En référence aux différents rapports tant du ministère de la Défense nationale, de la Gendarmerie nationale que de la DGSN qui relatent journellement à travers la presse nationale d'actions terroristes, et de mouvements sociaux travers toutes les wilayas, au lieu de discours chauvinistes, loin de toute sinistrose, ni autosatisfaction, il faut analyser lucidement la situation pour répondre concrètement aux défis de l'Algérie. Le temps se compte, l'Algérie ayant toutes les potentialités de sortie de crise a un répit de trois années, passant par l'élaboration d'une stratégie clairement définie et une profonde moralisation de ceux qui dirigent la Cité, en fait l'urgence d'un renouveau de la gouvernance centrale et locale. 1.-Devant éviter se de référer aux intellectuels organiques aux ordres, selon l'expression du philosophe Gramsci, contre productif pour le pouvoir lui même, la refondation de l‘Etat doit saisir les tendances réelles de la société algérienne en mutation. Le renforcement de l'Etat de droit devient alors plus urgent quand on sait que la démocratisation des institutions et l'autonomisation vont encourager l'éclosion de nouvelles identités qu'on croyait mortes et qui exigent le pilotage d'un Etat et d'un pouvoir fort de sa légitimité et crédible de sa compétence. La refondation de l'Etat, pour ne pas dire sa fondation comme entité civile, passe nécessairement par une mutation profonde de la fonction sociale de la politique. C'est la norme du droit qui reprend sa place pour légitimer le véritable statut de la citoyenneté nationale. Le passage de l'Etat de «soutien» à l'Etat de justice est de mon point de vue un pari politique majeur, car il implique tout simplement un nouveau contrat social et un nouveau contrat politique entre la nation et l'Etat. 2.-L'Algérie ne peut revenir à elle même que si les faux privilèges sont bannis et les critères de compétence, de loyauté et d'innovation sont réinstaurés comme passerelles de la réussite et de promotion sociale. La compétence n'est nullement synonyme de postes dans la hiérarchie informelle, ni un positionnement dans la perception d'une rente, elle se suffit à elle-même et son efficacité et sa légitimité se vérifient surtout dans la pertinence des idées et la symbolique positive qu'elle ancre dans les corps et les acteurs sociaux. Sans cela, les grandes fractures sont à venir et la refondation de l'Etat ne dépasserait pas une vaine tentation de vouloir perpétuer un pouvoir qui n'est plus en mesure de réaliser les aspirations d'une Algérie arrimée à la modernité tout en préservant son authenticité. La refondation de l'Etat ne saurait se limiter à une réorganisation technique (changement de gouvernement ou de ministres). Elle passe par une nouvelle gouvernance, une transparence totale et une clarté sans nuance dans la pratique politique, sociale économique et surtout dans la communication afin de mobiliser l'opinion. Il n'est plus permis grâce à une aisance financière artificielle, de continuer de dépenser sans compter, importer au lieu de privilégier la production locale se fondant tant sur l'entreprise locale ou étrangère créatrice de richesses. 3.-La bonne gouvernance est une question d'intelligence et de légitimité réelle et non fictive. Cela implique de poser la problématique stratégique du futur rôle de l'Etat largement influencé par les effets de la mondialisation dans le développement économique et social notamment à travers une réelle décentralisation. Les exigences d'un Etat fort de sa droiture et de son droit, si elles constituent un outil vital pour la cohésion nationale et le destin de la nation, ne doivent pas occulter les besoins d'autonomie de pouvoirs locaux qui doivent être restructurés en fonction de leur histoire anthropologique et non en fonction des nécessités électoralistes ou clientélistes. La cohésion de ces espaces et leur implication dans la gestion de leurs intérêts et de leurs territorialités respectives enclencherait alors une dynamique de compétitions positives et rendront la maîtrise des groupes loin de la centralité politique largement dépassée. L'autonomie des pouvoirs locaux ne signifie pas autonomie de gouvernement mais un acte qui renforce la bonne gouvernance, le rôle de la société civile et les pouvoirs locaux afin de transformer la commune «providence» en «commune entreprise» 4.-Cela suppose que toutes les composantes de la société et les acteurs de la vie économique, sociale et culturelle, soient impliquées, sans exclusive, dans le processus décisionnel qui engage la configuration de l'image de l'Algérie de demain qui devra progressivement s'éloigner du spectre de l'exclusion, de la marginalisation et de toutes les attitudes négatives qui hypothèquent la cohésion sociale. L'implication du citoyen dans le processus décisionnel qui engage l'avenir des générations futures, est une manière pour l'Etat, de marquer sa volonté de justice et de réhabiliter sa crédibilité en donnant un sens positif à son rôle de régulateur et d'arbitre de la demande sociale (1). Les réformes en profondeur du fonctionnement de la société algérienne impliquent d'analyser avec lucidité les relations dialectiques réformes, les segments de la production de la rente (Sonatrach) et celui de sa redistribution (système financier), les gagnants de demain n'étant pas forcément ceux d'aujourd'hui. Et surtout éviter que lorsque la valeur de la rente des hydrocarbures s'accroit, plus les réformes sont freinées dans des redistributions passive de la rente pour une paix sociale éphémère avec une concentration du revenu national au profit d'une minorité rentière. En résumé, face à un monde en perpétuel mouvement, tant en matière de politique étrangère, économique que de défense, actions liées, avec les derniers événements au Moyen-Orient, au Sahel, aux frontières de l'Algérie, se posent l'urgence des stratégies d'adaptation et d'une coordination, internationale et régionale afin d'agir efficacement sur les événements majeurs. Ces nouveaux défis pour l'Algérie, acteur stratégique pour la stabilité de la région méditerranéenne et africaine (2), dépassent en importance et en ampleur les défis qu'elle a eu à relever jusqu'à présent. Face à cette situation tant géostratégique et interne complexe, les Algériens veulent vivre leurs différences dans la communion et non dans la confrontation. L'Algérie qui traverse une phase cruciale de son histoire a besoin qu'un regard critique et juste soit posé sur sa situation sur ce qui a déjà été accompli et sur ce qu'il s'agit d'accomplir encore au profit exclusif d'une patrie qui a besoin de se retrouver et de réunir tous ses enfants autour d'une même ambition et d'une même espérance : un développement harmonieux conciliant efficacité économique et une profonde justice sociale. Docteur Abderrahmane Mebtoul Professeur des Universités- Expert International en management stratégique