La 16e édition des Rencontres du film court a commencé ce week-end à Antananarivo. Ce festival de courts-métrages panafricains emmène les spectateurs à la découverte des œuvres de réalisateurs du continent et de la Grande Île, avec 73 films projetés jusqu'au 27 novembre.Boyi-biyo ou « double-poumon », suit les pas de Shilo, un jeune pousseur de viande qui court de l'abattoir à la boucherie de son patron. Son rêve : gagner le marathon de Bangui. Une œuvre d'Anne Bertille Vopiande Ndeysseit, 27 ans, réalisatrice centrafricaine en compétition : « Quand on parle de notre pays, les gens voient seulement l'image de la guerre et donc nous nous sommes dit que nous devions nous lever pour montrer à l'extérieur que la République Centrafricaine ce n'est pas seulement la guerre. Il y a des jeunes talentueux qui ont des compétences et qui peuvent montrer les trésors cachés à travers le cinéma. Il faut oser. On a commencé avec les moyens du bord et ne pas baisser les bras». L'isolement engendré par la pandémie de Covid-19 a aussi été l'occasion d'une réflexion et d'un retour vers ses racines et sa culture, soulignent les organisateurs du festival. Avec son court-métrage, Tia, le danseur, Gilde Razafitsihadinoina, emmène les spectateurs dans son village natal du Sud-Est de Madagascar. « Dans le Sud-Est, il y a un groupe de danseurs traditionnels qui s'apparentent plutôt aux danseurs de tam-tam africains, mais qui est unique dans le pays dans le sens où ils se produisent essentiellement lors des cérémonies funéraires. C'est une occasion pour moi de faire connaître cette danse qui est assez méconnue dans les autres régions de l'île». Un tremplin pour les réalisateurs Un retour aux sources également pour le reporter d'images et réalisateur malgache Mamy Tiana Raberahona, avec son film documentaire Zanapokonolo, (fils du peuple, en français). « Comme je vis en France, ce film, c'est ma confrontation à la réalité d'Antananarivo, qui est ma ville de naissance, résume le réalisateur. Avec ce film, je pose la question : est-ce que le destin chaotique du pays peut influencer une trajectoire individuelle ? Un jour, j'ai filmé une scène de sauvetage d'une noyade et j'ai gardé les rushs. J'ai trouvé que Madagascar était comme cette scène. Dans le film, je parle des maux du pays, la pauvreté, l'exportation illicite des richesses de Madagascar à travers les gens que j'appelle « zanapokonolo », c'est-à-dire la base. Ce sont des gens qui n'ont pas été imbibés dans la cause politique politicienne. Ce sont des gens qui ont un regard simple sur la situation du pays. J'ai essayé de filmer la parole et donner un aspect de hors champs social, c'est-à-dire qu'il y a la continuation imaginaire de ce qu'on n'a pas vu. Le film est un acte de résistance tout d'abord et un catalyseur ». Accompagner, mettre en relation et exporter les films à l'étranger, ce festival, au-delà de présenter les œuvres au public, est un véritable tremplin et soutien pour les réalisateurs depuis 16 ans. Laza est le directeur et le fondateur des Rencontres du Film Court : « Nous sommes le festival de courts-métrages le plus ancien du continent. Il y a 16 ans, notre objectif était de faire l'état des lieux du cinéma malgache. Au fil des projets que nous avons mis en place, on a pu créer une génération de cinéastes, un peu comme les générations des cinéastes malgaches des années 70 et des années 80. Maintenant, je pense qu'il faut un nouveau cycle parce qu'on ne s'occupe plus réellement des débutants. Il faut une nouvelle formulation des Rencontres du Film Court et on est en train de la mettre en place, c'est-à-dire, aller dans d'autres endroits de Madagascar. On essaie de soutenir ceux que l'on a «créé». On a mis en place un fonds d'aide pour ces cinéastes que l'on a boosté. Mais notre association ne peut pas tout faire toute seule. Il faut aussi une vraie école de cinéma ici, des formations comme dans tous les autres pays, soutenues par une politique du gouvernement en place». 33 courts-métrages sont en lice pour le Zébu d'or, la plus haute distinction de la compétition officielle.