Au cœur de la plaine béjaouie se dresse tout un tissu industriel et économique qui s'étend sur plusieurs centaines d'hectares. Un fleuron d'une industrie locale constituée d'un ensemble d'entreprises stratégiques et réputées, activant dans différents domaines. De la zone d'activité commerciale (ZAC) à la zone industrielle (ZI), un large espace s'étend d'Iheddaden à l'arrière-port, où tout s'y trouve, bois, ciment, fer, aluminium, équipements industriels et agro-alimentaires. Toutes ces activités, brillamment menées par le passé sous le monopole, se sont muées aujourd'hui à l'heure de l'ouverture du marché. Des entreprises publiques dont certaines sont leader sur la place, comme l'ENMTP, la SNS, la Cotitex, l'ENMGP, l'Enapat, l'ETR, la SNTP…et nombreuses sont celles qui ont mis la clé sous le paillasson à l'image de l'ENAOO, l'EDIED, l'ENAED, l'ETDE, l'ENATB, l'EPBTP, etc. D'autres suivent cette logique des dissolutions à l'exemple de l'Enapt et de la Cotitex, et certaines seront carrément proposées à la privatisation. Beaucoup se sont préalablement déployées dans le secteur de la construction (sans y avoir les qualifications) mais sont quand même parvenues à transformer leurs sites en cités. Nombreuses sont également celles qui ont suivi cette dernière logique porteuse à de nombreux égards, quant aux toutes dernières, notamment celles acquises par les travailleurs dans le cadre du RES, reprises au profit des salariés, elles ont été carrément cédées à des opérateurs. Ces zones d'activités et industrielles vivent au rythme des cessions et des habitations qui s'érigent et poussent comme des champignons, à telle enseigne qu'on ne sait plus aujourd'hui, si elles gardent encore leurs statuts, ou se sont transformées en zhun ? Les faits sont là, une cohabitation incroyable où se mèlent, dans une cacophonie insupportable, toutes sortes de nuisances générées par des chantiers, des usines en fonction, et des cris d'enfants jouant aux pieds de nouvelles coopératives fraîchement érigées. L'activité économique étant sensiblement réduite, le changement de statut se confirme. Même si elles activent encore pour nombre d'entre elles, les menaces pèsent au jour le jour. La délocalisation n'est qu'une affaire de mois. Un sursis qui s'exécutera à l'échéance. Les actifs sont jugés «résiduels». Il n'est plus question de gérer des parcs, des hangars, des ateliers… dans le grand espace urbain. La question qui se poserait, dès lors, qu'adviendrait-il d'une entreprise qui rétrocéderait son parc qui est sa source de vie, et à qui on aurait laissé que son bloc administratif ? Aucune n'échapperait à la règle, y compris celles qui ont été cédées aux travailleurs. Toutes auraient été sommées de restituer tout ou une bonne partie de leur assiette de terrains. Tout cet immense parc, aux poches éparpillées dans les zones, changerait de main et passerait sous la coupe des domaines et d'une agence chargée de la gestion du foncier. Des mastodontes, telles que ETR, ENAPAT, JUTE… et bien d'autres n'auront, désormais, pour infrastructures que leurs bureaux. En attendant que ces bureaux suivent également, à l'exemple de l'ENAPAT qui est sous le coup d'une dissolution. Que feraient également toutes les autres, dont aussi bien les gestionnaires soucieux pour leurs équipements, que les travailleurs pour leurs outils de travail ? Auront-elles des terrains de substitution, certaines ont déjà cautionné cette cessation anticipée de leurs activités, face au dilemme de disposer d'un siège sans son annexe de production, d'entreposage, et de son parc à matériel. Est-ce la fin d'un secteur qui a constitué, il y a si peu, une fierté nationale, et qui se retrouve aujourd'hui seul, lâché et enfoncé au bénéfice de concurrents ? N'aurait-on plus besoin du secteur public, se disent les travailleurs de la zone, qui vivent une véritable situation de turbulences. Est-ce l'unique voie pour se doter d'un foncier pour résorber la crise de logements ? Le prix est cher à payer, disent-ils à qui veut l'entendre.