Le penseur, théoricien de la littérature et historien des idées français d'origine bulgare Tzvetan Todorov est mort dans la nuit du 6 au 7 février, à l'âge de 77 ans. Dans la vie intellectuelle française, il a occupé une place singulière. Très anti-communiste, notamment à cause de son parcours personnel - il était né à Sofia en Bulgarie en 1939 -, il a fait partie du moment anti-totalitaire, sans devenir un « nouveau philosophe ». Au début des années 1960, il avait fui le régime communiste pour poursuivre ses études à Paris. Devenu directeur de recherche au CNRS, Tzvetan Todorov se passionne pour les formalistes russes, et signe une introduction à la littérature fantastique qui fait encore autorité aujourd'hui. Mais sa passion pour la littérature n'aura qu'un temps. Dans les années 1980, il se lance résolument dans l'histoire des idées, à travers Rousseau, Voltaire, Diderot, ces écrivains des Lumières qu'il adore, mais aussi Montaigne et Lévi-Strauss. Cette réorientation de son œuvre n'a rien de fortuit. De son enfance pendant la guerre en Bulgarie, Todorov a gardé une haine farouche du totalitariste et une méfiance vis-à-vis du communisme et de toute forme d'utopie révolutionnaire qui lui a parfois valu d'être considéré comme un conservateur, notamment lorsque, dans les années 1970, il soutient l'intervention américaine au Vietnam. Une position qu'il assouplira par la suite. Ainsi, après le déclenchement de la guerre en Irak, il s'était violemment opposé aux partisans de l'ingérence. Dans un recueil d'essais paru en 2009, Todorov disait son attachement à la voie médiane de la démocratie libérale. Il écrivait : « Méfions-nous des deux extrêmes, nous n'avons pas à rougir de choisir de cette voie moyenne ». Tzvetan Todorov a été professeur invité dans plusieurs grandes universités américaines : à New York, Columbia, Harvard, Yale et en Californie. Il est docteur honoris causa de l'université de Liège et a reçu plusieurs prix importants. Il fut membre du Comité de soutien du Centre Primo Levi (soins et soutien aux personnes victimes de la torture et de la violence politique) et également Président de l'Association Germaine Tillion, à sa fondation en novembre 2004. Auteur d'une œuvre foisonnante, on en retiendra notamment « Dictionnaire encyclopédique des sciences du langage », « Théories du symbole », « Les Genres du discours », « La notion de littérature et autres essais », « Mémoire du mal, tentation du bien »,...etc.