C'est le grand rendez-vous annuel des passionnés du 7e art à Madagascar. La 15e édition des Rencontres du film court a débuté ce week-end, dans la salle de cinéma de l'Institut français, à Antananarivo. Un festival de courts-métrages panafricains rassemble cette année les œuvres d'une trentaine de réalisateurs de la Grande Île et du continent, notamment du Kenya, du Sénégal, de la RDC, de la Côte d'Ivoire etc. Une programmation variée, avec 250 films diffusés jusqu'au 28 novembre et une thématique sur le changement climatique, problématique au cœur des préoccupations à Madagascar. «Dans mon film, je mets des sous-titrages quand les animaux crient parce que moi j'aimerais leur donner de l'importance. On va les considérer comme des acteurs et pas seulement des objets dans le film.» José Rakotobe est le réalisateur du court-métrage en compétition nationale et panafricaine, «Varecia Rubra», nom scientifique d'une espèce de lémuriens roux, en danger d'extinction. Pour raconter leur histoire, il s'est rendu dans la presqu'île de Masoala, dans le nord-est de Madagascar «J'ai voulu faire ce film pour que les gens qui vont voir ces animaux comprennent à quel point c'est difficile de les protéger et de les préserver. J'aimerais qu'ils ressortent avec l'idée que la nature est en danger à cause de nous, que parfois nous ne pensons plus à l'habitat. Une image vaut mille mots et je pense que le message va passer. C'est un film qui m'a un peu ruiné parce que pendant le tournage notre pirogue a coulé dans la mer et j'ai perdu des années d'investissement de matériel, mais heureusement les cartes mémoires étaient intactes et j'ai pu achever mon film.» Raconter ses propres histoires mais aussi faire des films utiles et éduquer, c'est ce que fait la génération actuelle de réalisateurs en Afrique, pour Laza directeur et fondateur des Rencontres du film court. «Nous faisons un cinéma d'urgence parce qu'il y a tellement de choses à dire. Il y a tellement de choses à prévenir. En Afrique, nous subissons pleinement les dégâts du changement climatique. C'est aussi pour cela qu'on a mis ce thème en place, pour responsabiliser les faiseurs de films. Quand j'ai appris que l'arbre le plus vieux du monde a presque 5 000 ans et qu'il est toujours vivant, ça m'a beaucoup marqué et je me suis demandé comment j'allais traduire ça dans un festival. Nous avons aussi un projet qui s'appelle «Hymne à la nature». Donc nous allons aller dans la forêt et on va mettre en place, un concert pour la nature avec des artistes malgaches. Il n'y aura pas de public humain. Le public sera la nature.» Faire émerger de nouveaux talents, exporter les films à l'étranger, c'est aussi la vocation des Rencontres du film court. À Madagascar, le milieu du cinéma est en effervescence mais les formations manquent. Fetra Ranaivoson, 27 ans, réalisateur et animateur 3D présente son premier court-métrage, «Miandry Bus», en compétition nationale et panafricaine. «La plupart des réalisateurs sont autodidactes et nous nous formons en ligne. Je pense qu'à Madagascar on a besoin de mentoring. Je peux apprendre l'animation tout seul, mais si je n'ai pas les remarques de professionnels qui sont déjà dans le métier, je ne peux pas vraiment m'épanouir. S'il y avait des formations, je pense qu'on pourrait progresser très rapidement et c'est ça ce qui manque, les écoles de cinéma et d'animation. Si je n'étais pas passionné par l'animation, j'aurais déjà abandonné il y a très longtemps.» La professionnalisation du secteur est l'une des priorités des Rencontres du film court depuis leur création il y a 15 ans. Des ateliers de financements de projets, des laboratoires de création participatifs ou encore de critiques de films à l'attention des réalisateurs ponctuent cette semaine de festival. Une vingtaine de courts-métrages sont en lice pour le Zébu d'Or, la plus haute distinction de la compétition officielle.