T out se passe comme si des pays maghrébins ne pensent pas que leur avenir est fatalement lié à celui du Maghreb, tout comme également ces pays qui ne pensent pas que seul leur rapprochement, à défaut de leur union, pourra les mettre à l'abri de toute menace extérieure, économique ou militaire, tel le terrorisme qui tend à se consolider par l'union de tous les mouvements terroristes qui activent au grand jour ou qui attendent l'opportunité de le faire en toute solidarité. Quand bien même que chacun de ces pays estime (peut-être à tort) qu'il n'y a pas d'intérêts vitaux pouvant être en péril dans cette région, ils devraient saisir le message qui leur est envoyé par la création d'une Qaïda maghrébine qui tend d'abord à monter en puissance et à se donner les moyens de sa politique terroriste à mettre en œuvre dans leur région. Une menace plus grande encore se profile avec la création de Daech et son activisme en Libye, en Syrie, en Irak. C'est une politique que les chefs de la Qaïda estiment gagnante à terme, même à long terme et même à très long terme. Dans chacun des pays du Maghreb, les manœuvres inter-armes ne sont pas effectuées par désignation d'un ennemi connu, identifié, mais imaginé. Quant aux manœuvres conjointes, elles nous sont étrangères, sauf si l'Otan décidait du contraire, dans le cadre du dialogue méditerranéen. Chacun de ces pays a son ennemi qui n'est pas trop loin géographiquement. Ennemi stratégique juste pour mobiliser les populations et construire ainsi un espace de défense contre toute menace, y compris celle portée par la concurrence économique, ou plutôt commerciale ? Comme menace en provenance de l'extérieur, pour le moment, les populations pensent plutôt que s'il y a une menace extérieure, celle-ci ne pourrait être que militaire et non économique. Depuis que dans tous les discours, il y a exclusivement la dimension militaire qui est conjurée et pas la dimension économique, la notion de péril extérieur est liée à une éventuelle agression ? Quel pays arabe a-t-il la conviction que cela ne concerne que les autres pays arabes, du genre de l'Irak, et pas eux ? A ce titre, l'Algérie ne dimensionne pas le format de son armée dans l'objectif de satisfaire des visées annexionnistes, mais seulement dans celui de préserver son intégrité territoriale et la souveraineté de la décision nationale. Mais il va de soi que l‘Algérie a le droit de satisfaire son besoin de sécurité à ses frontières. Quels seraient les éléments de sa dissuasion et les moyens de renforcer celle-ci ? Pourquoi faudrait-il croire qu'à chaque fois que l'on parle de dissuasion, les pensées vont à des réactions militaires et pas économiques ? Les pays arabes avaient bien utilisé l'arme du pétrole, tandis qu'il est arrivé à des pays occidentaux de prôner le boycott économique, le boycott commercial. Pas de politique extérieure axée sur la recherche de l'exercice de l'hégémonie régionale, mais il est bien évident qu'elle doit se considérer intéressée par ce qui se passe dans son environnement international, et à plus forte raison, à ses propres frontières. Il n'est point besoin d'être une grande puissance financière ou militaire pour avoir une crédibilité sur la scène internationale ou réussir sa politique de présence diplomatique. La politique extérieure algérienne a montré par sa constance qu'elle est fondée sur la sécurité collective, la solidarité opérationnelle face aux menaces et qu'il faudrait organiser une parade concertée contre un phénomène pour lequel il n'était pas prévu qu'il atteindrait une dimension internationale. Mais que peut faire un seul pays sans engagement de toute la région ? Là il y a problème. Ce ne sont pas fatalement les Etats qui peuvent imposer facilement leurs visions, mais les ensembles régionaux, les ensembles en phase de construction d'une politique de défense intégrée, de sécurité intégrée, de politiques extérieures étatiques convergentes, et de solidarité en matière d'économie et de commerce généralement selon le principe «gagnant, gagnant».