L'opération «Tempête décisive» menée par la coalition dirigée par l'Arabie Saoudite, le 26 mars, avec l'appui des Etats-Unis, visait avant tout à empêcher le Yémen d'exploiter librement ses ressources énergétiques avec le concours des partenaires de son choix (Brics et Iran). Cette intervention a été dictée par des considérations économiques et géopolitiques, véritables enjeux des guerres qui secouent le Proche-Orient actuellement. Mais l'Arabie Saoudite a déjà perdu cette guerre et l'un des signes avant coureurs n'est-il pas la pénétration en profondeur du sud saoudien par les forces yéménites qui annoncent une proche libération de Najran ? Pas moins de 10 km en longueur et 250 km en largeur, à l'intérieur du royaume saoudien (selon Ismail Wajih) sont passés sous le contrôle des forces yéménites (armée et comites populaires proches d'Ansar Allah), ainsi que des villes, des villages entiers. Douze (12) bases militaires, ont été prises à l'armée saoudienne qui a perdu au moins 80 militaires et des dizaines de véhicules, chars et blindés. La conquête de la ville saoudienne de Najran approche ou la nouvelle étape de la guerre au Yémen Selon l'agence officielle SABA, l'armée et les forces populaires yéménites approchent de plus en plus de la conquête de la ville saoudienne de Najran, citant le porte-parole de l'armée yéménite, le général Charaf Loqman, qui a déclaré le 3 Décembre que «les forces yéménites encerclent actuellement les villes saoudiennes de Jizan et Najran, et attendent la décision politique pour y pénétrer». «L'armée yéménite mène des opérations, dans les trois provinces de Najran, Jizan et Al-Assir. Les forces yéménites ont pris le contrôle des montagnes donnant sur la ville de Najran et nous attendons l'ordre d'y pénétrer, et dès qu'un tel ordre sera émis, nous sommes prêts à libérer la ville des mains des occupants, car, en principe, Najran est une ville qui appartient au Yémen», a-t-il souligné. Ces derniers jours, les forces yéménites ont intensifié leurs bombardements contre plusieurs positions militaires à Najran, dont le site Al-Mekyal et pris le contrôle de 3 bases militaires sur le mont Al-Chorfa, malgré les frappes saoudiennes en soutien à leurs soldats, dont plusieurs ont été tués suite lors de ces attaques au cours desquelles 10 blindés saoudiens ont été détruits. La guerre au Yémen entame une nouvelle étape avec « l'intensification des opérations militaires contre les agresseurs, dans le droit fil du choix des options stratégiques, à leur encontre » et qui s'inscrivent dans le cadre « d'une grande lutte nationale (...) pour « défendre le pays et préserver ses capacités», a souligné Loqman. Par ces informations, les forces yéménites, viennent ainsi d'apporter leur réponse à la demande de retrait des frontières saoudiennes, comme une des conditions pour l'arrêt de la guerre au Yémen et ce au moment où l'on évoque la reprise prochaine des négociations de Genève 2. La guerre sur « le territoire de l'ennemi » très peu médiatisée, qui a pris de l'importance, se déroule en même temps et comme une réponse aux raids de l'aviation de la Coalition qui font toujours plus de victimes civiles. Elle dénote aussi que les stocks d'armements yéménites, les missiles notamment, n'ont pas pu être détruits, comme le voulait la Coalition. Les missiles et les roquettes des forces yéménites ciblent quotidiennement les positions de l'armée saoudienne aux frontières et celles de la Coalition à l'intérieur du Yémen. « Alors que nous, nous ne ciblons jamais les civils, les troupes saoudiennes, qui ne peuvent même pas défendre leurs villes et villages, se livrent aux bombardements de notre population civile qui souffre, surtout aux frontières, comme à Saada, où l'ennemi pratique la politique de la terre brûlée et utilise des armes interdites » dit Wajih. L'échec de l'Arabie au Yémen, se reflète aussi à travers la perte des batailles de Bab el Mandeb par les troupes de la Coalitions et ses alliés saoudiens, qui, n'arrivent pas à avancer à Maarib et à Taez, malgré le renfort de soldats de plusieurs pays, dont des soudanais et des colombiens. A Maarib, selon des informations rapportées par le quotidien Alkhabar le 30 novembre, une médiation envoyée par la Coalition et leur allié, le président Abd Rebbo Mansour Hadi, a tenté de négocier une trêve permanente avec les tribus Jahm, de Sirwah, qui ont imposé un blocus les empêchant d'avancer vers Sanaâ. Ces tribus alliées des comités populaires et de l'armée yéménite, ont opposé une fin de non-recevoir. Les chefs des tribus Jahm ont exigé d'abord un arrêt des frappes aériennes et des excuses pour tous les crimes commis par l'aviation de l'Arabie, qui a lancé sur le district de Sirwah au cours des trois derniers mois, plus de 2.756 raids aériens. Sur le terrain des opérations, la Coalition de plus de dix pays, aidée par les Etats Unis et d'autres pays occidentaux, n'a pas réalisé de percée et selon Wajih, les forces populaires yéménites contrôlent toujours entre 60 et 70 % du territoire, à l'exception d'Aden sous l'emprise d'Al Qaida, depuis le retrait tactique des forces d Ansar Allah de cette ville du sud du pays en juillet. Or dans le gouvernorat d'Aden, devant servir de siège provisoire au Président Hadi, Al Qaida vient encore de s'emparer d'une nouvelle ville : Jaar, à Abyane, sans rencontrer de résistance de la part des forces de la coalition et leurs milices alliées, pourtant présentes, selon le journal libanais Al Khabar. Cette nouvelle prise permettra aux groupes terroristes, takfiris d'Al Qaida et de Daesh, de renforcer leur présence dans le Sud yéménite après la prise de Moukalla, capitale du Hadramaout, en avril dernier, toujours, sans résistance de la part des forces de la Coalition arabe. Alors que l'objectif déclaré de l'intervention du 26 mars était d'empêcher l'extension des « rebelles Houthis chiites » vers les villes du Sud, aujourd'hui, alors que ceux-ci se sont retirés, pourquoi les forces de la coalition arabe n'arrivent pas à mettre fin à l'expansion des groupes terroristes (Qaida et Daesh ?) et assurer la sécurité dans cette région où est censé siéger le Gouvernement Hadi ? Que signifie alors la condition évoquée plus haut, posée par l'Arabie Saoudite pour l'arrêt de la guerre, de « ne pas s'opposer au Président démissionnaire Abd Rabbo Mansour Hadi et de son gouvernement siégeant à Aden » sous la protection d'Al Qaiada ? N'est ce pas une partition entre le Nord et le Sud du Yémen qu'elle cherche à consacrer ? Encore un jeu de cartes trouble de Ryadh et de ses alliés au moment où l'opinion internationale est mobilisée contre les attentats des groupes terroristes de Daesh et leurs projets au Moyen-Orient, en Afrique et en Europe ? Or le peuple yéménite est contre cette partition du pays à l'ombre d'Al Qaida et se bat pour la liberté et l'indépendance de tout le Yémen uni. Pour l'activiste politique I.Wajih : « Même si cette guerre devait durer encore 100 ans, l'Arabie Saoudite ne pourra jamais nous obliger à la dépendance et à nous imposer son diktat ». C'est pourquoi l'Arabie a déjà perdu au Yémen, malgré tous ses moyens, face à la motivation et la détermination des yéménites. (Suite et fin)