A deux semaines de l'ouverture de sa conférence annuelle sur le climat, à Poznan, qui doit lancer la négociation sur le futur régime de lutte contre le réchauffement, l'ONU s'alarme de la hausse, continuelle, des émissions de gaz à effet de serre du monde industrialisé depuis 2000. «La hausse des émissions reste un sujet de préoccupation», a indiqué Yvo De Boer, le Secrétaire exécutif de la Convention des Nations unies contre les changements climatiques (CNUCC), en présentant, lundi à Bonn, l'inventaire 2006 des pays industrialisés. Selon ce relevé, les émissions des 40 pays industrialisés - dits de l'Annexe 1 - ont augmenté de +2,3 entre 2000 et 2006. Sur la période 1990-2006 (1990 étant l'année de référence pour la Convention et pour le Protocole de Kyoto), les émissions des pays industrialisés ont, globalement, baissé de -4,7% (sans compter les puits de carbone, les émissions liées au changement éventuel d'utilisation des terres et à la sylviculture). Cependant, ce résultat encourageant, obtenu entre 1990 et 2000 pour l'essentiel, est dû aux réductions spectaculaires dans les économies en transition de l'ex-bloc de l'Est (-37,6%, à elles seules) après la fermeture de nombreuses installations énergétiques et industrielles obsolètes (-56% en Lettonie, -44% en Roumanie...). Or, depuis, les émissions de l'Est ont recommencé d'augmenter (+7,4%, entre 2000 et 2006) en raison d'une forte croissance économique, a fait valoir M. De Boer, dont les propos étaient retransmis sur internet. Pour résumer, toute amélioration, depuis l'aube du 21e siècle, semble imputable à la conjoncture. Et il en va, ainsi, pour l'infime régression - un «ralentissement de la hausse» - des émissions entre 2005 et 2006 (-0,1%) : l'Europe et les Etats-Unis avaient, alors, connu «un hiver relativement doux et des prix du pétrole relativement élevés», a rappelé le patron du climat à l'ONU. L'Australie (+28,8% par rapport à 1990), le Canada (+21,7%), ou les Etats-Unis (+14,4%) restent particulièrement mauvais élèves, ainsi qu'en Europe l'Espagne (+50,6%) et le Portugal (+40%). Les émissions de CO2, qui représentaient 82,5% des GES en 2006, restent une préoccupation majeure en raison de l'addiction des sociétés développées et émergentes au pétrole, gaz et charbon. Exemple : le CO2 a bondi de +40% en Australie et, même, +57% en Espagne (1990-2006). Dans les 37 pays industrialisés engagés par le Protocole de Kyoto, les émissions totales ont globalement diminué de 17%, sur 1990-2006, mais ont repris à la hausse depuis 2000. Kyoto est le seul traité international imposant des objectifs de réduction des GES aux pays industrialisés (-5% sur 2008-2012). «Je suis convaincu que, globalement, ils sont capables de tenir leurs engagements... Mais pour certains, il faudra fournir un sérieux effort», a reconnu, lundi, M. De Boer. Pour lui, ces chiffres «témoignent qu'il est urgent d'avancer rapidement vers la définition d'un nouvel accord». Mais sur fond de crise financière, il a jugé «heureux qu'on n'ait pas à conclure d'accord à Poznan»... La communauté internationale doit entamer, le mois prochain en Pologne, la négociation du futur traité qui succèdera à cette première période d'engagement de Kyoto en 2013 et aura, jusqu'à fin 2009, pour s'accorder sur des objectifs de réduction. Selon les experts internationaux du GIEC, les émissions de GES devraient cesser de croître dans les quinze ans puis plonger, radicalement, pour contenir la hausse de température en deçà de 2 degrés en 2100.