L'Iran se trouve à un carrefour de son histoire, où le 19 mai 2017, 56,4 millions d'électeurs ont été appelés aux urnes pour élire leur nouveau Président. Si la situation générale, est bien meilleure que par le passé, l'inflation étant maîtrisée, le chômage est relativement élevé. Pour les élections de mai 2017, il s'agit surtout d'un duel entre Hassan Rohani, 68 ans, réformateur élu en 2013 et Ebrahim Raïssi, ancien procureur général de la République islamique conservateur de 56 ans. Selon les premières informations partielles (Reuters) du 20 mai 2017, le président iranien sortant Hassan Rohani était en passe samedi d'être largement réélu dès le premier tour de la présidentielle de vendredi, totalisant environ 56% des voix face à son adversaire. Quelque soit les résultats, après les élections les perspectives de croissance à moyen et long termes restent tributaires du rythme de réintégration de l'Iran dans l'économie mondiale, à accélérer les réformes détaillées dans le nouveau plan de développement quinquennal. Et surtout les mettre en œuvre et ce afin de dynamiser les segments hors hydrocarbures en créant des conditions équitables entre les acteurs existants et les nouveaux venus, (les gagnants des réformes de demain ne sont pas ceux d'aujourd'hui) mais aussi s'attacher à améliorer l'environnement des affaires et l'efficacité du marchés du travail conciliant flexibilité et équité et intégrer la population active de la sphère informelle au sein de la sphère réelle. 1.-Données géographiques et politiques de l'Iran La République islamique d'Iran, a été proclamée le 1er avril 1979. Sa population est passée de 21 millions d'habitants en 1960 à 28 en 1970, à 38 en 1980, 56 en 1990, 65 en 2000, 74 en 2010 à 80 en 2016 avec un extrapolation de 84 en 2020 pour une population urbaine au 01 janvier 2016 de 73,4% du total de la population , une espérance de vie de 71,15 ans et place le pays au deuxième rang, derrière l'Egypte au niveau de la région. L'Iran, histoire millénaire ( civilisation perse) un des pays les plus montagneux au monde, ayant permis à former l'histoire économique et politique du pays, est située en Asie, entre l'Irak à l'Ouest, et l'Afghanistan et le Pakistan à l'Est disposant de deux façades maritimes sur la mer Caspienne au Nord et sur le golfe Persique et le golfe d'Oman au Sud. L'Iran a une superficie de 1 648 000 km2 avec pour capitale Téhéran et ses principales villes sont Machhad, Ispahan, Karaj, Tabriz. L'Iran détient la quatrième réserve pétrolière mondiale avec plus de 160 milliards de barils ( 13/14% des réserves mondiales). D'une manière générale l'Iran est un acteur stratégique qui pourrait aider à stabiliser les tensions dans la région et aura un impact sur l'offre du pétrole. L'Irak peut produire 8/9 millions de barils/jour et l'Iran qui produisait vers 2011/2015 plus de 2,5 millions de barils jour peut produire plus de 5/6 millions de barils/jour. Ces facteurs s'ajoutent à une production hors Opep , part de marché de 67% contre 33% Opep, sans compter les nouveaux arrivés sur le marché mondial, l'effort de guerre de l'Arabie saoudite qui ne veut pas en plus perdre des parts de marché, la forte production russe ( plus de 10 millions de barils/jour), le pétrole/gaz de schiste américain qui a bouleversé toute la carte énergétique mondiale, qui exportera vers l'Europe. Elle possède également le deuxième réservoir de gaz traditionnel avec plus de 34 000 milliards de mètres cubes gazeux soit plus de 16% des réserves mondiales, sans compter que l'Iran si les accords sont respectés, aura alors accès avec des données contradictoires entre 50/100 milliards de dollars bloqués dans les banques étrangères, qui pourront augmenter ses exportations et attirer les investissements étrangers. L'Iran a d'importantes ressources. Elle est située sur la ceinture des réserves de cuivre de la planète et bénéficie de réserves considérables d'autres minéraux, tels que le fer, l'aluminium, le plomb et le