Depuis 1962, En Algérie et ailleurs, l'on a très souvent entendus dire que De Gaulle nous aurais donné l'indépendance. C'est complétement faux. On ne peut pas nous donner ce qui nous appartient déjà, notre patrie. Notre indépendance, et le recouvrement de notre souveraineté nous les avons arrachées de haute lutte. C'est un signal. Aussitôt les projectiles volent. Touché à la jambe, un gardien s'écroule tandis que ses collègues chargent. Un reporter raconte : Alors que je suis sous une averse de fonte, je vois un autre agent porter la main à son casque, la retirer et la regarder d'un air étonné : elle est pleine de sang. Il se retourne alors vers l'un de ses camarades qui le soutient et l'espace d'un instant j'aperçois son visage : il n'a plus de nez. Alors, emporté par la vague, je m'engage dans la rue du Chemin-Vert. Là, je vois un étudiant en scooter essayer de traverser la bagarre, recevoir à la volée un coup de matraque sur le crâne et tomber dans le ruisseau en criant: Je n'ai rien fait. En fait, en un instant, la bataille est devenue si confuse, succession de heurts sporadiques entre petits groupes, qu'il devient impossible de la décrire. Rue Saint-Gilles, le même reporter voit des jeunes manifestants assommer un agent de l'ordre avec son propre casque et un autre agent se faire lyncher sous la porte cochère d'un immeuble où il tentait de se réfugier. Mais, à quelques pas de là, ce sont les agents de l'ordre qui s'acharnent sur une sorte de monceau humain formé par une vingtaine de personnes qui, en fuyant, se sont heurtés à un cycliste qu'elles ont renversé et sur lequel elles se sont agglutinées... L'un des points les plus chauds a été la place Voltaire. Là, un instant, l'affrontement a failli tourner à la tuerie pure et simple. Comme sur le boulevard Beaumarchais, se déroulaient des bagarres confuses. Coiffés de cageots à légumes, les manifestants s'exposaient un instant aux matraques, puis se dérobaient. Or, alors qu'ils avaient déjà tenté d'arrêter un car de police, voici qu'un second véhicule tente, en zigzaguant, de s'ouvrir un passage à travers leurs rangs. Une voiture qui essayait de se garer lui bouche malencontreusement la voie. Aussitôt les manifestants l'assaillent et essaient d'extirper le chauffeur de sa cabine. Celui-ci craignant d'être lynché, sort son révolver et tire à plusieurs reprises. Plusieurs manifestants s'écroulent. Ce qui se passe alors est plus que confus. Les agents, semble-t-il, se sont rués au secours de leur collègue en danger d'être lynché et sont restés maîtres de la chaussée maculée de sang. Une chose est certaine : malgré leur fureur, ils n'ont pas perdu le contrôle au point de faire usage de leurs armes. En revanche, ils ne se sont pas fait faute de poursuivre et de traquer les fuyards jusque dans les couloirs du métro et sans trop prendre la peine de discerner entre les émeutiers et les voyageurs innocents. Mais c'est à la station Charonne, celle qui va laisser son nom à cette journée, que se produisent les scènes les plus effrayantes. Par prudence, afin que les manifestants ne puissent déboucher par-là, elle avait été fermée, et là aussi, d'abord, tout semblait devoir se terminer dans le calme. Peu après 19 h 30, les organisateurs venaient en effet, de donner le signal de la dispersion. Dans l'une de ses instructions datée du 2 septembre 1961, Salan précise que l'OAS ne comporte que deux "branches" : l'OAS Algérie-Sahara (OAS-AS) et l'OAS-Métropole (OAS-Métro). Il enjoint aux responsables de l'OAS-Métropole de rassembler les divers groupuscules qui opèrent en Frances isolément, afin de former un " bloc sans fissures ". Preuve nouvelle, s'il en était besoin que l'unanimité ne règne pas dans les rangs. Lui-même qui, en toute modestie, se fait appeler alors "Soleil", désigne un certain "Verdun", un général dont l'identité n'a pas été établie judiciairement et un certain " Raphaël " pour prendre, en son nom le commandement des opérations métropolitaines. Le capitaine Pierre Sergent - déserteur du premier REP élément actif du putsch manqué qui a été envoyé à Paris dès août 1961, en tant que "chef d'état-major" pour préparer le terrain, demeure, avec son adjoint le lieutenant Daniel Godot, le véritable patron. Plus tard, courant décembre 1961, "Soleil" enverra en France un deuxième chef d'état-major, André Canal, chargé de doubler Sergent. Ami du colonel Yves Godard, André Canal, dit le Monocle –il a perdu un œil- est un industriel algérois (directeur d'une société métallurgique) dont la fortune et les réseaux commerciaux sont d'une grande utilité à l'OAS. Son adjoint en France sera Jean-Marie Vincent, étudiant en droit d'Alger qui s'occupe de recruter un " réseau " à Paris parmi les étudiants. Ce sont ces jeunes dévoyés par l'OAS, qui exécuteront l'attentat dont va être victime la petit Delphine Renard. 