Au même titre que l'Algérie et le Maroc, l'Allemagne va placer la Tunisie sur sa liste des «pays sûrs». Cette façon de faire qualifiée de moquerie a pour seul objectif de durcir ainsi les conditions d'asile pour leurs ressortissants. «Maintenant, nous allons (...) inscrire dans la loi (allemande) les trois pays, Maroc, Algérie et Tunisie comme des pays sûrs», a indiqué, jeudi, M. Gabriel, patron du parti social-démocrate, après une réunion avec les chefs des deux autres partis de la coalition au pouvoir, la chancelière Angela Merkel (CDU) et le Bavarois Horst Seehofer (CSU). À l'issue d'une rencontre à la chancellerie, à Berlin, les trois patrons de la coalition se sont mis d'accord, au terme de plusieurs semaines d'atermoiements, sur un nouveau train de mesures destinées à limiter le nombre de demandeurs d'asile en Allemagne, alors que le pays a accueilli en 2015 environ 1,1 million de migrants. Le gouvernement allemand a tout simplement cédé à la pression de la rue de ces dernières semaines mais aussi à la classe politique allemande qui avait, également, multiplié les appels pour accélérer les expulsions de ressortissants des pays du Maghreb ces dernières semaines. En tout cas, les tour-opérateurs ainsi que les touristes allemands ne vont pas l'entendre de cette oreille. Les attentats du Bardo en mars, de Sousse en juin et de Tunis en novembre derniers ont mis à genoux le secteur touristique, qui représente 7 % du PIB tunisien. La Tunisie a carrément payé le prix fort avec la fermeture de plus de 70 hôtels. Le pays connaissait alors une baisse de près de moitié (48 %) du nombre d'entrées sur son territoire en provenance d'Europe. Le troisième attentat majeur, en novembre, quand 12 agents de la garde présidentielle ont été tués en plein Tunis, a définitivement fait de 2015 une année noire pour le tourisme. La Tunisie a perdu plus du tiers de ses recettes touristiques en 2015 par rapport à 2014. Le secteur, qui représente environ 7% du Produit intérieur brut (PIB) tunisien, était de plus déjà fragile depuis la révolution de 2011 et l'essor d'une mouvance jihadiste armée. «L'économie nationale a connu en 2015 un fléchissement de l'activité dans les principaux secteurs -hormis le secteur agricole- notamment l'industrie et les services qui ont été affectés par les évènements terroristes et ce malgré le succès de la transition politique », confirme la Banque centrale dans une note conjoncturelle. « Pour l'ensemble de l'année écoulée, le repli a atteint (...) 30,8% pour les entrées de touristes étrangers, revenant à 4,2 millions de personnes, et 35,1% pour les recettes touristiques » qui ont plafonné à 2,35 milliards de dinars (environ un milliard d'euros). Moitié moins de touristes européens en 2015 Alors que l'Europe constitue un marché traditionnel pour la Tunisie, le nombre de touristes européens en 2015 (1,3 million) a plongé de 53,6% par rapport à 2014 (2,8 millions). Cette chute est même de 65,8% par rapport à 2010 (3,8 millions), année de référence pour le tourisme tunisien, selon des données du ministère du Tourisme. Plusieurs dizaines d'hôtels ont été contraints de fermer provisoirement leurs portes cet automne, faute de clientèle. Mais la source de la fragilité du secteur ne vient pas que du fléau djihadiste. Le tourisme souffre également de problèmes structurels tels le manque de diversité d'une offre centrée sur le tourisme balnéaire de masse, la vétusté de certaines infrastructures ou encore l'endettement des structures hôtelières.