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Face aux turbulences de l'économie mondiale
La décision de l'Opep+ juillet 2021
Publié dans La Nouvelle République le 27 - 07 - 2021

Lors de ses précédentes réunions, l'Opep+, après avoir décidé de retirer 9,7 millions de bpj du marché et après d'intenses négociations suite au blocage des Emiratis, lors de la 181e conférence ministérielle de l'Opep et la 18e réunion ministérielle Opep+, s'est accordée, le 18 juillet 2021, d'augmenter sa production de 400 000 barils par jour (bpj) à partir du mois d'août 2021, selon le communiqué, «afin de contribuer à alimenter la reprise économique mondiale alors que la pandémie s'atténue, l'Opep+ évaluera l'évolution du marché en décembre 2021».
Dépendante à environ 97/98% de ses recettes en devises des hydrocarbures traditionnels, avec des incidences sur les équilibres macroéconomiques et macrosociaux, l'Algérie est attentive à toute décision de la réunion de l'Opep+.
1- Le cours du pétrole est coté le 18 juillet 2021 73,59 dollars le Brent et 71,81 dollars le Wit avec une cotation eurodollar de 1.1805, contre le 05 juillet 2021, 77,16 dollars le Brent et 76,33 dollars le Wit pour un cours euro/dollar de 1,186. L'OPEP regroupe quatorze membres, principalement situés dans le Golfe (Arabie saoudite, Iran, Irak, Koweït, Emirats arabes unis), mais aussi en Afrique (Libye, Algérie, Nigeria, Angola, Gabon, Guinée équatoriale, Congo) et en Amérique latine (Equateur, Venezuela), le Qatar a quitté l'organisation en janvier représentant environ entre 35/40% de la production commercialisée au niveau mondiale. L'Opep+ en incluant les condensats, représente environ 55% de la production mondiale inclut dix autres pays pétroliers: Russie, Mexique, Kazakhstan, Azerbaïdjan, Bahreïn, Brunei, Malaisie, Oman, Soudan et Soudan du Sud, représentant environ en 2019, 18,15 mbj selon l'AIE, dont 11,44 mbj pour la seule Russie.
Trois pays membres du cartel historique sont exemptés de quotas au vu des difficultés économiques et politique : le Venezuela, l'Iran et la Libye, encore que Tripoli espère retrouver un niveau comparable à octobre 2018 et Téhéran, en discussions actuellement avec la communauté internationale en premier lieu les USA, pourrait revenir sur le marché prochainement. Le Mexique, qui avait bloqué l'an dernier l'accord de l'Opep+ par le passé est dispensé de coupe, tout en ayant promis un niveau de production raisonnable et les pays non-membres de l'Opep+ sont libres de leur volume de production: les Etats-Unis, premier producteur mondial de brut, mais aussi le Brésil, la Norvège, etc. Mais, il faut le reconnaître les compromis sont fragiles et l'influence de l'OPEP n'est plus celle des années 1974, surtout avec l'entrée des Etats-Unis (premier producteur mondial de brut) sur fond de boom de l'huile de schiste, et la Russie (deuxième pays producteur).
Or selon les experts, la demande mondiale de pétrole dépasserait l'offre de 1,6 million de barils par jour au troisième trimestre et de 2,2 millions de barils par jour au dernier trimestre et l'Agence internationale de l'énergie (AIE) dans son dernier rapport mi-juin, prévoit que la demande mondiale de pétrole dépasse les niveaux d'avant la pandémie d'ici fin 2022. Cependant, l'Opep+ fait face à une équation complexe partagée entre une reprise de la demande bien réelle mais qui reste fragile, la propagation du très contagieux variant Delta de la Covid-19, qui pousse plusieurs pays à mettre en place de nouvelles mesures de restrictions de déplacement des biens et des personnes, qui pourrait avoir pour conséquence une diminution de la demande du pétrole/gaz et des prix élevés, qui freineraient la croissance de l'économie mondiale toujours en convalescence, le prix d'équilibre souhaitable variant entre 65/70 dollars selon le ministre russe de l'Energie. C'est dans ce contexte, à la fois de la reprise de l'économie mondiale mais également des incertitudes de la crise, qu'il faille replacer la nouvelle stratégie pétrolière et gazière mondiale: notamment le gazoduc Israël-Europe, opérationnel vers 2025, mais supposant une stabilisation politique au niveau de la région, financé par les Emiratis, des tensions en Méditerranée entre la Turquie et la Grèce, le grand gazoduc Sibérie/Chine.
