Il faut reconnaître les résultats mitigés de l'Accord de Barcelone et de l'initiative de la réunion pour la Méditerranée dont d'ailleurs j'ai été un des invités 1- Pourquoi une réunion des 5+5 ? Il est apparu plus propice de restreindre à certains pays pour aboutir à des résultats concrets au groupe 5 + 5 (Portugal, Espagne, France, Italie, Malte pour la rive Nord, Mauritanie, Maroc, Algérie, Tunisie, Libye,pour la rive Sud) et d'impliquer la société civile pour le prochain sommet de la société civile, acteur majeur en ce XXIème siècle, des deux rives de la méditerranée occidentale qui se tiendra à Marseille en juin 2019. 2- Qu' en est-il de la présence et du rôle de l'Algérie ? Son Excellence, le Président de la République, Monsieur Abdelaziz Bouteflika, m'a désigné le pour diriger la délégation algérienne à cette rencontre, groupe 5 + 5. L'installation a été annoncée officiellement au siège du Ministère des Affaires étrangères le 25 décembre 2018, au nom de son Excellence Mr le Président de la République, par Mr Abdelkader Messahel ministre des Affaires étrangères, en présence notamment de l'ambassadeur d'Algérie en France et du directeur général du département Europe du MAE. Je tiens à remercier vivement son Excellence Mr le Président de la République pour la confiance qu'il m'a témoignée. La philosophie diplomatique et sécuritaire de l'Algérie a toujours été d' éviter les fractures contemporaines à partir d'un dialogue productif dans le cadre d'un conflit entre différents pays. L'Algérie est un acteur clef reconnu par la communauté internationale comme facteur de la stabilisation de la région tant méditerranéenne que de l'Afrique e til ya leu de souligner les efforts importants de l'ANP et de toutes nos forces de sécurité pour la stabilisation de la région, devant d'ailleurs à l'avenir mutualiser les renseignements et les dépenses dans le cadre d'une large coopération internationale, pour un co-développement, les coûts étant intolérables dans le temps. L'Algérie a toujours été au carrefour des échanges en Méditerranée. De Saint-Augustin à l'émir Adkeldader, les apports algériens à la spiritualité, à la tolérance et à la culture universelle ne peuvent que nous prédisposer à être attentifs aux fractures contemporaines. L'ère des confrontations n'a eu cours que parce que les extrémismes ont prévalu dans un environnement fait de suspicion et d'exclusion. Connaître l'autre, c'est aller vers lui, c'est le comprendre, mieux le connaître. Evitons toute intolérance où certaines civilisations sont supérieures à d'autres: car, il y a de bonnes et de mauvaises civilisations, où en ce monde interdépendant, nous assistons à la formation de plus en plus étendue d'une civilisation de l'universel qui n'est que la résultante et le fruit des apports et des contributions des différentes civilisations humaines depuis la nuit des temps car pou reprendre Roger Garaudy, «il n'y a de véritable dialogue des civilisations que si chacun est pénétré de cette certitude que l'autre homme, c'est ce qui manque pour être pleinement un homme.» 3- D'une manière plus précise le calendrier de cette rencontre ? Cette rencontre regroupera les chefs d'Etat et de gouvernement, le Président de la Banque mondiale, les présidents de la BEI, de la BERD, le directeur général de l'OCDE et les acteurs non étatiques de la société civile du groupe 5+5 dans toute leur diversité, économique, sociale, culturelle. Son lancement politique aura leu à l'occasion de la 15ème réunion des ministres des Affaires étrangères du dialogue 5+5 le 18 janvier 2019 à la Valette. Cinq groupes ont été constitués, le Maroc dirigera le volet économie et innovation, le Portugal, la culture, l'Italie, le développement durable, Malte jeunesse et mobilité, l'Algérie a eu le volet le plus important, ayant été chargée du dossier transition énergétique :, projets de coopération au niveau de la région, énergies classiques, énergies non conventionnelles, énergie renouvelable, efficacité énergétique, et d'une manière générale proposer le nouveau modèle de consommation énergétique 2020/2030. Les cinq chefs de délégation devront réaliser une synthèse qui sera présenté aux chefs d'Etat et de gouvernement des deux rives de la Méditerranée le 24 juin 2019 à Marseille. Plusieurs rencontres de coordination entre janvier et juin 2019, avec les pays du contour méditerranéen auront lieu. Les chefs de délégation des pays concernés par cette rencontre rencontreront son Excellence le président français Mr Emmanuel Macron, coordinateur de cette rencontre prochainement à Paris pour définir la stratégie finale courant janvier début février en principe. Ensuite une réunion de coordination aura lieu pour présenter la synthèse des cinq groupes qui permettra de lancer un appel de la société civile devant les chefs d'Etat le 24 juin 2019, pour une prospérité partagée. L'Allemagne est partie prenante de cette rencontre. 