zinc et un pays avantagé par des frontières qu'il partage avec 15 pays. Le chef de l'Etat est le Guide suprême de la Révolution islamique, nommé à vie par l'Assemblée des experts et le Président est Hassan Fereidun Ruhani depuis le 3 août 2013. Le chef de l'Etat est le Guide suprême de la Révolution islamique, nommé à vie par l'Assemblée des experts. Le Guide suprême est le commandant en chef de l'armée, il contrôle les services des renseignements de l'armée et les opérations de sécurité, il est aussi le seul à avoir le pouvoir de déclarer la guerre. Le chef du gouvernement est le président, il est élu au suffrage universel pour un mandat de quatre ans. Le Conseil des ministres est sélectionné par le président, avec l'approbation de la législature. Le président détient le pouvoir exécutif, mis à part dans les domaines qui sont les prérogatives du Guide Suprême. Le pouvoir législatif est monocaméral. Le Parlement est constitué de l'Assemblée consultative islamique, qui compte 290 sièges et dont les membres sont élus au suffrage universel pour quatre ans. Le Parlement doit faire valider les lois par le Conseil des gardiens qui vérifie si les lois proposées ne vont pas à l'encontre des principes islamiques. Le Parlement a un pouvoir réel en Iran. Il peut notamment décider du renvoi d'un ministre. Le président ne peut dissoudre le Parlement directement mais il peut en recommander la dissolution au Guide suprême. Rappelons que toute la communauté internationale excepté Israël, dont l'Algérie avait salué la levée effective de l'embargo contre l'Iran après que l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) ait attesté le 16 janvier 2016 des dispositions prises par Téhéran pour ne pas être en capacité de produire une bombe nucléaire. Après près d'une décennie d'isolement diplomatique, l'Iran a renoué avec la communauté internationale. Dès son élection en juin 2013, le président Rohani avait exprimé son souhait d'améliorer les relations de l'Iran avec la communauté internationale notamment sur le dossier du nucléaire, dégradées au cours des présidences précédentes, tout en essayant d'apaiser ses relations avec les puissances régionales notamment ses relations avec les puissances sunnites, en particulier l'Arabie saoudite. Selon bon nombre d'experts militaires, le Yémen, à l'extrémité de la péninsule arabique et chasse gardée de l'Arabie saoudite via les USA, n'est pas une priorité stratégique pour Téhéran, bien moins en tout cas que l'Irak ou la Syrie, où l'Iran est un acteur majeur des crises en cours. Sur le plan régional, c'est un acteur clef comme en témoigne sa priorité qui est la lutte contre Daech. L'Iran a apporté son soutien au régime irakien mais également depuis le déclenchement de la crise syrienne son soutien à Damas. Mais une position qui peut évoluer selon ses intérêts stratégiques. 2.- Les données socioéconomiques et financières Avec un PIB estimé à 412,2 milliards de dollars en 2016, l'Iran est la deuxième économie de la région du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord, après l'Arabie saoudite. Le taux de croissance ce calculant par rapport à la période antérieure, a été de 4,6% en 2015, 4,5% en 2016 donc traduisant un dynamisme, et devrait être de 5,2% en 2017, 4,8% en 2018, 4,5% en 2019. Le PIB par habitant en 2015 était de 5306 dollars US. Selon le FMI, le taux d'inflation a été de 15,6% en 2014, 12,0% en 2015, 8,9% en 2016, un chiffre inédit depuis 25 ans, sous l'effet du durcissement de la politique monétaire et une prévision de 8,2% en 2017. Le taux de chômage a été de 12,20% en 2012, 10,60% en 2014, 11,67% en 2015 et 11,3% en 2016 après avoir connu au deuxième trimestre 2016, 12,7 %, son plus haut niveau depuis trois ans (soit 3,3 millions de chômeurs), s'expliquant en grande partie par l'augmentation du taux d'activité de la population, à 40,4 % contre 35,4 % en janvier-mars 2014. Pourtant, il y a lieu de souligner l'importance accordée à l'éducation où le nombre