L'historien Gilles Manceron et l'éditeur François Gèze ont appelé samedi les Français à «regarder en face» le passé colonial de la France, relevant que l'oubli gangrène la société. «La nécessité de regarder ce passé en face (à) est devenue d'autant plus impérative que l'oubli de la part coloniale de notre histoire a produit une forme de gangrène qui affecte toujours la société française», ont-ils affirmé dans une tribune publiée samedi par le quotidien Le Monde, suite à la polémique sur la qualification, par Emmanuel Macron, de la colonisation comme «crime contre l'humanité». Les deux intellectuels ont estimé que le candidat Macron «a eu le mérite de lancer, le 15 février, dans la campagne électorale présidentielle, tel un pavé dans la mare, le sujet de notre passé colonial. Et de dire clairement que la colonisation a été en contradiction avec les principes des droits de l'homme», relevant que ce passé colonial «a laissé des traces durables dans les représentations collectives et dans les comportements de parties importantes de notre société». Pour eux, au regard de la durée «exceptionnelle» (132 ans) de la colonisation de l'Algérie et la présence d'une importante population de colons, «il n'est pas exagéré, à notre sens, de parler d'une maladie algérienne de la société française depuis l'indépendance de cette ancienne colonie». «La reconnaissance (à) de ce que fut cette page d'histoire, dans toute sa complexité et sans occulter ses pages les plus sombres et contradictoires, reste très insuffisante», ont-ils soutenu, soulignant que les séquelles de ce passé «constituent le soubassement de manifestations racistes et islamophobes, parfois au cœur de l'Etat». Gilles Manceron et François Gèze on fait observer que cette «maladie» explique également les difficultés «récurrentes» des relations politiques franco-algériennes tout comme les stigmatisations récentes des titulaires de la double nationalité franco-algérienne.