La France éprouve de la "difficulté" et de la "gêne" à reconnaître ses crimes en Algérie perpétrés lors de la période coloniale, en raison de l'implication de ses forces politiques dans ces atrocités, a estimé lundi à Alger l'historien français, le Pr. Gilles Manceron. "Les autorités françaises qui représentent les générations ayant participé à l'entreprise coloniale en Algérie n'arrivent pas à regarder en face les crimes qu'ils ont commis dans ce pays et éprouvent de la gêne à les reconnaître", a insisté M. Manceron lors d'une rencontre internationale, organisée à l'occasion de la célébration du cinquantenaire de l'indépendance de l'Algérie. Le Pr. Manceron a expliqué que cette gêne venait du fait que les générations qui ont vécu l'époque coloniale avaient du "mal à regarder d'une manière critique cette page du passé". Il a, dans le même sens, ajouté que "les forces politiques française étaient toutes plus au moins mêlées à l'entreprise coloniale en Algérie, citant l'exemple de "l'ex-président François Mitterrand qui a conduit la France de 1981 jusqu'à 1995 bien qu'il avait un passé dans l'entreprise coloniale". M. Manceron a cependant relevé que le président français actuel, M. François Hollande, a commencé à poser quelques jalons sur la voie de la reconnaissance des crimes de la France en Algérie. "M. Hollande a rendu hommage le jour de l'inauguration de son mandat aux victimes algériennes du massacre du 17 octobre 1961", a rappelé le conférencier, ajoutant qu'en rendant hommage au père de l'école républicaine Jules Ferry, Hollande avait dit clairement qu'"il n'était pas d'accord avec son oeuvre coloniale". L'historien français a notamment souligné la nécessité que la France reconnaisse ce que la conquête et la colonisation avaient de contraires aux principes élémentaires des peuples, de même de la liberté et de l'égalité dont ce pays se réclame. "La reconnaissance de ces crimes doit pouvoir changer le regard sur la société française qui évolue, aussi changer les choses dans le rapport de la France avec le monde méditerranéen et tout particulièrement avec l'Algérie", a-t-il expliqué. Il a, en outre, affirmé que la reconnaissance des crimes perpétrés par la France en Algérie constituait une dette "morale" et "politique" que la France "doit payer". Les travaux de cette rencontre internationale qui se tient depuis dimanche à Alger avec la participation d'historiens, chercheurs et universitaires algériens et étrangers est axée sur le thème "Algérie 50 ans après : libérer l'histoire". Cette rencontre de trois jours (1-3 juillet), qui se déroule à la Bibliothèque nationale, est organisée par le Centre national de recherches préhistoriques, anthropologiques et historiques (CNRPAH) en partenariat avec le quotidien national La Tribune.