La politique des subventions ciblées suppose une large concertation sociale et un système d'information fiable en temps réel déterminant le poids de la sphère informelle dans la distribution des revenus et la répartition du revenu national et du modèle de consommation pour ne pas pénaliser tant les couches défavorisées que les couches moyennes par un nivellement par le bas (voir A. Mebtoul www.google -1992). Comme je l'ai analysé dans plusieurs contributions nationales et internationales, le montant des subventions et des transferts sociaux par an, très important par rapport au PIB, a eu un impact peu perceptible au niveau de la population. Il n'est peut-être pas juste que tout le monde puisse bénéficier de certaines subventions, quelle que soit leur situation financière. Ainsi, se pose le problème de l'efficacité de toutes ces subventions sur le producteur local et le consommateur final. La mise en place de subventions ciblées suppose à la fois une large concertation sociale loin de la pression des couches rentières et un système d'information fiable au temps réel mettant en relief la répartition du revenu national et du modèle de consommation par couches sociales posant la difficulté de l'intégration de la sphère informelle (revenus informels). Mais cela ne peut durer. Les subventions généralisées faussent l'allocation rationnelle des ressources rares et ne permettent pas d'avoir une transparence des comptes, fausse les normes de gestion élémentaires. Les prévisions tant au niveau micro que macroéconomique aboutissent au niveau des agrégats globaux (PIB, revenu national) à une cacophonie additionnant des prix du marché et des prix administrés. Ils découragent la production locale avec un gaspillage croissant des ressources financières du pays. Comme se pose cette question stratégique : qu'en sera-t-il avec après le dégrèvement tarifaire avec l'Europe horizon 2020 et son éventuelle adhésion à l'OMC où les produits énergétiques sont également concernés notamment par la suppression de la dualité du prix du gaz ? Aussi afin d'éviter de vives tensions économiques et sociales il faut éviter la précipitation et ne pas se tromper de cibles stratégiques pour paraphraser les stratèges militaires. Il ne faut pas se focaliser uniquement sur les subventions mais revoir la gouvernance actuelle pour plus de cohérence et de visibilité de la politique économique et sociale, une lutte contre la corruption et les surcoûts. Ces montants sont de loin supérieurs au montant des subventions, sans compter le facteur essentiel du développement, le retour de la confiance de la population en ses institutions. Aussi, se pose cette question stratégique pour l'Algérie avec la chute du cours des hydrocarbures, l'Etat pourrait ne pas avoir les moyens de continuer à subventionner certains produits alimentaires, comme se pose actuellement l'alimentation des caisses de retraite dont un dossier, sous ma direction, est en cours d'élaboration L'instauration d'une chambre nationale de compensation indépendante devrait permettre des subventions ciblées par un système de péréquation intra-socioprofessionnelle et interrégionale. Mais cela dépasse l'aspect technique et implique forcément un réaménagement profond de la logique du pouvoir algérien reposant sur les forces sociales réformistes, animées par le secteur productif et son soubassement l'économie de la connaissance, loin du pouvoir des couches rentières tissant des relations dialectiques avec la sphère informelle spéculative. Aussi, il y a lieu d'éviter les effets d'annonce et les décisions précipitées. Cette opération, je l'ai dit, est techniquement impossible sans un système d‘information fiable en temps réel, mettant en relief la répartition du revenu national par couches sociales et par répartition régionale : combien sont-ils à percevoir moins de 20 000 DA par mois net ? Combien sont-ils à toucher entre 20 000 et 50 000 DA ? Combien sont-ils à être payés entre 50 000 et 100 000 DA ? Il faut avoir des réponses précises à ce genre de questions. Cette opération est également impossible sans quantifier la sphère informelle qui permet des consolidations de revenus. Le lieu du dialogue naturel est le conseil économique et social consacré par la nouvelle Constitution qui devrait regrouper les meilleures compétences et toutes les composantes de la société représentatives malheureusement gelé depuis des années où serait discutée et élaborée une politique réaliste des subventions ciblées. En résumé, l'objectif de mettre en place une politique cohérente des subventions suppose un large débat et une concertation politique, sociale et économique. Aussi, il y a urgence de dépasser le statu quo actuel suicidaire et change de politique économique pour l'émergence d'une économie hors hydrocarbures et ce pour le bien être de l'Algérie et des générations futures, mettant fin au cancer de l'économie de la rente qui se diffuse dans la société par des subventions généralisées et des versements de traitements sans contreparties productives ? Face à la concentration excessive du revenu national au profit d'une minorité rentière, renforçant le sentiment d'une profonde injustice sociale, l'austérité n'étant pas partagée, la majorité des Algériens veulent tous et immédiatement leur part de rente, reflet du divorce Etat-citoyens, quitte à conduire l'Algérie au suicide collectif. Or, les hydrocarbures traditionnels pourraient s'épuiser horizon 2030 au moment où la population algérienne sera d'environ 50 millions d'habitants. Pouvant découvrir des milliers de gisements non rentables en référence au coût et au vecteur prix international du bouquet énergétique, nous devrions assister à une recomposition du pouvoir énergétique mondial entre 2020-2030. Professeur Abderrahmane Mebtoul, expert international