Le roi de Jordanie, Abdallah II, a appelé mardi à «une révision complète» d'une réforme fiscale sur fond de contestation sociale, conseillée par le Fonds monétaire international (FMI), qui a déjà conduit à la démission du Premier ministre. «Le gouvernement doit lancer immédiatement un dialogue en coordination avec le Parlement et la participation des partis politiques, syndicats et organisations de la société civile pour finaliser le projet de loi sur l'impôt sur le revenu», a écrit le souverain jordanien dans une lettre désignant le ministre de l'Education Omar al-Razzaz en remplacement du chef de gouvernement démissionnaire, Hani Mulqi. Cet appel intervient quelques heures après une mise en garde du souverain contre un saut «dans l'inconnu» si la Jordanie échouait à résoudre la crise sociale qui a conduit à des manifestations inédites. Dans la nuit de lundi à mardi, et malgré la démission du Premier ministre, environ 2 000 personnes se sont de nouveau rassemblées à Amman pour réclamer le retrait du projet de loi élargissant l'impôt aux salaires modestes et augmentant son taux pour certains particuliers et entreprises. Ils ont scandé des slogans hostiles au gouvernement et au FMI, qui pousse la Jordanie à des réformes structurelles pour soutenir l'économie de ce pays. "La Jordanie est aujourd'hui à la croisée des chemins: soit elle parvient à sortir de la crise et à offrir une vie digne à ses citoyens, soit, Dieu nous en préserve, elle va vers l'inconnu", a déclaré lundi soir le roi Abdallah II, selon des propos relayés par l'agence de presse jordanienne Petra. Abdallah II de Jordanie a chargé lundi Omar al Razzaz, un ancien économiste de la Banque mondiale, de former un nouveau gouvernement après la démission de Hani Moulki, suite aux manifestations contre la politique d'austérité. Démission du Premier ministre Le Premier ministre jordanien Hani Mulqi a démissionné lundi sur fond de protestations sociales qui secouent le pays depuis plusieurs jours, selon une source gouvernementale. «Le Premier ministre Hani al Mulqi a présenté cet après-midi sa démission au roi, qui l'a reçu au palais royal à Amman (...) et l'a acceptée», a indiqué cette source citée par les médias. Plus tôt, le roi de Jordanie Abdallah II avait convoqué son Premier ministre. «Le roi Abdallah II a convoqué le Premier ministre Hani Mulqi ce lundi avant midi (09H00 GMT) et cela pourrait aboutir à sa démission», avait dit une source gouvernementale citée par des médias. M.Mulqi, à la tête du gouvernement depuis mai 2016, fait face depuis plusieurs jours à une vague de contestation après des mesures dénoncées par la population, notamment un projet d'impôt sur les revenus et des hausses des prix du carburant et de l'électricité. Dimanche soir, quelque 5 000 manifestants se sont rassemblés devant les locaux du Premier ministère à Amman, réclamant le départ de M. Mulqi. Ces manifestations, les plus importantes en cinq ans, se déroulent depuis plusieurs jours, de nuit, à Amman et dans d'autres villes du royaume, selon les médias.Des centaines de manifestants sont également descendus dans la rue dans les villes de Zarqa et Balqa (est), Maan, Karak (sud), Mafraq, Irbid et Jerach (nord). Quelques heures auparavant, des négociations avaient échoué entre représentants des syndicats et M. Mulqi. Le projet de loi fiscal a été présenté sur les recommandations du Fonds monétaire international (FMI). Il prévoit une augmentation d'au moins 5% des impôts pour les particuliers et impose désormais les personnes ayant un salaire annuel de 8.000 dinars (environ 9.700 euros). Les impôts des entreprises doivent eux augmenter de 20 à 40%. Au Parlement, ce projet de loi est toutefois loin de faire l'unanimité Sur les 130 députés, 78 se sont dits opposés au texte qui, selon eux, ne sert pas les intérêts économiques et sociaux des Jordaniens. Une première grande manifestation organisée par les syndicats s'est tenue mercredi dernier, puis après l'annonce de l'entrée en vigueur jeudi d'augmentations des prix du carburant et de l'électricité. Cette dernière mesure a finalement été gelée. Le FMI a approuvé en 2016 une ligne de crédit de 723 millions de dollars sur trois ans pour le royaume. En contrepartie, Amman s'est engagé à mettre en place des réformes structurelles et à réduire progressivement sa dette publique à 77% du PIB d'ici 2021, contre 94% en 2015.