7 février 1962 : plusieurs attentats à la bombe sont menés en région parisienne Celui visant l'appartement d'André Malraux à Boulogne-sur-Seine blesse grièvement une fillette de quatre ans, ce qui choque profondément l'opinion publique. Le lendemain, une manifestation visant à dénoncer les actions de l'OAS débouche sur le drame de la station de métro Charonne. 7 février 1962 : le capitaine déserteur de son poste en Allemagne (pour rejoindre le général retraité Salan) Philippe Le Pivain, fils du contre-amiral Le Pivain et chef de l'OAS du secteur de Maison-Carrée, banlieue d'Alger, repéré, est abattu sans sommation à un barrage par les gendarmes mobiles. À la suite de sa mort, le général Salan autorise le 23 février l'ouverture automatique du feu contre les gendarmes mobiles et les CRS. 12 et 18 février 1962 : Attaque de l'hôtel Radjah où se sont réfugiés environ 25 barbouzes par les commandos Delta. Les barbouzes sont décimés. 4 deltas tués. 16 février 1962 : 4 barbouzes tués dans leur voiture. 18 février 1962 : mitraillage d'un camp du FLN au Maroc par 2 chasseurs T6 "empruntés" à l'armée de l'air. 24 février 1962 : 20 morts dans une ratonnade à Alger, suite à l'assassinat par le FLN d'un chauffeur de taxi très populaire de Bab El-Oued, Angélo Victori. 25 février 1962 : attaque au bazooka d'une caserne de gendarmes mobiles de Maison- Carrée, les stocks d'essence et de munitions explosent. Création par le capitaine Gaston du maquis Lyautey dans la région de Bouira. Ils seront capturés par l'armée française le 10 mai 1962. 26 février 1962 : vague d'attentats contre les musulmans algérois. L'affrontement des communautés est engagé. Les attentats OAS ne sont plus seulement sélectifs. 27 février 1962 : enlèvement de l'ingénieur Petit-Jean par les barbouzes, soupçonnés d'appartenir à l'OAS. 5 mars 1962 : attaque de la prison d'Oran ; l'OAS y exécute 2 tueurs du FLN qui avaient été graciés. Nuit bleue à Alger: 130 explosions de plastic. 8 mars 1962 : Roger Frey, ministre de l'Intérieur, donne l'ordre de mettre fin aux opérations des barbouzes et de rapatrier les survivants. Le bilan est d'environ 100 barbouzes tués, soit la moitié des effectifs envoyés. 9 mars 1962 : fusillade à Oran provoquant neuf morts. L'hôtel Radjah des barbouzes est rasé par 50 kg de plastic. 15 mars 1962 : assassinat de six membres des centres sociaux d'Algérie, dont l'écrivain Mouloud Feraoun, accusés par l'OAS de soutien actif aux réseaux FLN, suivi par le mitraillage de musulmans pris au hasard dans une file d'attente. 18 mars 1962 : signature des Accords d'Evian. Les forces de l'ordre françaises et une partie de l'armée collaborent avec l'ALN pour lutter contre l'OAS, chose que les barbouzes avaient déjà faite dès leur arrivée en Algérie en 1961. 20 mars 1962 et jours suivants : ultimatum lancé par l'OAS aux unités françaises pour qu'elles quittent Bab El-Oued, fief de l'OAS. Les actions menées conduisent à la mort de plusieurs gendarmes et appelés du contingent. L'armée réplique en envoyant des blindés. De Gaulle obtient les pleins pouvoirs pour lutter contre l'OAS. 21 mars 1962 : Attaque de l'émetteur pirate de l'OAS à Oran par les forces de l'ordre. 22 mars 1962 : Attaque d'une patrouille de half-track des gendarmes mobiles par 20 hommes des commandos Z de l'OAS à la sortie du tunnel des facultés. Tous les prisonniers FLN sont amnistiées. 23 mars 1962 : Bab El Oued est soumis au couvre-feu permanent, avec une heure par jour de sortie autorisée. Des barrages sont édifiés à l'entrée du quartier par l'OAS. Un camion d'appelés du contingent est intercepté. Ils ne veulent pas donner leurs armes, 7 morts. La répression fait 20 morts et 80 blessés, selon le bilan officiel. 25 mars 1962 : bombardement au mortier d'un quartier musulman à Oran, provoquant une quarantaine de morts. 25 mars 1962 : arrestation du général Jouhaud, du lieutenant de vaisseau Pierre Guillaume (le Crabe-tambour), et du commandant Gamelin. 26 mars 1962 : une manifestation pacifique de Français d'Algérie, visant à forcer le blocus de Bab El-Oued par l'armée est réprimée dans le sang rue d'Isly. Au moins 62 morts. Attaque du quartier par les blindés et mitraillage par l'aviation. Les commandos OAS, soutenus par la population et par une partie de l'armée qui tarde volontairement à boucler l'encerclement, s'enfuient par les égouts. (A suivre) [email protected] (*) Auteur, écrivain, Ancien moudjahid, membre ALN.