Normalement, une élection clôture une fin de transition et ne l'ouvre pas. Alors, sommes-nous dans une phase de transition qui poursuit son processus d'avancement, une phase de transition qui n'a pas encore réellement commencé ou une phase déjà consommée ? La réponse dépend de la distance au pouvoir de son auteur. Que l'on soit dans le camp du pouvoir, dans celui de l'opposition ou ni dans l'un ni dans l'autre, les réponses ne seront jamais les mêmes. Elles ne traduiront pas des convictions, mais des intérêts. On dit bien que la politique c'est du mensonge. Qui reconnaît que l'autre est légitime ? C'est bien le champ politique ouvert avec des élections libres et sans problèmes majeurs qui constitue l'espace de légitimation. Probablement, la conjoncture est favorable à des remises en cause des personnes, bien évidemment, des idées politiques sur les approches de l'accès au pouvoir, sur l'architecture du pouvoir, sur la suprématie de l'Etat, de la loi donc par rapport au pouvoir. Il y a des pouvoirs qui ont travaillé à l'affaiblissement des Etats ou alors à leur conférer une coloration politique partisane ce qui est plus grave. On ne va pas quand même nommer des militants politiques à la tête des structures de l'administration de l'Etat. Les secrétaires généraux des ministères ainsi que les directeurs centraux doivent représenter l'Etat et non le pouvoir politique. Or, le pouvoir, c'est «tout». Le pouvoir, ce sont des hommes, pas des institutions. Il n'y a pas des ministères, il y a des ministres. Il n'y a pas de wilayas, mais des walis. Il n'y a pas des mairies, mais des maires. Tout est personnalisé, tout est personnel. Il devrait normalement se poser la question de la nature de la forme nouvelle de légitimation de l'accès au pouvoir ou encore du maintien au pouvoir pour ceux qui y sont. Une désignation tout à fait libre par le champ politique ? Par le parti unique qui évolue dans un environnement politique créé sur l'exclusion ou la marginalisation des partis d'opposition ? Une désignation par l'armée dans le cas où ? Capacité d'un parti à porter son candidat et à le faire gagner par les urnes dans un environnement qui sera propice à la réelle expression du choix populaire ? Existe-t-il encore un tel parti qui ne soit pas accusé, comme d'habitude, d'agir comme vitrine des décideurs ? Capacité d'une coalition de partis à porter leur candidat au pouvoir sans les aides de l'administration ? Remplacement de la légitimité historique par la légitimité financière ? Avec la fin inéluctable du recours à la légitimité historique, même si celle-ci aurait encore de (belles ?) années à vivre, la question se posera de savoir quelle autre forme de légitimité viendrait en substitution. Irons-nous vers la réhabilitation des partis politiques et laisser se créer la tradition de l'accès à la magistrature suprême d'un vrai secrétaire général ?