d'étudiants dans l'enseignement supérieur a nettement augmenté au cours des 20 dernières années. En 2015, 4.8 millions d'Iraniens ont entamé des études universitaires, représentant près de 6.2% de la population totale (contre environ 3.5% in France). Quant aux indicateurs financiers, le Rial iranien (IRR) a été coté à 14777,90 pour un euro en 2011, 15643 un euro en 2012, 24456 un euro en 2013, 34653 un euro en 2014, 32188 un euro en 2015 et le 19 mai 2017 à 36335 IRR un euro donc une très forte dépréciation de la monnaie iranienne. Le solde courant en 2014 a été de 3,8% par rapport au produit intérieur brut (PIB), 0,4% en 2015, et moins -0,6% en 2016 avec une prévision de zéro (O%) en 2017, tandis que la dette publique/PIB a été de 15,6% en 2014, 17,1% en 2015, 17,5% en 2016 avec une prévision de 17,7% en 2017. La balance commerciale de l'Iran avec une part du commerce extérieur dans le PIB de plus de 31% (Banque mondiale, 2015) est structurellement positive, les exportations pétrolières ayant augmenté de 70% en 2016 tendance qui devrait se maintenir en 2017 avec un excédent commercial pour 2016 de 1,8 milliard USD. Les principaux clients de l'Iran sont la Chine, l'Irak et les Emirats arabes unis. En plus du pétrole et du gaz, l'Iran exporte principalement des pistaches, des tapis, des produits pétrochimiques, des produits chimiques organiques, de l'aluminium, des matériaux plastiques. Ses trois principaux fournisseurs sont les Emirats arabes unis (qui jouent le rôle de centre de réexportation), l'Union européenne et la Chine. Les biens principalement importés sont les machines, le fer et l'acier, l'équipement électrique et électronique et les céréales. L'économie iranienne reste largement dominée par le secteur public qui contrôle l'essentiel de l'économie avec un secteur bancaire fragile. Structurellement, l'économie est dépendante des revenus pétroliers qui représentent près de la moitié des recettes de l'Etat. Ainsi, la levée des sanctions internationales en juillet 2015 a permis la reprise du commerce extérieur et de l'investissement( le stock d'IDE en 2015 a été de 45 097 millions USD ), tandis que les exportations d'hydrocarbures ont retrouvé leur niveau précédant ces sanctions. Le secteur agricole dont les principales récoltes sont le pistache (le plus grand producteur mondial), le blé, le riz, les oranges, le thé et le coton contribuent à 9,3% du PIB en 2016, et emploie 17,9% de la population active. La production pétrolière, qui a connu une chute drastique en 2012 suite à la mise en place de sanctions internationales, a rapidement repris depuis leur levée, atteignant en mars 2017 son plus haut niveau de 7 dernières années (3,8 millions de barils par jour). Le secteur industriel emploie 33,8 % de la population active et contribue à 38,2% du PIB. L'industrie des textiles est le deuxième secteur le plus important après le pétrole. Le raffinage du sucre, la préparation industrielle des aliments, les produits pétrochimiques, le ciment et la construction sont les autres principales industries. L'artisanat traditionnel, comme le tissage de tapis, la fabrication des céramiques, la soie et les bijoux, sont aussi vitaux pour l'économie. Le secteur tertiaire contribue à 52,4% du PIB et emploie 48,3% des actifs. 3.- Les perspectives de l'économie iranienne Afin de diversifier son économie, le gouvernement iranien a décidé de lancer un plan de privatisations et d'ouvrir à l'investissement étranger la plupart des secteurs de son économie. Ainsi, en 2016 les projets d'IDE en Iran ont sensiblement augmenté. Le gouvernement iranien via la Banque centrale entend ainsi, en accord avec les préconisations du FMI, mener une recapitalisation des banques en difficulté. L'Etat devrait mettre en œuvre de nouvelles réformes pour stimuler le privé dès lors que le secteur public n'a plus les ressources pour créer les emplois nécessaires. (A suivre) Dr Abderrahmane Mebtoul, professeur des universités, expert international