilités de l'autre. Le pouvoir a l'habitude de se comporter en bulldozers. L'opposition est divisée. Les pôles ne vibrent pas en phase. Deux démarches. L'une s'appuie sur une logique de retour ou d'attente d'une future élection présidentielle à préparer dès maintenant, d'autant qu'il s'agit de ne pas se faire prendre de vitesse dans le cas probable (tous les scénarios sont mathématiquement possibles) d'une élection présidentielle anticipée. L'autre démarche est fondée sur l'idée d'une nouvelle phase de transition à refonder sur le plan institutionnel. Le pouvoir va faire face à une démarche en dehors des institutions. Le pôle des partis et personnalités va officialiser sa démarche normalement en juin. Dès lors, il s'agira plus que d'un simple bras de fer. Le premier pôle a son candidat Ali Benflis. Le second n'en a pas pour le moment, et peut-être jamais. Quant au FFS, il se trouve toujours mieux tout seul.