Et c'est dans ce cadre que rentre la géostratégie énergétique dont les conflits entre la Russie, les USA et l'Europe concernant les gazoducs dont le South Stream d'une capacité de 65 milliards de mètres cubes gazeux, du North Stream1, 55 milliards de mètres cubes et du North Stream2, également de 55 milliards de mètres cubes gazeux, soit au total plus de 180 milliards de mètres cubes gazeux en direction de l'Europe. Bien qu'au-delà du conflit géopolitique avec la Russie, l'opposition américaine au Nord Stream 2 pourrait faire partie d'une offensive commerciale des Etats-Unis. En effet, les USA sont un grand producteur de gaz et cherchent à accroître ses exportations de gaz naturel liquéfié (GNL) vers l'Europe. Mais, du fait du retour du processus inflationniste dont l'énergie constitue une des causes, certains observateurs n'excluent pas un assouplissement des positions suite à la rencontre récente entre les présidents Biden et Poutine, en rappelant que les réserves colossales de la Russie, environ 45 000 milliards de mètres cubes gazeux, celles de l'Iran (34 000) et du Qatar (17 000), leur permettent d'avoir une stratégie agressive et un coût de production compétitif sans compter les importantes réserves en Afrique du Mozambique et du Nigeria.
Conjoncture volatile
2- Mais toute analyse objective ne doit pas s'appesantir sur la conjoncture volatile mais calculer la moyenne de l'année. Si le baril gagne un dollar, en moyenne annuelle les recettes additionnelles, fonction du cours et du volume, le gain en chiffre d'affaire à ne pas confondre avec le profit net devant soustraire les coûts, varierait entre 400/500 millions de dollars. Dans ce contexte, il y a lieu de distinguer les court, moyen et long termes. A court terme, le prix est fonction de facteurs spéculatifs boursiers, de l'évolution des stocks américains et également chinois gros importateur toute baisse influant le prix à la hausse et de l'évolution du rapport euro/dollar, assistant à une dépréciation du dollar vis à vis de l'euro qui renchérit le cours du pétrole de plusieurs points, de la politique américaine qui à court terme pour renflouer les gisements marginaux de pétrole/gaz de schiste fortement endettés du moins à court terme. De l'évolution du modèle de consommation énergétique mondial dont la transition énergétique avec le développement des énergies renouvelables, dont le coût a baissé de plus de 50% étant devenu concurrentiel ;
– troisièmement entre 2030/2040, du développement de l'hydrogène dont l'expérimentation a déjà commencé et quatrièmement, de facteurs exogènes, les tensions géostratégiques au niveau des pays ayant d'importantes réserves. Mais tant pour le court, moyen et long terme, le facteur déterminant sera la nouvelle trajectoire de la croissance de l'économie mondiale. Si l'on s'en tient à 2021, selon la Banque mondiale, l'économie mondiale devrait croître de 5,6%, affichant ainsi un rebond post-récession d'une ampleur sans précédent en 80 ans. Cette reprise tient en grande partie au redressement vigoureux de quelques grandes économies, tandis que de nombreuses économies émergentes et en développement sont encore aux prises avec la pandémie de Covid-19 et ses retombées, indique la Banque mondiale dans sa dernière édition des Perspectives économiques mondiales. Les Etats-Unis et la Chine représenteront chacun plus d'un quart de la croissance mondiale en 2021.
Aux Etats-Unis, où l'économie a bénéficié d'un soutien budgétaire massif et la vaccination sera généralisée dans la population d'ici la mi-2021, la croissance devrait atteindre 6,8% en 2021 et l'économie chinoise, devrait afficher une croissance solide de 8,5% puis progresser à un rythme plus modéré à la suite d'un recentrage des priorités sur la réduction des risques d'instabilité financière. Mais la reprise, la production mondiale fin 2021 sera inférieure d'environ 2% aux prévisions pré-Covid. Dans les deux tiers des économies émergentes et en développement, les pertes de revenu par habitant subies en 2020 ne seront pas recouvrées en 2022. Dans les pays à faible revenu, où la vaccination a pris du retard, les effets de la pandémie ont effacé les progrès réalisés dans la lutte contre la pauvreté et aggravé l'insécurité et d'autres problèmes de longue date.
Face à cela, nous devrions assister au second semestre 2021 et en 2022 à un retour du processus inflationniste du fait à la fois à l'importante injection monétaire et à l'endettement public, à la rupture des chaînes d'approvisionnement notamment en provenance de l'Asie pour bon nombre d'entrants le prix du transport d'un conteneur, étant passé en un an, entre la Chine et l'Europe, de 1 800 dollars et en juin 2021 à autour de 10 000 dollars, de la hausse des prix des matières premières : le pétrole, gaz, le fer, le bois, l'aluminium, le soja, le blé, etc. et à la reprise de la demande. Ainsi, une première, l'Allemagne, connue pour sa rigueur budgétaire, devrait avoir, selon le ministre allemand de l'Economie, un taux d'inflation proche de 4% fin 2021, mais cela concerne la majorité des pays développés.
