Un spectacle hilarant à une seule voix et plusieurs sujets non-conformistes, a été doublement présenté vendredi à Alger par l'humoriste français Haroun, nouvelle révélation de l'humour et du stand up francophone, devant un public nombreux. Adepte de l'humour noir, Haroun a séduit durant plus de 80 mn, le nombreux public de l'Opéra d'Alger Boualem-Bessaïh, dans un spectacle, laissé délibérément sans titre, qui a mis à nu les dérives humaines et les travers de la société moderne. La présence en surnombre des spectateurs qui ont continué à affluer, alors que tous les tickets de l' «unique spectacle programmé au départ», aient été écoulés a conduit les organisateurs à programmer une deuxième prestation le même jour (17h00 et 20h30). «Wary Nichen» (Houari, l'homme droit), un autre humoriste, globe-trotter originaire d'Oran, assurant la première partie du spectacle, a embarqué la salle dans une longue analyse de l'esprit biscornu que pouvait contenir le dialecte nord-africain, un jargon fait d'un «mélange de vocables empruntés du Français, à la forme arabisée», avant de dessiner les «traits de caractère» des habitants de quelques villes algériennes dans des caricatures qui ont fait beaucoup rire. Réitérant son «amour pour l'Algérie» dans un moment solennel, Wary rappellera la beauté de son pays d'origine, à travers l'évocation de «L'Algérie vue du ciel» (2015), documentaire aux paysages époustouflants, du cinéaste français, Yann Arthus Bertrand, avant de revenir au rire et à la dérision en énumérant quelques tares perceptibles une fois sur terre et finir en chantant avec «Tal ghyabek ya ghzali» du regretté Hasni Chakroun (1968-1994). Devant une salle chauffée à bloc, Haroun est ensuite apparu dans le prolongement des applaudissements nourris qui ont salué la prestation de «Wary Nichen», osant d'entrée, la comparaison entre la joie du rire et la situation des enfants au Darfour (ouest du Soudan), avec un humour acide, loin des codes du One Man Show. A travers une succession de transitions intelligentes, Haroun impose son propre style, alignant plusieurs sujets «préoccupants», dont le décalage social des niveaux de vie, l'éducation, la politique, la situation en Palestine et au Yémen, la religion, le terrorisme, le racisme ou encore l'écologie qui l'amènera à quitter sa posture statique et esquisser de légers mouvements pour imiter brillamment quelques animaux. Jetant un regard aussi ironique que malicieux sur notre monde, Haroun se meut avec aisance dans le décryptage de l'actualité, avouant ses «peurs et ses appréhensions», car son propos est acerbe et ses textes s'attaquent aux tares de la société et à celles de ceux qui l'organisent. «Je suis humoriste parce que je suis faible», a-t-il lancé à l'assistance avec laquelle il interagira longtemps avec un esprit de répartie piquant et drôle. Celui qui préfère se dire pour le moment, d'«origine humoriste» pour éviter, selon lui, «tout amalgame», a annoncé qu'il expliquera son choix dans «un spectacle» qu'il «écrira et présentera ultérieurement». Très applaudi par le public qui a savouré tous les moments du spectacle dans la délectation, Haroun a entonné à l'issue d'une prestation de haute facture, un «slam» dans lequel il se définit, faisant de son art une arme contre les inégalités. Diplômé en management, Haroun, loin de se voir, au départ, entretenir une carrière de comédien, écrit son premier spectacle «Tous complices» qu'il présente, en 2013, pour la première fois au public, qui a vite découvert un humoriste qui n'hésite pas à aborder tous les sujets, même les plus polémiques. En 2015, il débarque à Paris et offre une prestation remarquée au «Jamel Comedy Club» qui lui permettra de décrocher une collaboration avec le groupe France Télévisions. En 2017, alors qu'il a 33 ans, Il remonte sur scène avec «Haroun, tout simplement», son deuxième spectacle, pour récidiver ensuite avec ce spectacle, qu'il a déjà présenté les 20 et 21 février, au Maroc et en Tunisie, avant de venir, pour la première fois, à la rencontre du public algérois. Le spectacle de Haroun a été organisé en collaboration avec l'Opéra d'Alger, par «Keral Productions», qui a produit de nombreux événements en Algérie, à l'instar des spectacles de David Guetta, Diam's, Stromae, et récemment les quatre shows d' «Alger mon Humour», avec Nawel Madani.