Yacef Saâdi, ancien responsable de la zone autonome d'Alger, a rendu, hier, à Paris, un hommage appuyé à feue Germaine Tillion, cette ethnologue venue en Algérie notamment pour enquêter sur les conditions carcérales des détenus nationaux et dont «le truchement» avec l'administration coloniale a permis de sauver 265 condamnés à mort de la guillotine. «J'étais parmi ces condamnés à mort. Elle m'avait sauvé la vie et celle de 264 autres de mes compatriotes condamnés à la guillotine. C'est grâce à ses contacts secrets avec le général de Gaulle que le supplice extrême nous a été épargné», a-t-il témoigné lors d'une rencontre-débat à l'Ecole internationale algérienne. Après la projection d'un documentaire d'une trentaine de minutes où le responsable de la zone autonome d'Alger raconte sa rencontre avec l'humaniste, ancienne déportée lors de la seconde guerre mondiale, Yacef Saâdi a tenu à rendre un hommage, à travers feue Tillion, à l'ensemble de ces Français, intellectuels, porteurs de valises, combattants etc, qui avaient épousé la cause nationale. «Il est à chaque Algérien digne de ce nom un devoir de leur rendre un vibrant hommage et reconnaître que ces militants, au-delà de leurs opinions ou de leurs origines, font partie de nous-mêmes», a-t-il dit, en présence de membres de la Fondation Germaine Tillion et de l'Association France-Algérie. Pour l'un des protagonistes de la bataille d'Alger, «s'il doit rester un lien entre l'Algérie et la France ce sera à ces hommes et à ces femmes que nous le devons». Mettant à profit cette rencontre, organisée par la consulat général d'Algérie à Paris, le moudjahid Yacef Saâdi a remis au président de la Fondation Germaine Tillion un présent en «reconnaissance de son combat humaniste en Algérie». Intervenant à cette occasion, le président de la Fondation, Tzvetan Todorov, a rappelé que Feue Germaine Tillion, après avoir pris en 1957 la mesure de la gravité de la situation en Algérie (torture, exactions, attentats), «a choisi une voie assez particulière : ne plus se battre pour une cause, mais se battre pour sauver la vie et la dignité d'êtres humains individuels». «Elle a fait tout ce qu'elle a pu, pendant les cinq dernières années de la guerre, pour essayer de tirer des gens de ces situations dramatiques, en nouant des contacts tant avec des représentants du mouvement national qu'avec ceux de l'administration coloniale», a témoigné l'éminent philosophe. L'hommage à Germaine Tillion est le deuxième du genre rendu par le moudjahid Yacef Saâdi, après celui organisé à Alger le 21 avril dernier, dans le cadre de la célébration du quatrième anniversaire du décès de l'ethnologue française. APS