La bataille de «T'baboucht», dans la commune de Kimel, (sud-est du chef-lieu de wilaya de Batna), constitue l'un des haut faits d'arme de l'Armée de libération nationale (ALN), qui a galvanisé le moral des moudjahidine et de la population, dans les Aurès, trois semaines seulement après le déclenchement de la glorieuse Révolution, le 1er novembre 1954. Les moudjahidine qui ont été interrogés par l'APS pour apporter leur témoignage sur cette bataille, s'accordent à dire qu'elle eut lieu entre le 27 novembre et le 7 décembre 1954. «T'baboucht», dans la forêt de Kimel, fut une véritable hécatombe pour la soldatesque coloniale dont les morts se comptaient par centaines, c'est pourquoi beaucoup de témoins ayant vécu les péripéties de cette bataille ont parlé de «victoire miraculeuse» des moudjahidine. L'un des rares témoins encore de ce monde, le moudjahid Chérif Boudjenifa, rapporte que les soldats français ont été attirés sur un terrain fortement accidenté qui était devenu une chausse-trape mortelle pour l'ennemi. «Les moudjahidine n'avaient pas planifié la conduite des combats qui nous ont été imposés, en dépit de notre nombre réduit et notre armement sommaire», se rappelle-t-il, ajoutant que «la densité de la forêt de Kimel, son relief tourmenté et la méconnaissance du terrain par les soldats français ont été des alliés providentiels pour les moudjahidine, car deux unités ennemies se sont télescopées et ont fait des dégâts considérables dans leurs propres rangs». Des moudjahidine partis, après avoir livré leurs témoignages Les témoins de la bataille de «T'baboucht» ont été nombreux à enregistrer de leur vivant le récit de cet engagement qui a causé des centaines de morts dans les rangs de l'armée française, et la mort de sept moudjahidine. Les témoignages recueillis par l'APS étaient notamment, ceux de Mohamed Sbaïhi, Mohamed Djarmoune, Djoudi Kayour, Benamor Bayouche et Lakhdar Oucif. Ces interlocuteurs, dont certains ne sont plus de ce monde, avaient rapporté que les crêtes de «T'baboucht» avaient constitué le point de ralliement de trois groupes de moudjahidine, un groupe venu de Khenchela rattaché au commandement d'Abbas Laghrour, un deuxième groupe venu d'Oued Abdi et un troisième de Kimel, rassemblé pour une réunion de réorganisation de l'ALN. Lakhdar Oucif avait déclaré que la présence de l'armée française dans la région, avait été d'abord signalée par le moudjahid Salem Boubakeur qui était infirmier dans la zone d'Abbas Laghrour et qui avait échappé de peu à l'armée française, dans la forêt de Kimel. Les groupes de l'ALN ont alors vite fait de se retirer dans les abris naturels que constituaient les rochers escarpés de S'fah Ellouz. Ils savaient que l'engagement allait être inévitable. Le lendemain matin, 34 moudjahidine ont été encerclés, pendant que le reste avait réussi à se mettre hors de portée des tirs de l'ennemi, avait rapporté le même témoin. Les moudjahidine encerclés ont, dans un premier temps, réussi à se dégager de l'encerclement pour se positionner en contrebas de l'oued, en continuant à échanger des coups de feu nourris. Les soldats français ne se rendirent pas compte que les tirs qui venaient de l'autre rive de l'oued n'étaient pas ceux des moudjahidine, mais d'une autre unité relevant de leur camp. C'est ainsi que les deux groupes ennemis se sont entretués dans la confusion, avait confirmé feu moudjahid Amor Boussedjeda, qui a dit se souvenir que l'évacuation des morts a été effectuée par des navettes de camions pendant quatre jours. En guise de représailles, l'armée française s'acharna sur la population, tirant à vue sur tout ce qui bougeait, n'épargnant ni homme, ni bête. Les combats de «T'baboucht» avaient duré 24 heures dans la forêt dense de Kimel et les groupes de moudjahidine étaient commandés par le chahid Bachir Ouartane dit Sidi Hani, secondé par Messaoud Benzahaf, ont rapporté les témoins. Le secrétaire de wilaya de l'organisation nationale des moudjahidine, El Abed Rahmouni, a rappelé que la bataille de «T'baboucht» a été précédée les 16 et 17 novembre 1954, par des exactions commises par l'armée française dans le hameau de S'ra Lahmam, non loin de Kimel, un village entièrement rasé par les avions qui ont fait 75 victimes parmi les civiles, des femmes, des enfants et des vieillards. M.Rahmouni a insisté sur l'importance d'édifier une stèle commémorative sur ces lieux de mémoire à Kimel, pour laisser aux jeunes générations et à la postérité, le souvenir vivant des sacrifices consentis pour l'indépendance nationale, ainsi que les exactions et les souffrances imposées au peuple algérien par le colonialisme.