C'était prévisible après le Rapport Stora qui annonçait des «gestes symboliques» et préconisait, notamment, la reconnaissance par la France de l'assassinat d'Ali Boumendjel. Arrêté au cours de la Bataille d'Alger, Ali Boumendjel a été placé au secret et torturé, puis assassiné par l'armée française le 23 mars 1957. Les Algériens le savaient. Les autorités françaises l'ont longtemps nié. Paul Aussaresses, sinistre général tortionnaire et assassin, a fini par avouer avoir ordonné à l'un de ses subordonnés de le tuer et de maquiller le crime en suicide. Enfin, le 3 mars 2021, par un communiqué officiel, la Présidence de la République française annonce que le Président français, Emmanuel Macron, a reconnu «au nom de la France» que l'avocat et dirigeant politique du nationalisme algérien, Ali Boumendjel «a été torturé puis assassiné» par l'armée coloniale pendant la Guerre de libération nationale». Selon ce communiqué, le mercredi 3 mars 2021 «le président de la République a reçu au Palais de l'Elysée quatre des petits-enfants d'Ali Boumendjel pour leur dire, au nom de la France, ce que Malika Boumendjel aurait voulu entendre : Ali Boumendjel ne s'est pas suicidé. Il a été torturé puis assassiné». Le président Macron leur a également dit «sa volonté de poursuivre le travail engagé depuis plusieurs années pour recueillir les témoignages et encourager le travail des historiens par l'ouverture des archives, afin de donner à toutes les familles des disparus, des deux côtés de la Méditerranée, les moyens de connaître la vérité». Il annonce que «ce travail sera prolongé et approfondi au cours des prochains mois, afin que nous puissions avancer vers l'apaisement et la réconciliation». Emmanuel Macron admet que «regarder l'Histoire en face, reconnaître la vérité des faits, ne permettra pas de refermer des plaies toujours ouvertes, mais aidera à frayer le chemin de l'avenir». Le communiqué de l'Elysée rappelle que «Ali Boumendjel est né le 23 mai 1919, à Relizane, dans une famille riche en talents, imprégnée de voyages, de culture et de combats politiques. Son père, instituteur, lui transmit le goût des savoirs. Le brillant écolier se fraya sans mal une place sur les bancs de la Faculté de droit d'Alger. C'est fort d'une culture ouverte, généreuse, humaniste, puisant aux sources des Lumières, qu'Ali Boumendjel s'engagea bientôt en politique, contre l'injustice du système colonial et pour l'indépendance de l'Algérie». «Ali Boumendjel laissait derrière lui un héritage politique important. Ses combats et son courage ont marqué à jamais les esprits algériens et français, parmi lesquels René Capitant, qui avait été son professeur», poursuit le communiqué. Le nouveau geste du Président Macron qui, au nom de la France, reconnaît que l'armée française a commis des assassinats d'Algériens pendant la Guerre de libération nationale, doit être suivi par d'autres gestes concernant toute la période coloniale. Les crimes commis par Bugeaud et consorts, doivent être reconnus et condamnés officiellement par la France. Idem pour les bombardements au napalm effectués par l'aviation française pour brûler à la fois les combattants de l'Armée de libération nationale (ALN) et les maquis et forêts qui leur servaient de refuges. Autre spécialité de l'armée coloniale française : les enfumades associées au nom de sinistres généraux français ; une pratique inventée par le corps expéditionnaire français durant la conquête de l'Algérie, en 1844 et 1845, consistant à asphyxier des personnes réfugiées ou enfermées dans une grotte, en allumant devant l'entrée des feux qui consomment l'oxygène disponible et remplissent les cavités de fumée. Les populations ainsi annihilées, dont des femmes et des enfants, ont représenté des tribus entières, soit des milliers de victimes.