Cap sur les énergies alternatives aux fossiles
3- En décidant un investissement massif dans le cadre de l'efficacité énergétique, les énergies alternatives aux fossiles classiques dont les énergies renouvelables, le nouveau pouvoir USA, l'Europe, suivi de la Chine et de l'Inde, le monde devrait connaître entre 2025/2030 avec une accélération entre 2030/2035, un profond bouleversement de la carte énergétique et donc du pouvoir économique mondial (interviews – Pr A. Mebtoul AfricaPresse Paris, American Herald Tribune et Afrik Economy 2019/2020). D'ici 2030/2035, les investissements prévus dans le cadre de la transition énergétique Usa/Europe/Chine, Inde devrai dépasser les 4 000 milliards de dollars où les grosses compagnies devraient réorienter leurs investissements. L'élection américaine sera déterminante pour l'avenir car les démocrates ont une autre vision de la politique énergétique, avec le retour des USA aux accords de Paris COP21 sur le réchauffement climatique. Bien que le nouveau président dit ne pas vouloir interdire le développement du pétrole/gaz de schiste dont les UA sont le premier producteur mondial, s'engageant avec les nouvelles techniques à améliorer les effets de la fracturation hydraulique, le programme de Joe Biden prévoit 2000 milliards de dollars sur les 20/30 prochaines années, soit 10% du PIB 2019, pour le développement des énergies renouvelables, les industries écologiques et l'efficacité énergétique.
Plus globalement, le plan climat de Joe Biden prévoit d'investir, je le cite «dans les infrastructures intelligentes pour reconstruire la nation et pour garantir que nos bâtiments, nos infrastructures d'eau, de transport et d'énergie puissent résister aux impacts du changement climatique, de financer 1,5 million de nouveaux logements plus durables et éco-énergétiques, une réorganisation de l'industrie automobile vers les voitures hybrides et électriques, l'Etat fédéral devant programmer notamment l'installation de 500 000 bornes de recharge publiques sur le territoire et instaurer une prime à la conversion». L'Europe va dans la même trajectoire. La Commission européenne a fixé, avec le règlement d'exécution 2020/1294 du 15 septembre 2020 les règles du nouveau mécanisme de financement des énergies renouvelables. Chaque Etat membre doit contribuer à l'objectif européen de 32% d'énergies renouvelables en 2030. Une trajectoire indicative est fixée pour chacun d'entre eux, pour la période 2021-2030, avec des points de référence à atteindre entre 2025 et 2027, devant mobiliser au moins 1 000 milliards d'euros d'investissements durables dans les dix années à venir avec des incitations pour attirer les financements privés, grâce notamment au rôle essentiel que jouera la Banque européenne d'investissement. La Chine et l'Inde ont un fort engagement pour la transition énergétique.
Par exemple, selon le rapport de Global Wind Energy Council de 2019, la Chine et l'Inde font partie des cinq pays regroupant 73% de l'ensemble des capacités éoliennes mondiales installées. En termes d'énergie solaire, le soutien des gouvernements indien et chinois stimule la compétitivité de leurs filières solaire, faisant d'eux les premiers acteurs au niveau mondial. La Chine, pour tenter de réduire la pollution atmosphérique due à cet usage incontrôlé du charbon, investit massivement dans les énergies renouvelables : pays leader, prévoit d'investir d'ici 2030 375/400 milliards de dollars. Quant à l'Inde, elle s'est engagée à fortement développer les énergies renouvelables, en disposant en particulier de 100 GW de capacités solaires et de 60 GW éoliens d'ici à fin 2022 (contre 16,6 GW solaires et 32,7 GW éoliens à fin novembre 2017) devant mobiliser pour cette période près de 190 milliards de dollars selon les estimations de la Climate Policy Initiative (CPI).
Les USA/Europe, qui représentent actuellement plus de 40% du PIB mondial pour une population inférieure à un milliard d'habitants, poussent à l'efficacité énergétique et à la transition énergétique afin de lutter contre le réchauffement climatique. Car si les chinois, les Indiens et les Africains avaient le même modèle de consommation énergétique que les USA et l'Europe il faudrait cinq fois la planète actuelle. Cette prise de conscience d'un désastre planétaire a été accentuée avec l'épidémie du coronavirus où la majorité des pays devraient axer leurs efforts pour la limitation du recours aux énergies fossiles, charbon et pétrole horizon en tête, le monde et donc aller vers un Mix énergétique avec le développement de la taxe carbone, l'énergie de l'avenir horizon 2030/2040 étant l'hydrogène où la recherche développement connaît un réel essor.


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