La mise en place d'un cadre de coopération décentralisée entre les collectivités territoriales entre l'Algérie et la France et qui se tient Alger est organisée une douzaine d'années après la précédente tenue à Paris en 2004, cette initiative visant à consolider des partenariats décentralisés dans le cadre des opérations de jumelage entre des villes de France et d'Algérie, et à favoriser une véritable dynamique de collaboration au niveau local. Ces deux journées selon les organisateurs s'articulent autour de quatre ateliers thématiques : la démocratie participative, le levier de la transformation, la gestion des grandes villes et le développement durable où seront abordés l'épineux problème de la gestion des affaires locale et la fiscalité locales dans le développement territorial. L'objet de contribution qui fait suite à un chapitre important abordé dans un ouvrage collectif sous ma direction en 2004 (1) sur ce sujet qui engage l'avenir du pays, (avons-nous été écouté depuis) est d'analyser les missions nouvelles des collectivités locales algériennes dans leur contribution au développement du pays, au moment où le gouvernement est confronté à la réalisation de la transition d'une économie de rente à une économie hors hydrocarbures dans le cadre de la mondialisation. La gestion efficiente des espaces 1--Au préalable il s'agit de dresser un état des lieux. Dans le système algérien, les collectivités locales ont pour l'essentiel constitué des entités assistées par un Etat qui, outre ses prérogatives propres, se voulait être l'unique gestionnaire de l'économie. Les responsables locaux n'étaient donc, de ce fait, que des exécutants des politiques et décisions arrêtées au niveau central et qui se traduisaient au niveau communal par la réalisation des actions et programmes arrêtés en séance d'arbitrage par l'organe central de la planification, au titre des plans annuels et des enveloppes budgétaires. C'est ainsi qu'outre les orientations très directives qu'impliquaient déjà les programmes alloués, les communes et wilayas furent sous tutelle étroite de l'Etat central via le ministère de l'Intérieur. L'Etat prenait pratiquement en charge toute la politique sociale et intervenait très largement par ailleurs, dans la gestion du foncier et de l'urbanisme. Des directives furent ainsi données à une certaine époque aux wilayas, pour la cession de terrains à bâtir et toute la politique du logement fût quasi totalement confiée aux wilayas. Cette situation a eu pour effet une déresponsabilisation de l'autorité centrale déconcentrant les problèmes où ce sont les walis avec leurs démembrements- dairas – APC qui furent directement confrontés à la grogne du citoyen, motivée par les besoins de logement, de qualité de vie, d'emploi et autres. L'anarchie dont témoigne actuellement la croissance et les extensions désordonnées de nos villes, et notamment les plus grandes d'entre elles, ne pourra que s'accentuer, si l'on continue à accepter que les autorités locales demeurent livrées à elles mêmes pour répondre, sous la contrainte, à la demande sociale en espace à bâtir. Emergence d'une administration locale responsable Avec la nouvelle conjoncture économique et politique, il est indispensable et urgent de restituer les rôles et responsabilités des différents niveaux d'administration de notre territoire. Parallèlement au nouveau rôle d'animation et de régulation de la vie économique et sociale du pays que se fixe l'Etat, il s'agit conformément aux principes de la démocratie et de la décentralisation, de redonner à l'administration locale toutes les prérogatives et les moyens d'action d'une autorité locale pleinement responsable. 1.3.-Les obligations de l'Etat dans la perspective d'une décentralisation responsable. Dans le processus de décentralisation, l'Etat moderne doit veiller à accorder aux collectivités locales, toutes les prérogatives et tous les moyens qui leur permettront d'assurer la totale responsabilité de gestion de leurs territoires respectifs, tout en sauvegardant l'unicité des politiques et stratégies nationales qui doivent, dans l'intérêt général, transcender les conjonctures locales. Outre la refonte du statut de l'administration locale, il va sans dire que les prérogatives nouvelles qui en découleront pour l'autorité locale ne pourront s'exercer que si elles sont accompagnées par une réforme des finances locales. Chaque collectivité locale doit ainsi disposer d'un budget propre et de l'autonomie de son utilisation, afin que le citoyen puisse juger de la capacité de son administration communale à gérer son territoire de résidence et à améliorer ses conditions de vie. Dans le même temps, l'Etat doit sauvegarder ses missions fondamentales de garant de tout ce qui constitue les intérêts de la communauté nationale (cohésion et justice sociale, sauvegarde du patrimoine public, égalité des chances pour l'épanouissement de tous les citoyens...) L'autonomie de la gestion locale ne peut s'exercer que dans le respect des politiques et stratégies que met en œuvre l'Etat, tant pour régler et orienter le développement économique et social du pays, que pour aider et organiser le développement équitable et la bonne gestion de toutes les composantes de l'espace national. Les collectivités locales, entreprises de prestation de services et de création de richesses Le siège de la commune est le premier repère pour le citoyen dans son jugement sur la grandeur de l'Etat républicain. Il est bien évident que l'état de délabrement de la bâtisse, l'absence d'entretien des espaces ouverts, la tenue des fonctionnaires, le mauvais accueil, comme c'est souvent le cas, ne peuvent