4- Quel rôle des sociétés civiles pour la paix et le développement ? Il existe un lien dialectique entre sécurité et développement alors que nous assistons à un monde cruel et dangereusement déséquilibré. L'objectif stratégique est de repenser l'actuel système économique mondial, et donc la représentation au niveau des institutions internationales, le système actuel favorisant la bipolarisation Nord/Sud, la pauvreté préjudiciable à l'avenir de l'humanité avec des poches de pauvreté croissant même dans les pays développés, un phénomène d'ailleurs accéléré par les gouvernances les plus discutables de la part de certains dirigeants du Sud. La population mondiale s'élève actuellement à 7,6 milliards et devrait atteindre 8,6 milliards en 2030, 9,8 milliards en 2050 et 11,2 milliards en 2100, selon un récent rapport des Nations Unies. Or, sur plus de 7 milliards d'âmes, les 2/3 sont concentrées au sein de la zone Sud avec moins de 30 % des richesses mondiales : Il existe des spécificités sociales nationales dont il convient de tenir compte car elles sont source d'enrichissement mutuel, permettant de communiquer avec des cultures lointaines à travers des réseaux décentralisés auxquels la société civile – intellectuels, diplomates, entrepreneurs, médias grâce au rôle important de l'Internet – doit jouer une fonction stratégique, car les nouvelles relations internationales fondées sur les relations personnalisées entre chefs d'État ont de moins en moins d'effets. Ces réseaux doivent favoriser les liens communicationnels, les aires de liberté dans la mesure où les excès du volontarisme collectif inhibent tout esprit de créativité. Dans ce cadre, il y a lieu d'accorder une attention particulière à l'action éducative, car l'homme pensant et créateur devra être à l'avenir le bénéficiaire et l'acteur principal du processus de développement. C'est pourquoi je préconise la création de grands pôles par grands continents (universités et de centres de recherches) loin de tout esprit de domination, comme moyen de fécondation réciproque des cultures, et la concrétisation du dialogue soutenu pour éviter les préjugés et les conflits sources de tensions inutiles. La méditerranée présente une expérience millénaire d'ouverture et d'enrichissements mutuels, tant sur le plan économique que culturel. Pour un devenir commun, il est indispensable que la majorité des dirigeants des deux rives de la Méditerranée développent toutes les actions qui peuvent être mises en œuvre pour réaliser des équilibres souhaitables à l'intérieur de cet ensemble, et ce afin de favoriser six objectifs solidaires. - Premièrement : l'État de droit et la démocratie politique, en tenant compte des anthropologies culturelles car une société sans sa culture et son histoire est comme un corps sans âme. - Deuxièmement : l'économie de marché concurrentielle à vocation sociale, loin de tout monopole, qu'il soit public ou privé. -Troisièmement : la concertation sociale et les échanges culturels par des débats contradictoires. - Quatrièmement :la mise en œuvre d'affaires communes, en n'oubliant jamais que les entreprises sont mues par la seule logique du profit et que dans la pratique des affaires il n'y a pas de sentiments. Mais l'on doit éviter que la logique du profit ne détruise les liens sociaux, d'où l'importance stratégique de l'État régulateur conciliant les coûts sociaux et les coûts privés. - Cinquièmement : intégrer l'émigration. Ciment des liens culturels, elle peut être la pierre angulaire de la consolidation de cette coopération et de ce dialogue nécessaire, du fait qu'elle recèle d'importantes des potentialités cultuelles, économiques et financières. Sixièmement : tout en tenant compte effectivement de sa situation socio-économique, l'Occident doit favoriser la libre circulation des personnes, tout en engageant un véritable partenariat gagnant/gagnant dans le cadre d'un co-développement global, tenant compte du nouveau défi écologique qui devrait entraîner des mutations tant économiques que socioculturelles et politiques. Pour le cas Algérie, elle sera ce que les Algériennes et les Algériens voudront qu'elle soit. Sans de profondes réformes structurelles, le pays risque d'aller vers le FMI horizon 2022 Abderrahmane Mebtoul Professeur des Universités, expert international