Cela faisait onze ans qu'ils tentaient de déchiffrer les runes d'un bracelet découvert en Ecosse. C'est un bracelet viking sur lequel bien des archéologues se sont cassé la tête depuis onze ans : en 2014, un retraité armé d'un détecteur de métaux découvrait dans un champ du Dumfries and Galloway, en Ecosse, ce qui devait bientôt se révéler être le plus gros trésor viking jamais trouvé dans le pays. Plus d'une centaine d'objets précieux en or, argent, cristal et pierre, mais aussi de riches tissus brodés, enterrés vers 900 après J.-C., étaient exhumés. Parmi eux, un bracelet de bras en argent richement décoré, dont l'inscription runique est longtemps restée un mystère. Alors que le trésor venait d'être prêté à la ville d'Adélaïde, en Australie, pour une première tournée internationale, le conservateur principal des collections médiévales et vikings du Musée national d'Ecosse, Martin Goldberg, a déclaré que les archéologues avaient enfin percé à jour l'inscription: «Ceci est la fortune appartenant à la communauté.» Un trésor commun Gravées à l'intérieur de la partie incurvée du bracelet, les runes résistaient à l'interprétation en raison d'une abréviation inconnue et... d'une faute d'orthographe. On y lit «DIS IS ЇIGNA ˑFˑ», or le mot «ïignaf» ne se retrouve dans aucune langue parlée en Grande-Bretagne ou en Irlande au début du Moyen-Âge. Les chercheurs ont fini par comprendre qu'il fallait entendre le «f» final comme signifiant «feoh», soit «richesse, propriété». «Iigna» pourrait alors se rapporter au vieil anglais «higna», qui désigne la «communauté». Quant au «dis», il s'agit vraisemblablement d'une retranscription phonétique de «this», soit «ceci». «Il est très intéressant de voir le mot «higna» inscrit sur un anneau de bras, car c'est le genre de chose que l'on devrait trouver concernant les concessions de terres et les revendications de propriété», relève Martin Goldberg. Ce bracelet semble pour sa part dénoter d'une appartenance religieuse communautaire, quand d'autres objets du trésor portent les noms de hauts-dignitaires, notamment religieux. Le conservateur se félicite ainsi de coller à l'esprit de la lettre runique en faisant voyager ce trésor collectif auprès d'autres publics, en le prêtant à des institutions internationales. Mais le trésor n'a pas encore livré le secret de toutes ses énigmes, et l'on ignore les circonstances précises dans lesquelles il a été enterré et par qui. Alors que l'époque était aux raids vikings, dépouillant les monastères de leurs magots ecclésiastiques, certains supposent qu'il a pu être enfoui sous terre pour être préservé d'une attaque scandinave. Une hypothèse sur laquelle les chercheurs pourront encore plancher quelques années.