Après les impacts mitigés de l'Accord de Barcelone et de l'Union pour la Méditerranée ( UPM), une importante rencontre aura lieu le 24 juin en France afin de dynamiser la coopération au niveau des deux rives de la Méditerranée occidentale. Le recentrage sur la Méditerranée occidentale s'accompagne de la prise de conscience que les riverains de ce bassin partagent des intérêts communs majeurs, notamment dans le champ économique, mais également sécuritaire afin d'établir une «association renforcée» entre les riverains de la Méditerranée occidentale, l'objectif étant «résolument politique» pour éviter une fracture Nord-Sud porteuse de toutes les dérives et de tous les extrémismes, pouvant entraîner des déséquilibres majeurs. Les chefs de délégation des pays concernés par cette rencontre rencontreront son Excellence le président français Mr Emmanuel Macron, coordinateur de cette rencontre début janvier 2019 à Paris et éventuellement la chancelière allemande co-coordinatrice, Angela Merkel pour l'Europe des 27, pour définir la stratégie finale. Ensuite une réunion de coordination aura lieu à Tunis pour présenter la synthèse des cinq groupes qui permettra de lancer un appel de la société civile devant les chefs d'Etat le 24 juin 2019, pour une prospérité partagée. 2- L'Algérie, partenaire stratégique de l'Europe 2.1- Qu'en est-il des relations entre l'Europe et l'Algérie, dont l'Europe occidentale représente une fraction importante de ses échanges économiques mais dont le cadre englobe les volets politiques et sécuritaires. La politique européenne de voisinage conforte le rôle majeur que peut jouer l'Algérie dans la stabilité tant euro-méditerranéenne qu'africaine. Les négociations en cours concernant l'Accord de libre-échange, selon les informations recueillies auprès de la CEE devraient insister sur un partenariat gagnant gagnant pour une prospérité partagée, avec un assouplissement de certains articles à la demande de la partie algérienne, sous réserve que l'Algérie approfondisse ses réformes structurelles, l'Accord cadre restant le même. Il s ‘agira pour l'Algérie, garant de sa stabilité de la région, d'encourager le développement des libertés dans tous les domaines politiques, économiques, social et culturel donc de mettre en place les mécanismes de l'Etat de Droit et de la démocratisation au niveau interne afin de réaliser un développement durable pour sa population. Sur la situation politique internationale, l'Algérie est invitée par l'Union européenne à devenir membre des Conventions ouvertes aux pays tiers, l'encourageant à entamer un dialogue bilatéral sur la migration légale et la mobilité, le trafic des migrants, la réadmission, le retour volontaire, la coopération régionale pour la gestion des frontières, le traitement des flux mixtes de migrants et la protection internationale de ceux qui en ont besoin, l'amélioration de la contribution des citoyens algériens résidant en Europe au développement de l'Algérie. Sur le dérèglement climatique, lors de la conférence internationale qui s'est tenue à Paris (COP21) et au Maroc (COP22), l'UE note avec satisfaction que la partie algérienne a soumis des données utiles sur le dérèglement climatique la concernant (INDC) ainsi qu'un plan national sur le climat, affirmant sa disponibilité à accompagner l'Algérie. C'est dans ce cadre que pour l'union européenne, l'Algérie est un partenaire stratégique dans le domaine énergétique tant dans le domaine des hydrocarbures traditionnels, ayant toujours honoré ses engagements internationaux et disposant d'importantes potentialités pour le développement des énergies renouvelables constitue un objectif stratégique. Concernant la coopération dans les domaines sécuritaire et judiciaire, jugée essentielle par l'UE qui souhaite établir avec l'Algérie un «dialogue ciblé et approfondi pour une lutte contre le terrorisme, note positivement l'engagement de l'Algérie dans le processus de révision de la Politique européenne de voisinage (PEV) et prend note du document informel ('non-paper') élaboré à Alger, tout en suivant avec intérêt les dialogues que l'Algérie maintient aussi avec l'OTAN et l'OSCE. Elle salue le rôle constructif que l'Algérie joue au sein de l'Union africaine en matière de paix et sécurité. Comme l'UE soutient et encourage l'implication de l'Algérie dans les instances de concertation euro-méditerranéennes, notamment le dialogue 5 + 5 avec l'Union du Maghreb arabe (UMA). Partageant la préoccupation de l'Algérie des menaces qui sévissent dans la région notamment au Sahel, l'UE tient à saluer tout en soutenant pleinement la médiation de l'Algérie et ses efforts en vue de trouver une issue à la crise actuelle au Mali, passant par le développement dans la région et une coopération internationale étroite dans les domaines visés par le nouveau plan d'action régional pour le Sahel. Cela vaut aussi dans le cas de la Libye où l'UE salue les initiatives diplomatiques entreprises par l'Algérie. Sur le Sahara occidental, l'UE soutient les efforts du secrétaire général des Nations unies et de son envoyé personnel en vue de parvenir à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable et en conformité avec les résolutions du Conseil de sécurité. Rappelons que le dernier réexamen de la politique européenne de voisinage (PEV) remonte à 2011 et donc, compte tenu des changements importants qu'ont connus les pays du voisinage depuis cette date, il a été décidé de procéder à un réexamen approfondi des hypothèses sur lesquelles repose cette politique, ainsi que de son champ d'application et de la manière dont il convient d'utiliser ses instruments. 