que renvoyer à une image négative de la perception de la notion d'Etat. Dans la pratique quotidienne, que ce soit pour un extrait de naissance ou tout autre document, le citoyen mal renseigné sur ses droits et livré à lui-même dans le labyrinthe de l'administration est ballotté de service en service. Quand ce type d'attitude devient répétitif, cela génère une forme de divorce entre le citoyen et l'Etat et souvent une perte de confiance. Dans ce cas, la réhabilitation de l'autorité et de la crédibilité de l'Etat prend le sens d'une mutation profonde des centres d'accueil du public. Pour réaliser cet objectif, l'action devra porter sur trois éléments essentiels qui sont : l'homme, les moyens de travail et le cadre d'accueil. Pour ce qui concerne le premier élément, les préposés au guichet d'accueil doivent être sélectionnés sur la base de critères rigoureux qui font référence à la loyauté, à la disponibilité d'écoute, à la qualité et à la célérité dans l'exécution d'un service. Ces fonctionnaires, dont la situation matérielle doit être nécessairement améliorée, devraient se sentir impliqués dans le combat que l'Etat aura à mener contre l'injustice et le peu de considération accordée au service public. Il y a donc nécessité d'une formation spécifique de ce personnel qui doit apprendre à écouter, à communiquer, à convaincre, à considérer autrui avec courtoisie. Le deuxième aspect a trait aux conditions de travail des fonctionnaires de la commune, à la pénibilité du travail manuel, à son caractère routinier, à la lassitude qui prend forme au fil de l'exercice de cette fonction et à la pression du public au niveau des guichets qui fait perdre aux fonctionnaires le sens des relations humaines. Dans ce cas, l'informatisation des services et l'amélioration du confort prend l'allure d'une action prioritaire, dont la finalité sera l'émergence d'un cadre convivial d'accueil propice à la sérénité dans les relations humaines. Le troisième point relève du souci de transmission d'une image positive d'un Etat rigoureux dans la gestion de la chose publique, respectueux de sa population et soucieux de mieux la servir. Cette image doit trouver sa traduction dans l'état des lieux, le traitement des espaces extérieurs, la propreté des services, le service d'accueil et l'orientation du public, la tenue du personnel et dans tous les éléments qui permettent au citoyen de mesurer le degré de considération qu'on lui accorde. Cette politique prend le caractère d'un investissement pour la réalisation d'un cadre convivial, qui facilite le rapprochement de l'Etat et du citoyen et les prédispose à engager ensemble des actions partenariales de nature multiforme, dont la finalité serait une meilleure cohésion sociale. Comment satisfaire la demande sociale ? Il faut tout d'abord considérer que les effets négatifs du pilotage à vue qui a caractérisé la gestion de nos communes, ont été largement compensés par le recours massif aux concours définitifs que l'Etat octroyait au titre des Plans communaux définitifs (PCD). Dès lors que ce soutien s'est amoindri, il ne pouvait y avoir qu'émergence des problèmes latents, et même si l'Etat n'est plus en mesure de satisfaire totalement les besoins exprimés, la revendication consiste en une meilleure justice dans la répartition des moyens, dans l'équité du bien être social. Or, comment peut-on être juste et équitable quand notre connaissance du milieu sur lequel nous voulons agir n'est qu'intuitive et forcément subjective devant comprendre : -ce qui motive l'angoisse et le désarroi de la jeunesse -ce que vivent les gens dans leur quotidien quand ils prennent le transport public ou quand ils vont chercher de l'eau, ramasser du bois pour se chauffer en milieu rural -les appréhensions des parents quand ils envoient leurs enfants à l'école, souvent éloignée de leurs domiciles en zones rurales et particulièrement de montagne, steppique ou saharienne -le quotidien des personnes âgées, des handicapés et tous ceux qui sombrent progressivement dans un état de détresse. L'inventaire non exhaustif de la morosité du quotidien du citoyen, donne toute sa signification stratégique à la connaissance scientifique du milieu social sur lequel on se doit d'agir, pour tendre vers l'idéal à la fois d'efficacité économique par une meilleure gestion et de cohésion sociale. Pour ce faire, il faut d'abord avoir l'humilité nécessaire pour reconnaître nos limites dans ce domaine et considérer que la « radioscopie sociale » est le premier élément d'une action pérenne qui tend vers cet objectif. Il faut pour cela donner la primauté aux études de cas et aux enquêtes pour établir une véritable «cartographie sociale» qui devra faire ressortir la spécificité dans la nature des problèmes de chaque quartier, en milieu urbain, et de chaque agglomération ou centre de vie, en milieu rural. C'est ainsi que l'on saura comment se distribuent géographiquement la demande de l'emploi, la pauvreté, la précarité des conditions de vie, les populations à risques etc. et que l'on pourra disposer de connaissances et de données pour la mise en œuvre des stratégies adéquates. Cependant, l'ensemble des actions citées précédemment implique un Etat de Droit, la démocratisation de la société pour une société participative et citoyenne donc la restructuration du système partisan ainsi que la société civile comme puissant réseau de mobilisation devant s'insérer dans le cadre d'une réorganisation tant gouvernementale autour de grands ministères que territoriale se fondant sur la régionalisation économique (pôles socio-économiques régionaux) à ne pas confondre avec l'avatar du régionalisme.