2.2- Pour l'Algérie, l'Europe doit tenir compte, dans sa politique de voisinage, des atouts de l'Algérie, notamment de l'atout sécurité régionale assurée activement par l'Algérie dans sa lutte antiterroriste, contre le crime organisé et la pacification de la façade sahélo-saharienne à travers différentes médiations mais également de ses atouts économiques notamment par l'approvisionnement de l'Europe en gaz depuis plusieurs décennies et sur une base strictement commerciale. Dans l'optique algérienne, la promotion de la circulation des personnes, des idées et la protection des ressortissants des pays tiers légalement établis dans l'UE, doivent être pris en compte dans la nouvelle PEV afin de contribuer à la réalisation des priorités algériennes relatives à la diversification économique synonyme de promotion des exportations hors hydrocarbures, à la sécurité alimentaire, au renforcement des capacités humaines, institutionnelles et de gouvernance politique, économique et sociale. Toute la coopération Algérie/Europe tant verticale qu'horizontale devra se fonder sur la base d'un partenariat gagnant/gagnant, pour une prospérité partagée loin de tout esprit de domination. L'Algérie dans sa coopération avec l'Europe présente trois principaux avantages comparatifs à savoir : sa contribution effective sur fonds propres au processus complexe et coûteux de pacification et de sécurisation de la bande sahélo-saharienne dont tirent profit les voisins européens en termes de lutte contre le terrorisme, le crime organisé et la migration illégale, sans oublier les impacts économiques, C'est dans ce cadre que l'Algérie a décidé de participer à la PEV, initiée en 2004, et révisé en 2009 avec des propositions concrètes au cours duquel elle a contribué avec des propositions reprises dans le livre vert de la commission européenne du 4 mars 2015 telles que les principes de souplesse, de flexibilité et d'appropriation, en tant que fondement de la nouvelle PEV. Selon certaines informations erronées voulant isoler l'Algérie de l'arène internationale, avec des conséquences tant politiques qu'économiques désastreuses pour l'Algérie, concernant les franchises, allant jusqu'à affirmer la rupture de l'Accord d'association, le Ministère des affaires étrangères a précisé à maintes reprises qu»il n'est nullement question de l'annulation de l'accord d'association ou de la suspension des accords douaniers comme cela a été rapporté abusivement par la presse. L'Algérie serait, au contraire, plutôt, bien engagée dans le cadre de coopération qu'offre la politique de voisinage révisée (Europe 11443) depuis que cette dernière n'oblige plus à établir un plan d'action, jugé contraignant par Alger, en plus de la levée de la conditionnalité politique. Le dialogue sur l'énergie, axe principal de cette coopération, serait en bonne voie, comme l'atteste plusieurs rencontres sur le commerce du gaz dont la majorité des contrats arrivent à terme, entre la partie algérienne et européenne. En résumé, face à un monde en perpétuel mouvement, tant en matière de politique étrangère, économique que de défense, actions liées, avec les événements au Sahel, aux frontières de l'Algérie, ce qui se passe en Libye, se posent l'urgence des stratégies d'adaptation et d'une coordination, internationale et régionale afin d'agir efficacement sur les événements majeurs. Ces nouveaux défis pour l'Algérie dépassent en importance les défis qu'elle a eu à relever jusqu'à présent. Interpellée et sollicitée, l'Algérie s'interroge légitimement sur le rôle, la place ou l'intérêt que telle option ou tel cadre lui réserve ou lui offre, qu'il s'agisse du dialogue méditerranéen de l'Otan ou du partenariat euro-méditerranéen, dans sa dimension tant économique que sécuritaire. L'adaptation étant la clef de la survie et le pragmatisme un outil éminemment moderne de gestion des relations avec autrui, l'Algérie dont son devenir est dans l'espace euro-méditerranéen et africain doit faire que celui que commandent la raison et ses intérêts. 4- En résumé, l'Algérie est un des acteurs incontournables pour la stabilité de la région, et que toute déstabilisation de l'Algérie aurait des répercussions géostratégiques négatives sur l'ensemble de la région méditerranéenne et africaine, comme je l'ai souligné avec force dans mon interview donnée le 28 décembre 2016 à l'American Herald Tribune (USA) et à la tribune Fr en juin 2017 (France). Et bien entendu sous réserve que l'Algérie approfondisse l'État de droit la démocratisation de la société et qu'elle réoriente sa politique économique afin de réaliser un développement durable. C'est dans ce cadre que doit rentrer un partenariat gagnant/gagnant entre l'Algérie et la et les pays des deux rives de la Méditerranée occidentale, loin de tout préjugé et esprit de domination. (Suite et fin) Professeur des Universités, expert international Dr Abderrahmane Mebtoul